Après avoir atteint des sommets historiques, les indices marquent le pas. Peuvent-ils reprendre leur marche en avant ? (Crédits photo : Adobe Stock – )
Les marchés financiers volent de record en record. Jusqu’où et y a-t-il un risque de créer une bulle explosive ? Jean-Paul Betbeze explique pourquoi les grandes bourses mondiales vont continuer de progresser malgré les nombreuses interrogations liées au contexte géopolitique tendu sur la scène internationale.
Pas de baisse de taux à la Fed et à la BCE : la Bourse devra attendre ! Le CAC 40 a dépassé les 8 000 points, battant en quelques mois son plus haut de l’année… 2000 (6 944 le 4 septembre). Cela lui a pris des années ! Mais il s’éloigne depuis quelques jours de son récent plus haut de 8 250, pour s’établir autour de 8 050. Le Dow Jones a également dépassé son plus haut de 2008, alors à 15 000. Il a dépassé les 40 000, mais le voici à nouveau autour de 38 400. Le CAC 40 et le Dow Jones vont-ils poursuivre leurs baisses ou reprendre leurs hausses ? Cinq explications.
Premièrement : pour que les prix augmentent, il faut d’abord de l’argent. Il y a quelques. Les politiques monétaires ont été généreuses pour sortir du Covid, au risque d’une hausse de l’inflation, risque qu’elles ont pris. Alors que cette inflation se calme petit à petit, ils s’apprêtent à baisser leurs taux, ce qui est bon pour la bourse. Dans la zone euro, cela pourrait être le cas pour la BCE à la fin du semestre ou de l’année, plus tard pour la Fed, lorsque toutes deux seront plus sûres de la désinflation. La BCE reste sensible aux prix des services et la Fed s’inquiète de la solidité du marché du travail avec 303 000 nouveaux emplois en février, contre 270 000 attendus.
Deuxièmement : il faut également de bonnes raisons techniques. Rien de mieux que la révolution technologique en marche, avec des actualités qui bousculent et bousculent les hiérarchies. Avec ChatGPT, Nvidia a triplé sur un an, presque doublé depuis janvier, avec l’idée que le champion va gagner. Aujourd’hui, on ne parle que de nouvelles architectures informatiques, et donc bientôt d’entreprises, avec moins de niveaux hiérarchiques, de stocks, de surfaces, donc plus de profits pour ceux qui agissent les premiers. Le grand ? Les monopoles de demain ?
Trois : et aussi des moins bons. Les guerres ont frappé ces dernières heures en Ukraine-Russie, Gaza-Israël, Iran-Israël… puis se sont propagées. Dans ce contexte, les Etats-Unis puis l’Europe tentent de regrouper leurs forces, prenant conscience des fragilités des chaînes de production qui avaient fait les multinationales d’hier. Il ne s’agit plus d’être multipolaire, mais « bien » bi- ou tripolaire : les cartes sont redistribuées. Il y aura moins d’alliances, plus de grands gagnants. D’où le pari sur des entreprises qui produisent dans de grands pays industrialisés ou chez des amis et voisins sûrs, des pays où politique industrielle et protectionnisme ne sont plus de gros mots : les États-Unis par exemple. Cela implique évidemment de ne pas oublier la recherche, la cyberguerre et l’industrie de l’armement, de plus en plus populaires.
Quatrièmement : c’est dans cette révolution technologique qu’interviennent les bouleversements climatiques. Face à tout cela, d’énormes investissements seront nécessaires. Donc, là encore, une polarisation sur la « tech » et ses valeurs boursières qui prend des allures de « solution à tout », comme l’électricité en son temps.
Cinq : dans le doute sur les quelques gagnants qui tireront toutes les chances de leur côté, voici les ETF (Exchange Traded Funds). En gestion d’actifs, cette classe est en hausse constante depuis 56 mois, pour atteindre 1 900 milliards de dollars. Vous ne choisirez plus de titres (gestion active), ce qui est compliqué et prend du temps, mais ferez des choix tout faits, basés sur des thématiques : par exemple la high tech indienne ! Le monde de la gestion passive est fait pour vous. Des cohortes (troupeaux ?) se forment. Vous montez avec votre choix… mais vice versa.
Car il ne faut jamais oublier que la hausse des titres est agréable pour ceux qui les possèdent. Ils ne se regardent qu’eux-mêmes, oubliant qu’une augmentation trop forte entraîne de fortes désillusions. Le monde change : cette révolution entraîne aujourd’hui une polarisation des esprits/espoirs sur NVIDIA, après Apple hier, polarisation d’autant plus dangereuse qu’elle fait oublier les risques de guerre. On ne les voit plus, jusqu’au jour où ils nous sautent au visage.
Il y a un risque de bulle sur les valeurs informatiques quand on ne les voit que : il faudra savoir comment en sortir. Ce n’est pas qu’une question de tarifs.