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«Attention au coup de com de Servier» – Libération

Face au spectre d’une perte de souveraineté sanitaire, l’État brandit la menace d’un veto en cas de rachat de la filiale du laboratoire français Servier, Biogaran, par un repreneur étranger. « Il faut que l’approvisionnement de la France en médicaments soit assuré et, pour cela, nous avons une arme : une procédure d’investissements étrangers en France que nous pouvons mobiliser pour que, si l’acheteur vient de l’étranger, nous posions des conditions à cette reprise, voire nous refusez-le »a réagi Roland Lescure, le ministre délégué chargé de l’Industrie, ce jeudi 18 avril, en marge de l’inauguration d’une usine à Bessé-sur-Braye (Sarthe).

L’an dernier, Servier aurait lancé la vente de copies de médicaments de marque de Biogaran, sa filiale génériques, qui produit un tiers du marché français. Quatre acheteurs sont en lice, dont deux Indiens, selon les Informés Et les échos. De quoi brandir les drapeaux tricolores, comme Florian Philippot, ex-RN, tête de liste Les Patriotes aux élections européennes, qui appelle l’exécutif à (ex-Twitter). Contacté par Libérer, Servier indique simplement que, « concernant Biogaran, aucune décision n’a été prise ». Le laboratoire précise également qu’il ne dispose pas « J’ai l’habitude de commenter les rumeurs ».

La question de la souveraineté sanitaire se pose bien au-delà du cas symbolique de Biogaran : depuis une vingtaine d’années, la plupart des premières étapes de fabrication des médicaments sont sous-traitées à l’étranger par l’industrie chimique et pharmaceutique, principalement en Asie, afin de bénéficier de coûts de production moindres. et les contraintes environnementales. Les laboratoires se justifient en soulignant que les prix des médicaments génériques anciens sont trop bas en France.

« Servier se moque de la santé publique »

La nouvelle n’est pas surprenante pour les experts en économie de la médecine, comme Nathalie Coutinet : « Toutes les grandes sociétés pharmaceutiques se spécialisent dans des médicaments innovants et très coûteux. Tous abandonnent progressivement leurs branches santé publique générale et génériques, comme Sanofi ou encore Novartis, qui a vendu Sandoz. Il ne s’agit pas de la rentabilité des vieux médicaments mais des choix stratégiques des Big Pharma.observe le chercheur de l’Université Sorbonne Paris Nord.

En pharmacie, « nous connaissons la vente de Biogaran depuis longtempscommente Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France. Les laboratoires recherchent le plus gros profit, en se spécialisant dans des traitements innovants vendus à des prix indécents et en se débarrassant de leurs succursales qui vendent des médicaments essentiels, dits matures, du quotidien. Mais Biogaran est rentable.”. Les ventes de médicaments génériques de Servier ont généré 1,29 milliard d’euros de chiffre d’affaires pour l’exercice 2022-2023, en hausse de près de 9 %.

« Ces dernières années, Servier a opéré un virage majeur dans les traitements innovants, notamment en oncologie. Comme pour toute entreprise, des revues stratégiques sont régulières afin de maximiser le potentiel de toutes nos activités. reconnaît l’entreprise. « Servier ne se soucie pas de la santé publique. Elle se concentre actuellement sur des niches hyper-rentables du cancer.commente Irène Frachon, lanceuse d’alerte du scandale Mediator, ce coupe-faim déguisé en antidiabétique produit par Servier, responsable de centaines de morts.

Le pneumologue brestois dénonce « un appel » : « Il faudra être extrêmement attentif à ce que Servier et Biogaran parviendront à obtenir dans le futur car l’effet d’annonce se veut clairement anxiogène : menaces sur l’emploi, pénurie de médicaments… Surgissent des éléments de langage qui ont toujours heurté le public. marque chez Servier pour atteindre ses objectifs. Nous avons le sentiment que notre santé dépend du devenir industriel de Biogaran !

« Possible chantage financier »

« Tout cela sera sûrement utilisé par les laboratoires pour tenter d’obtenir de l’Etat des hausses de prix des médicaments anciens.prévient également Nathalie Coutinet, pour avoir observé des stratagèmes similaires par le passé. Il ne faut pas tomber dans le piège du chantage en augmentant les prix et en distribuant des subventions publiques pour maintenir la souveraineté sanitaire.»

En réalité, Biogaran ne dispose pas d’usine sur le territoire. « Même si Biogaran ne produit pas directement en France, reconnut Roland Lescure, une partie de la production des génériques se fait en France via des sous-traitants. Nous examinerons les offres pour garantir que l’approvisionnement de la France en médicaments soit assuré et que l’empreinte industrielle soit préservée. »

En soi, l’implantation de Biogaran en France n’était pas une garantie de certains approvisionnements pour les pharmacies. En juillet 2023, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a même dû sanctionner Biogaran d’une amende de plus de 225 000 euros pour ne pas avoir respecté les obligations de stock de sécurité de l’amoxicilline, l’antibiotique le plus courant. n’est plus prescrit en France.

Malgré cela, fin août 2023, le laboratoire avait obtenu du gouvernement une augmentation de 10 % du prix de l’amoxicilline, en échange d’engagements à constituer des stocks suffisants. « Les laboratoires sont payés pour respecter la loi ! L’association de patients France assos santé a réagi. Cependant, l’antibiotique est encore rare.

«Nous voyons encore un possible chantage financierdéplore Irène Frachon. Les génériques Biogaran ne seraient pas rentables en France en raison des prix trop bas d’un pouvoir public présenté comme avare. Et pourtant, Biogaran ne semble pas jusqu’à présent particulièrement vertueux dans la lutte contre les pénuries.»

Des boîtes qui apparaissent « comme par magie »

La gestion des stocks est remise en question par les pharmaciens. Antoine Prioux dirige une pharmacie corrézienne. Il rapporte qu’il a récemment manqué de flécaïnide, un traitement contre les problèmes cardiaques, pendant trois mois. « Après avoir signé un contrat avec Biogaran qui en faisait le premier fournisseur de génériques de ma pharmacie, j’ai demandé des boîtes de flécaïnide que Biogaran a pu m’envoyer la semaine suivante, comme par magie »il témoigne.

Inversement, « Moi qui n’ai pas Biogaran comme premier générique, dans une situation de tensions d’approvisionnement en amoxicilline, je n’en reçois pas via le fabricant »témoigne Pierre-Olivier Variot, président du Syndicat des syndicats de pharmaciens d’officine, qui réclame plus de transparence dans la gestion des stocks. « Si Biogaran est à vendre, il vaudrait mieux nationaliser l’entreprise et se lancer dans la production publique de médicaments pour assurer l’approvisionnement », conclut Antoine Prioux.

Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire pour la transparence des politiques du médicament, réclame également une coordination de la production à l’échelle européenne et la création d’un centre public du médicament, rejetées par la majorité présidentielle en 2020. « Nous sommes dans la suite logique de ce que permet ce système. Vente au plus offrant, d’un acteur privé, bénéficiant certainement d’une aide publique, à un autre acteur privé. Seule une production partiellement publique des médicaments et les conditionnalités attachées aux aides publiques pourraient empêcher ce phénomène à l’avenir.elle réagit.

En décembre 2023, Servier a été condamné en appel pour homicide et blessures involontaires, tromperie aggravée, mais aussi cette fois pour escroquerie dans le cadre du procès Mediator : en plus d’indemniser les victimes, le cabinet doit rembourser la Sécurité sociale à hauteur de 415 millions d’euros. .

Servier s’est pourvu en cassation et, pour Irène Frachon, « la vente de Biogaran peut apparaître comme une conséquence possible de cette condamnation ». Le laboratoire serait obligé de vendre un fleuron français si la décision était confirmée par la plus haute instance de la juridiction française. Aux yeux du pneumologue, ce serait aussi une manière de tenter d’influencer la décision finale.

Cammile Bussière

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