Malgré le régime autoritaire et théocratique, les femmes iraniennes se marient de moins en moins
Les nouvelles les plus importantes de la journée

Malgré le régime autoritaire et théocratique, les femmes iraniennes se marient de moins en moins

Malgré le régime autoritaire et théocratique, les femmes iraniennes se marient de moins en moins


« Empêcher la croissance démographique de l’Iran en raison des risques qu’elle représente pour les superpuissances« : c’est le pseudo-plan des puissances occidentales qui pourrait expliquer le déclin des mariages en Iran, affirme Mohammad Reza Naqdi, l’un des dirigeants du Corps des gardiens de la révolution islamique.

Téhéran fait en effet face depuis plusieurs années à une baisse des mariages, passant de près de 800 000 par an en 2013 à 480 000 en 2023, selon l’Organisation de l’état civil d’Iran citée par le Financial Times. Cette baisse s’inscrit dans un contexte de stagnation économique et de mutations de la société iranienne.

Des changements démographiques qui n’expliquent pas tout

Une partie de ce déclin est simplement due au vieillissement de la population : le taux de fécondité en Iran est passé de 6,6 enfants par femme en 1980 à 1,7 en 2022, selon la Banque mondiale. Le nombre de naissances annuelles est passé de 1 708 000 à 1 151 000 sur la même période, tandis que l’âge médian est passé de 17,2 à 32,9 ans, selon les données de l’ONU. Le nombre de femmes mariées de moins de 50 ans est passé de 8 millions à 5 millions en une décennie.

En Iran, dans le désert le plus chaud du monde

A première vue, la baisse du nombre de mariages pourrait simplement refléter le vieillissement de la population. Mais l’âge moyen du mariage est lui aussi en hausse. Selon Shahla Kazemipour, professeure de démographie à l’Université de Téhéran, interrogée par le Financial Times, les femmes qui se marient à Téhéran ont en moyenne 27 ans, contre 25 en 2013, et les hommes ont 30 ans au lieu de 29 ans dix ans plus tôt.

Économie, éducation et lois restrictives

Toujours selon Shahla Kazemipour, l’augmentation du niveau d’éducation des femmes depuis la révolution de 1979 les a poussées à rejeter les hommes moins qualifiés qu’elles. Autre paramètre à prendre en compte dans l’équation : notre siècle serait celui du règne de l’individualisme, il n’est donc pas surprenant de voir le concept de mariage boudé par les Iraniens. D’autant que les lois iraniennes représentent un véritable fardeau pour les femmes mariées. En effet, selon cette dernière, les épouses doivent montrer l’autorisation de leur mari pour obtenir un passeport et voyager à l’étranger.

Un autre facteur, tout aussi important, concerne l’état de l’économie iranienne, marquée par une monnaie à faible valeur : un dollar vaut désormais 42 rials iraniens, contre 26 dix ans plus tôt. Fonder une famille dans ces conditions s’avère complexe, alors que le pouvoir d’achat des Iraniens est érodé par une inflation qui s’établit à 44,6 % sur un an en 2023 et n’est pas descendue sous les 30 % depuis 2018.

Vivre en couple sans se marier, un interdit de plus en plus remis en cause

Paradoxalement, alors que le nombre de mariages diminue, les « mariages blancs » augmentent. Attention, ce terme utilisé en Iran n’a pas la même signification qu’en France. Il désigne des couples vivant ensemble sans être mariés. Cette pratique contrevient aux lois rigoureuses de la théocratie iranienne, dominée depuis 1989 par le successeur de l’ayatollah Khomeiny, Ali Khamenei.

La révolte pro-droits des femmes de 2022, déclenchée par la mort de Mahsa Amini, une étudiante arrêtée par la police des mœurs chargée de contrôler le port du voile, visait à renverser les règles du régime chiite. Malgré des mois de mobilisation et la mort d’au moins 537 personnes, le gouvernement iranien est resté en place et a même rétabli sa police des mœurs en 2023, pourtant abolie après la mort de Mahsa Amini.

La répression mise en place par ce régime autoritaire et théocratique ne parvient pas complètement à contraindre les femmes à se conformer à leurs idéaux sociaux : Taghi Azad Armaki, professeur de sociologie à l’université de Téhéran, estime que ces mariages de convenance représentent 7 à 14 % des couples dans les grandes villes comme Téhéran et Ispahan.

GrP1

Quitter la version mobile