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Macron peut-il encore empêcher la mise en œuvre de l’accord de libre-échange entre l’UE et les pays d’Amérique du Sud ?

La France peut-elle encore éviter l’application de l’accord avec le Mercosur ? (ici Macron en décembre 2022)
JEAN THYS / AFP La France peut-elle encore éviter l’application de l’accord avec le Mercosur ? (ici Macron en décembre 2022)

JEAN THYS / AFP

La France peut-elle encore éviter l’application de l’accord avec le Mercosur ? (ici Macron en décembre 2022)

POLITIQUE – Une manche perdue, mais pas toute la bataille. Malgré l’opposition exprimée à plusieurs reprises par la France, le président de la Commission européenne a conclu, en Uruguay, à Montevideo, le traité de libre-échange négocié depuis plusieurs décennies entre le Vieux Continent et plusieurs pays d’Amérique du Sud, regroupés au sein du Mercosur.

Pour Ursula von der Leyen, cela « un accord profitera aux deux » pièces et « apportera des avantages significatifs aux consommateurs et aux entreprises. » « C’est le début d’une nouvelle histoire » s’est-elle réjouie vendredi 6 décembre, aux côtés du leader brésilien Lula et de l’Argentin Javier Milei. Une étape importante qui suscite beaucoup de colère en Europe, où les agriculteurs craignent notamment une concurrence déloyale dans les rayons.

En réponse, Paris confirme qu’Emmanuel Macron entend continuer à s’opposer au texte en l’état. « La Commission a achevé son travail de négociation avec le Mercosur, c’est sa responsabilité, mais l’accord n’a été ni signé ni ratifié », a souligné l’Élysée lors d’un échange avec des journalistes, au lendemain de l’annonce faite à Montevideo, expliquant que « donc ce n’est pas la fin de l’histoire”. Mais que peut concrètement faire le président de la République ?

Minorité de blocage

La France est le leader des pays opposés ou sceptiques à l’égard de ce traité de libre-échange. Outre d’éventuels leviers de pression – comme la « politique de la chaise vide » que lui conseille par exemple le Rassemblement national – Emmanuel Macron a encore sa carte à jouer. A condition qu’il trouve des alliés.

En effet, la Commission est la seule négociatrice des accords commerciaux au nom des Vingt-Sept, dans le cadre des traités européens. En revanche, l’accord signé vendredi doit encore être ratifié en obtenant l’approbation d’au moins 15 Etats membres représentant 65% de la population de l’UE, puis en réunissant une majorité au Parlement européen. S’il veut faire dérailler le train et stopper toute ratification, le chef de l’Etat français doit donc convaincre un « minorité de blocage. »

Pour torpiller le texte, cette coalition de réfractaires doit représenter quatre pays et 35 % de la population de l’Union européenne. C’est là que les choses peuvent devenir délicates. Actuellement, de nombreux dirigeants et pays européens sont favorables à l’accord, comme l’Allemagne et l’Espagne. Ils saluent un projet qui créera un vaste marché de plus de 700 millions de consommateurs en supprimant progressivement les droits de douane sur 90% des marchandises échangées entre les pays du Mercosur et ceux de l’UE.

Un enjeu politique majeur

Les dés sont donc déjà jetés ? Pas nécessairement. Face à ces partisans du traité, un front semble se former tant bien que mal. Après la France et le Premier ministre polonais Donald Tusk, l’Italie rejoint le club des pays rétifs, estimant que « Les conditions ne sont pas réunies pour souscrire au texte actuel. » Si les trois s’engagent finalement pour s’opposer à la ratification, ils devront encore convaincre un autre pays de remplir les conditions du  » minorité de blocage. »

Le président de la République pourrait notamment se tourner vers l’Autriche, les Pays-Bas ou l’Irlande qui ont déjà exprimé des réticences, sans toutefois franchir le pas d’une protestation farouche. S’il ne parvient pas à rassembler les voix nécessaires pour arrêter la machine, et que le Parlement européen valide à son tour le texte, celui-ci s’appliquera à la France. Que cela lui plaise ou non. Pour Emmanuel Macron, président déjà très affaibli sur la scène nationale, l’enjeu est donc majeur.

Rarement, il est soutenu dans son refus par l’ensemble de la classe politique (même si elle débat aujourd’hui de ses responsabilités dans la signature de l’accord) et par une grande partie de la population. Le Parlement a largement rejeté le principe de cet accord de libre-échange lors de votes essentiellement symboliques fin novembre. Et les sondages témoignent de la réticence des Français, bien plus prompts à soutenir les rébellions agricoles qui mettent la lutte contre cet accord de libre-échange au cœur de leur revendication. Un élément important pour les batailles futures.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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