Lutte anti-mafia : ce que la société corse doit apprendre de l’Italie
Retrouvez notre dossier complet :
1. Lutte anti-mafia : ce que la société corse doit apprendre de l’Italie
2. Lutte anti-mafia : des voyages qui alimentent le débat parlementaire
« Votre problème, c’est que la mafia ne tue pas assez dans votre pays. » Donc défini Leoluca Orlandol’ex-maire de Palerme, la situation en Corse en 2022.
Cette année-là, l’association Crim’Halt présidée par Fabrice Rizzoli invitait 26 personnes sur le territoire sicilien, afin d’étudier la Cosa Nostra : son fonctionnement, son apogée, ses faiblesses, et surtout, sa chute.
En 2024, Crim’Halt, qui lutte contre la criminalité organisée à travers « l’émancipation des citoyens »a récidivé en invitant 28 personnes, dans le cadre d’Erasmus+*, à se rendre au nord de Naples, Casal de Principe.
La petite ville est connue pour sa mozzarella et pour son lien avec la Camorra. Journalistes, étudiants, familles de victimes du crime organisé et groupes anti-mafia ont pu comprendre et apprendre comment cette ville de 20 000 habitants s’est libérée. de l’influence des familles mafieuses. Avant, ici, les « patrons » étaient les « Casalesi ».
Au cœur de cette délégation, qui a pu déguster de la mozzarella di bufala fabriquée sur des terres confisquées à la mafia italienne, quatre Corses. Valérie Clémens du collectif Une mafia non, une vie ; David Brugionide la Plateforme Citoyenne et référent corseAnticorEt Contrôleur Battistelliaccompagné par Jean-Toussaint Plasenzotti de Cullettivu anti-mafia Massimu Susini.
Un repenti qui travaille sur des biens confisqués
Au programme : commémorations, visites de biens confisqués à la mafia, rencontres avec des collaborateurs de justice, des témoins, des victimes et/ou leurs familles, et des repentis. Gaetanofait partie de.
« L’histoire de Gaetano est tout à fait représentative de ce qui se passe dans notre pays », expliquee Jean-Toussaint Plasenzotti, à propos de sa rencontre avec l’ex-soldat de la Camorra. Gaetano est un jeune homme qui grandit dans un quartier en proie à la mafia et qui, un jour, reçoit une contravention en échange de certains services.
D’abord, c’est pour aller acheter un Coca, ensuite pour surveiller, et enfin pour tenir un point de deal. « Gaetano était un trafiquant. Aujourd’hui, il travaille dans des biens confisqués à la mafia par l’État. des sourires Fabrice Rizzolile président et co-fondateur de Crim’Halt, mais aussi professeur de géopolitique du crime.
S’il y a quelque chose que les membres du collectif antimafia Massimu Susini retiendront de ce voyage, c’est leur rencontre à Herculanum – ville située au pied du Vésuve – avec Sofia Ciriello, propriétaire de la boulangerie Il forno di Sofia. En 2009, elle a refusé pour la première fois, malgré des menaces armées, de Céder à « pizza »la taxe mafieuse.
En réponse à sa révolte, elle reçoit une bombe. Immédiatement, Sofia Ciriello a porté plainte. Quatre jours plus tard, ses agresseurs étaient arrêtés. Ce qui a suivi un procès historique : 42 commerçants et victimes de racket se sont associés à Sofia Ciriello et ont aidé la justice à condamner 13 personnes.
Une union des citoyens désormais monnaie courante.
À ce propos, Manette Battistelli note : « Chez nous, on ne parle pas de la mafia dans la rue. Là-bas, les gens se promènent avec des autocollants sur leur sac à dos, des affiches dans leurs restaurants. « Non à la mafia », « Pizzo nò (pas de racket ici) ».«
À Casal del Principe également, la société s’est débarrassée de la pègre. Notamment grâce à la mort d’un homme, 30 ans plus tôt. Celui du curé Don Peppe Dianeassassiné le matin du 19 mars 1994 dans la sacristie de son église.
PasteurConnu pour sa prédication anti-Camorra, a reçu cinq balles, dont deux dans la tête. Un témoin de la scène s’est immédiatement rendu au carabiniers et devint par la suite un collaborateur majeur de la justice dans cette affaire.
L’homme a payé de sa tranquillité – il s’est exilé pendant quatre ans – l’arrestation de l’assassin de son prêtre et le soulèvement de son peuple.
ZOOM. Ercolano, une ville de racket ; Casal di Principe, ville révoltée.
Pour Manette Battistelli, le cas de la Corse est « une course contre la montre puisque le système mafieux corse est en train de s’organiser ». Pour l’oncle de Massimu Susini, cela pose une question essentielle : « Les Italiens ont résisté collectivement, soutenus par les pouvoirs publics et les élus, pourquoi pas nous ? »
* Erasmus+ est un programme qui permet d’obtenir des bourses de l’Union européenne pour « soutenir l’éducation, la formation, la jeunesse et le sport en Europe ». Ainsi, il finance les déplacements des organismes qui y postulent dans un but précis. Ici, Crim’Halt en bénéficie depuis 2019 dans le cadre de formations et d’apprentissages en matière de lutte contre la criminalité organisée.