La révélation dans le média Espace Collectif d’une information selon laquelle les équipes de Tadej Pogacar (UAE Emirates) – qui a confirmé – et Jonas Vingegaard (Visma-Lease a bike) utiliseraient l’inhalation de monoxyde de carbone pour améliorer leurs performances, a suscité des interrogations dans un peloton qui cherche des réponses.
Qu’est-ce que le monoxyde de carbone ?
Il n’est pas fréquent de trouver mention du monoxyde de carbone dans les sujets traitant du sport. En effet, ce gaz incolore et inodore se retrouve le plus souvent dans la rubrique actualité en raison des intoxications, voire des décès, qu’il peut provoquer dans les habitations où il s’est échappé, généralement à cause d’un dysfonctionnement d’un système de chauffage comme les poêles. « Le monoxyde de carbone est un poison gazeuxprésente Gérard Dine, docteur en biotechnologie. Normalement, nous avons entre 0,5 et 3% dans notre sang selon que nous vivons dans un endroit plus ou moins pollué. Les fumeurs peuvent atteindre un taux de 10%. En revanche, en cas d’intoxication (plus de 60%) Cela devient dramatique et peut conduire à la mort.
Pourquoi le retrouve-t-on dans le cyclisme ?
Comme tous les sports où le travail aérobie est essentiel, le cyclisme n’échappe pas à la course au transport de l’oxygène vers les muscles. C’est pourquoi les spécialistes de l’entraînement ont identifié depuis quelque temps l’entraînement en altitude (plus communément appelé entraînement hypoxique) comme l’un des processus pouvant améliorer la production d’hémoglobine et donc le transport de l’oxygène. Et c’est notamment pour surveiller et contrôler cet entraînement en altitude que certaines équipes cyclistes utilisent un recycleur de monoxyde de carbone.
« Avec ce type de méthode, nous pouvons connaître au gramme près la quantité d’hémoglobine que nous avons dans notre sang.explique Raphaël Faiss, directeur de recherche au Centre de recherche et d’expertise en sciences antidopage de Lausanne (REDs). Pour prendre une image simple, on peut imaginer une grande cruche d’eau (le sang) que nous aimerions mesurer. C’est compliqué à voir, alors on introduit un peu de sirop (monoxyde de carbone) à l’intérieur de laquelle on mélange. Comme on connaît la concentration du sirop avant de le mélanger à l’eau, on peut aussi la mesurer une fois le mélange fait. Cela nous permet de tout mesurer. Ainsi, avec l’appareil, l’athlète peut respirer une dose connue et très faible de monoxyde de carbone et comme ce gaz se fixe très bien sur l’hémoglobine, on estime qu’en quelques minutes, il fait le tour du corps et on peut alors connaître la valeur totale dans le corps. Cela nous permet, par exemple, de voir si l’entraînement en altitude a permis à l’athlète de gagner de l’hémoglobine. Plus on a d’hémoglobine, plus on sera efficace.
Quelles sont les déviations possibles ?
En plus de la possibilité d’effectuer un test biologique, un » DEVIATION « du concept, pour reprendre les termes de Gérard Dine, pourrait être utilisé. « L’idée de base est d’être en hypoxie pour améliorer les liens dans les voies d’oxygèneaffirme Gérard Dine. Avec ce type de machine, vous pouvez forcer quelqu’un à être en hypoxie en lui jetant du monoxyde de carbone. Vous pouvez donc contrôler le degré d’hypoxie que vous lui imposez par rapport au taux de monoxyde que vous lui faites inhaler. Cela permet de reproduire les effets de l’altitude. Si vous avez un gain de quelques pourcentages, cela peut être intéressant même si chaque athlète a sa propre réaction à l’hypoxie.
Mais contrairement à d’autres gaz comme le xénon (qui favorise la production naturelle d’EPO) qui est interdit par l’Agence mondiale antidopage (AMA), le monoxyde de carbone ne figure pas actuellement sur la liste des produits et méthodes interdits par l’AMA. « En effet, si vous respirez une certaine dose de monoxyde de carbone, les heures qui suivent, c’est comme si vous simuliez l’altitudetempère Raphaël Faiss. Mais ce n’est pas une technique idéale pour le faire, il est beaucoup plus efficace d’utiliser des caissons hypoxiques ou un travail précis en altitude par exemple. Par contre, pouvoir mesurer son hémoglobine est important car bien gérer le travail en altitude peut permettre des gains physiologiques similaires à de petites prises d’EPO par exemple.