L’Unédic lance un appel à l’État pour réduire la facture
L’Unédic tire la sonnette d’alarme sur le coût croissant du chômage des frontaliers, estimé à 800 millions d’euros par an. En réponse, l’organisation réclame une révision des règles d’indemnisation entre la France et les pays voisins. Le gouvernement semble déjà prêt à agir, mais des négociations complexes sont attendues avec les partenaires sociaux et au niveau européen.
Un coût élevé du chômage pour les frontaliers
L’Unédic, l’organisme chargé de gérer l’assurance chômage en France, pointe une nouvelle fois le coût exorbitant du chômage pour les frontaliers, principalement suisses et luxembourgeois.
En présentant ses prévisions financières pour 2024, l’Unédic a révélé que cette charge s’élève à environ 800 millions d’euros par an, dépassant les 9 milliards d’euros depuis 2011. Jean-Eudes Tesson, président de l’Unédic, a exprimé un « ras-le-bol » grandissant au sein de l’organisation, soulignant l’urgence de revoir les règles d’indemnisation entre la France et les pays où travaillent les frontaliers.
Actuellement, les frontaliers cotisent dans le pays où ils exercent leur activité, mais c’est le pays de résidence, en l’occurrence la France, qui assure l’indemnisation en cas de chômage. Depuis 2010, les Etats employeurs ne remboursent que trois à cinq mois d’indemnités, laissant à l’Unédic le soin d’assumer le surplus lorsque la durée du chômage dépasse ces délais. Or, les frontaliers restent souvent au chômage pendant plus de cinq mois, générant un coût important pour la France.
Jean-Eudes Tesson a particulièrement mis en avant la Suisse, où 61% des frontaliers travaillant dans ce pays résident en France. » Il est temps que la Suisse rembourse les bénéfices qu’elle réalise grâce à notre système d’assurance chômage. », a-t-il déclaré. Le Medef soutient cette position, appelant à un aménagement des modalités de remboursement, alors que la dette de l’Unédic atteint 59 milliards d’euros, largement alourdie par la crise du Covid-19.
Des négociations complexes à venir
Face à cette situation, l’Unédic demande à l’État français d’être plus actif dans les négociations européennes. Patricia Ferrand, vice-présidente de l’Unédic, a rappelé que cette question était sur la table depuis longtemps, sans que des actions concrètes n’aient été entreprises. » Nous appelons l’État français à renforcer ses positions dans les négociations européennes », a-t-elle déclaré.
Le gouvernement semble avoir pris conscience de l’urgence de la situation. Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du Travail, a affirmé dans un entretien à L’Opinion qu’elle compte revenir à la charge de réviser le règlement européen sur le remboursement des allocations de chômage pour les frontaliers. Elle a également suggéré de revoir les critères définissant une « offre d’emploi raisonnable » pour ces travailleurs.
Actuellement, les frontaliers peuvent refuser des offres en France, au motif qu’elles ne correspondent pas à leur niveau de rémunération antérieur, souvent plus élevé en Suisse ou au Luxembourg. Cette situation permet à ces demandeurs d’emploi de continuer à percevoir des allocations chômage plus longtemps que prévu.
Toutefois, les négociations s’annoncent complexes, tant au niveau européen que national. Les partenaires sociaux, engagés depuis le 22 octobre dans une nouvelle phase de discussions sur l’accord sur l’assurance chômage, ont souligné la difficulté d’introduire de nouvelles règles spécifiques aux frontaliers dans le délai, qui s’achève le 14 novembre. Si certaines mesures sont à l’étude , la CGT insiste sur la nécessité de protéger les frontaliers, qu’ils soient cadres ou ouvriers, contre d’éventuelles décisions trop punitives.