Les mots font froid dans le dos. La résignation qui les accompagne encore plus. « La sensation était celle d’un viol. On m’a fait faire quelque chose que je ne voulais pas faire ce soir-là. J’avais envie de la toucher, de la caresser, d’explorer son corps, mais je ne voulais pas aller jusqu’au bout parce qu’elle ne voulait pas. (…) J’avais l’impression de me violer, parce que je me forçais. À un moment donné, je lui ai dit : « Je ne veux pas réessayer« et elle a répondu : « Mais il faut que ce soit le cas. »
Dans la tradition juive ultra-orthodoxe, le mariage suit un certain nombre de coutumes. Parmi eux, la nuit de noces dans « la chambre d’isolement ». «Je n’avais pas l’impression que cet acte créait un lien entre nous. Et ce traumatisme persiste. Je connaissais à peine mon mari et j’ai dû faire quelque chose que je ne voulais pas. »explique une femme anonyme.
Rachel Elitzur s’est appuyée sur sa propre expérience de juive orthodoxe pour réaliser ce documentaire sur les nuits de noces. Elle a recueilli des témoignages d’hommes et de femmes de la communauté israélienne qui ont souhaité rester anonymes et ont fait interpréter leurs propos par des comédiens.
A la manière d’un making of, en studio et sous des projecteurs aux multiples câbles, sont filmés les échanges entre le journaliste et les acteurs. Un choix audacieux qui donne au spectateur l’impression d’entendre une conversation et de plonger un peu plus dans l’intimité de ces couples.
Une loi religieuse implacable
Les coutumes sont dures et la loi religieuse incontestable. À tel point qu’elle arrache trop souvent la fin de l’adolescence. «J’avais un peu plus de 18 ans lorsque je l’ai rencontré. Le lendemain, nous nous sommes revus une seconde fois et, le soir même, le mariage était décidé. (…) Je savais qu’on devait s’embrasser et dormir nus, mais je pensais que les bébés naissaient par le nombril »dit un témoin.
Il poursuit : «Je n’avais aucune conscience sexuelle. Mon conseiller matrimonial m’a tout expliqué. Mais nous ne l’avions pas préparée. On lui a seulement dit que nous rentrerions à la maison et que son mari ferait des choses. »
L’oppression patriarcale, dans sa version juive orthodoxe, hante le documentaire. Comme lorsque cet homme décrit avoir été guidé par un directeur spirituel : « Nous parlions principalement du fait que les femmes sont influencées par leurs sentiments, tandis que les hommes sont guidés par la raison. » Dans les cours de préparation au mariage, on enseigne aux femmes qu’elles doivent apprécier et honorer leur mari, car « l’homme est la lumière de leur vie ». Un documentaire édifiant.
nuits de nocesArte, 22h35