Lors de son voyage vers Jupiter, la sonde Juice tente un survol Lune-Terre unique et délicat
Il faut bien se le dire, la sonde Juice de l’Agence spatiale européenne (ESA) avait été quelque peu délaissée après son décollage de Kourou à bord d’Ariane-5 en avril 2023. C’était le début d’un long voyage la conduisant jusqu’à Jupiter, qu’elle atteindra en 2031, avec pour objectif principal d’étudier les conditions d’habitabilité des trois grandes lunes joviennes Ganymède, Callisto et Europe, qui possèdent un océan sous leur croûte glacée. Depuis seize mois, dans le vide froid de l’espace, Juice effectuait une large boucle la ramenant… jusqu’à nous.
En effet, malgré toute sa puissance, la regrettée Ariane-5 n’était pas capable d’envoyer directement la sonde vers Jupiter. Pour l’amener jusqu’à la géante gazeuse, les navigateurs de l’ESA (que l’on appelle moins poétiquement « analystes de mission ») ont imaginé une trajectoire complexe qui permettrait à la sonde de bénéficier de l’assistance gravitationnelle, c’est-à-dire des déviations et des accélérations apportées par la masse des planètes lors de leur passage à proximité.
Une grande partie de billard cosmique a ainsi débuté avec un survol de la Lune, lundi 19 août à 23h16 (heure de Paris), au cours duquel Juice a frôlé notre satellite à moins de 800 kilomètres de sa surface. Cela a eu pour effet de redresser sa trajectoire vers la Terre, qu’il devrait survoler à 6 800 kilomètres d’altitude mardi 20 août à 23h57. Un peu comme une balle de golf effectue un virage à 90 degrés, flirtant avec le bord du trou mais sans y tomber, le passage à proximité de notre Planète bleue va violemment redresser la trajectoire de la sonde, qui partira à un rendez-vous avec Vénus en 2025. Deux nouvelles assistances gravitationnelles terrestres suivront, en 2026 et 2029, lorsque Juice se dirigera vers Jupiter.
Dans l’histoire des voyages spatiaux longue distance, c’est la première fois qu’une double assistance Lune-Terre est tentée. « Jusqu’à présentreconnaît Arnaud Boutonnet, analyste de mission à l’ESA, qui a développé la trajectoire de Juice, Lorsque nous avions l’assistance gravitationnelle de la Terre, la Lune était plutôt considérée comme une perturbation » Il fallait bien qu’il y ait une compensation. Changement complet de philosophie avec Juice, qui va tenter de combiner les effets de fronde fournis par la Lune et la Terre pour optimiser sa trajectoire, ce qui, concrètement, lui fera économiser du carburant. Une tentative rendue possible grâce au fait qu’il est désormais possible de suivre et d’ajuster très finement la trajectoire de la sonde avant le double survol.
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