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L’opposition municipale annonce la préemption du terrain de Cristayes par la Safer

Le vendeur de ces 67 hectares peut désormais se retirer de la vente. Ou accepter l’offre de la Safer qui est bien inférieure à ce que la Ville de Gap lui proposait jusqu’à présent.

Un nouveau rebondissement s’est produit dans le dossier foncier des Cristayes et pourrait bien sonner le glas d’un grand projet municipal à Gap (Hautes-Alpes). Des groupes d’opposition municipaux ont annoncé, ce samedi 21 septembre, la préemption des terrains dans le cadre de l’achat par la municipalité de 67 hectares dans le secteur des Cristayes.

« Après accord du commissaire du gouvernement, l’État, cette zone est préemptée par la Safer au prix de 400 000 euros », se réjouit Charlotte Kuentz, d’Ambitions pour Gap. Une somme bien éloignée des 2,1 millions initialement proposés par la Ville au vendeur. Une offre revue à la baisse en juin dernier par le maire face à l’extrême levée de boucliers politico-administrative que sa décision a provoquée.

Tout a commencé en septembre 2023. Il y a un an, lors du conseil municipal, Roger Didier annonçait que la Ville acquérait les 67 hectares de Cristayes pour créer « une ceinture verte en périphérie des zones urbanisées ». En bref, une action visant à préserver les terres agricoles contre tout bétonnage.

Un prix d’achat surévalué ?

Mais le 5 décembre 2023, le maire a finalement révélé qu’il souhaitait implanter sur ce site, situé entre Sainte-Marguerite et Châteauvieux, la future plateforme de biodéchets de l’agglomération et les boues de la station d’épuration. Des boues jusqu’ici stockées à proximité du nouvel abattoir et nécessairement déplacées, sous peine de condamner l’ouverture du bâtiment pour des raisons écologiques et sanitaires.

Problème, la ville de Gap veut mettre 2,1 millions d’euros sur la table pour racheter le terrain de Joëlle Roussin-Bouchard. Un prix 30% plus cher que l’estimation des Domaines, qui représente l’Etat en cas d’acquisition foncière par une collectivité. Les Domaines ont estimé les 67 hectares de Cristayes à un montant de 1,62 million d’euros. Tollé dans l’opposition du maire qui y voit « un gaspillage d’argent public ».

Le 14 juin, Roger Didier a révisé sa copie en déposant une nouvelle résolution au conseil municipal. Le prix d’achat est alors passé de 2,1 à environ 1,7 millions d’euros. A cette résolution est jointe une lettre de la venderesse qui déclare vouloir se mettre en conformité avec la loi et éviter les recours déposés en annulation de la vente.

Appel et plainte déposés

Il faut dire que les procédures ont été nombreuses. En décembre 2023, les groupes d’opposition Gap Autrement et Territoire, Écologie et Solidarité avaient déposé une première plainte devant le tribunal administratif de Marseille pour contester la délibération initiale. L’association anticorruption « AC » avait fait de même, cette fois au pénal, pour prise illégale d’intérêts et détournement de biens publics. Le 12 février, c’était au tour d’un autre groupe d’opposition, Ambitions pour Gap, de se tourner vers le tribunal de Marseille en plus de signaler la délibération à la Cour des comptes.

C’est désormais au tour de la Safer 05 de donner des sueurs froides à la vendeuse de Cristayes et au maire de Gap. Sous la tutelle des ministères de l’Agriculture et des Finances, la Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural des Hautes-Alpes a des missions d’intérêt général.

Elle facilite par exemple l’installation de nouveaux agriculteurs, mais peut aussi encadrer la vente de terres agricoles pour ne pas fausser le marché immobilier. « C’est pour cela que le terrain a été préempté à 400 000 euros. Il ne pouvait pas y avoir un tel écart entre la vente à Cristayes et le prix du marché. Cela aurait complètement déstabilisé l’installation de futurs agriculteurs », souffle l’entourage de la Safer 05. Et de poursuivre : « Aujourd’hui, il y a deux solutions. Soit la vendeuse accepte le prix fixé par la Safer, soit elle se retire de la vente. »

Un coup dur pour l’actuel propriétaire mais aussi pour le maire de Gap qui pourrait sans doute revoir ses plans pour l’installation de la future plateforme de biodéchets. Une troisième possibilité demeure, en cas de vente au prix récemment fixé, la Safer pourrait entamer des discussions exclusives avec la Ville de Gap pour libérer le terrain. Mais le vendeur devrait alors accepter une baisse drastique du prix de sa parcelle.

Le maire de Gap visé par son opposition

« Le prix de 1 786 620 euros est resté anormalement élevé. Outre le gaspillage de l’argent public, cette opération risquait sans doute de renchérir le prix des terres agricoles du Gapençais. Aujourd’hui, la mobilisation porte ses fruits, rappelant au maire de Gap que l’insouciance a ses limites », estime Charlotte Kuentz, du groupe d’opposition Ambitions pour Gap.

Un sentiment partagé par la députée (NFP) et conseillère municipale d’opposition Marie-José Allemand. « Cette préemption de la Safer montre que le gaspillage d’argent prévu par le maire de Gap heurte le bon sens et le courage », assène la cheffe de file du groupe d’opposition Gap Autrement.

« Depuis le début de cette affaire, notre position est constante et nous sommes heureux de voir que la transaction peut se faire à un prix juste. La gestion catastrophique du maire de Gap laisse présager un nouvel échec cuisant pour lui et son équipe. Le bon sens doit prévaloir et l’argent des Gapois ne doit pas être gaspillé. » Un avis partagé par les membres du groupe Territoire Écologique et Solidarités. Contacté, Roger Didier n’a pas donné suite à nos sollicitations.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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