Avec la « loi Airbnb », les députés ont adopté ce jeudi un texte qui intéresse particulièrement les habitants des régions touristiques françaises, mais toutes les communes de France pourront s’en emparer. Le projet de loi était dans les cartons depuis près de deux ans, il avait été suspendu avec la dissolution de l’Assemblée nationale et il a finalement été adopté par les sénateurs puis les députés après quelques compromis. « C’est un texte pour les Français, pour tous ceux qui recherchent un logement de longue durée et qui n’arrivent pas à trouver un logement »a souligné, lors des débats au Sénat, la ministre du Logement Valérie Létard.
Que prédit-il le texte de la loi porté par une députée socialiste des Pyrénées-Atlantiques, Iñaki Echaniz, et une députée Renaissance du Finistère, Annaïg Le Meur votée successivement par le Sénat et l’Assemblée nationale ? France Bleu explique.
Une « boîte à outils » pour réguler les meublés de tourisme
« Toutes les communes pourront mettre en place des quotas de meublés touristiques, désigner des zones réservées à la construction de résidences principales ou encore abaisser le nombre maximum de jours de location touristique des résidences principales entre 120 et 90 jours, entre autres mesures », saluent les deux députés qui ont présenté le texte de loi. Les plateformes comme Airbnb et Abritel, qui se sont développées ces dernières années, sont particulièrement ciblées par le législateur.
L’idée générale du texte est de limiter les avantages fiscaux accordés à certains propriétaires d’hébergements touristiques et de faciliter la tâche des collectivités locales qui tentent de réguler les choses chez elles. Iñaki Echaniz et Annaïg Le Meur parlent « donner aux maires une véritable boîte à outils pour encadrer efficacement les meublés de tourisme, dont le développement est parfois devenu incontrôlable, et encourager l’habitat permanent. » Toutes les communes peuvent en profiter « peu importe si elles se trouvent ou non dans un territoire tendu », clarifié Annaïg Le Meur chez France Bleu Breizh Izel.
Des avantages fiscaux revus à la baisse
Après les débats tenus à l’Assemblée, au Sénat et en commission mixte (sept députés et sept sénateurs), la « niche fiscale » associée aux meublés de tourisme reste en vigueur, mais il a été réduit. Jusqu’à présent, il était bien plus avantageux de louer un meublé de tourisme qu’un logement traditionnel. Avec cette loi, les règles changent un peu.
Actuellement, selon le confort du logement, le taux de réduction pour les locations touristiques peut varier de 50 à 71 %. Avec l’article 3 de la loi, les règles sont plus harmonisées d’un logement à l’autre. Pour les locataires d’hébergements touristiques classés (c’est-à-dire ceux qui disposent d’équipements de confort spécifiques) et de chambres d’hôtes, la réduction d’impôt sera de 50 %. Cet avantage sera limité aux loueurs dont les revenus ne dépassent pas 77 700 euros. Pour les propriétaires de meublés de tourisme, il y aura une réduction de 30% jusqu’à 15 000 euros de revenus.
Annaïg Le Meur et Iñaki Echaniz comptent sur le projet de loi de finances pour se défendre « la nécessité d’aligner la fiscalité entre le long et le court terme en augmentant la réduction sur le loyer nu (NDLR, pour lequel la durée du bail est de trois ans minimum) ».
Un diagnostic énergétique obligatoire
Parmi les autres mesures du texte, l’article 1 prévoit d’obliger les propriétaires à procéder à une diagnostic de performance énergétique (DPE). Ce n’était pas le cas pour l’instant même si c’est indispensable pour un propriétaire qui loue à l’année. Autrement dit, jusqu’à présent, il y avait tout intérêt à louer un hébergement touristique, non seulement pour des raisons fiscales, mais aussi parce qu’il n’y avait aucune obligation de le rénover s’il s’agissait d’une passoire thermique.
Quotas et zones réservées aux résidences principales
D’un autre côté, les autorités locales devraient disposer de plus de latitude pour réglementer sur leur territoire. Ils pourront par exemple mettre en place plus facilement des quotas (comme c’est le cas à Saint Malo) Ou compensation (l’agglomération Pays Basque l’expérimente depuis mars 2023). Les communes pourront également réserver certaines zones pour des résidences principales et les inclure dans leur plan local d’urbanisme (dans les communes comptant plus de 20% de résidences secondaires ou dans les communes en zones tendues). Ils pourront également réduire de 120 à 90 jours par an la durée maximale pendant laquelle une résidence principale peut être louée à des touristes.
Enfin, les propriétaires de meublés de tourisme seraient contraints de déclarer officiellement aux communautés locales. Pour les défenseurs du projet de loi, le flou actuel empêche d’avoir une réelle visibilité sur l’offre de meublés touristiques.
La multinationale Airbnb a réagi quelques minutes après l’adoption du texte pour souligner qu’elle collabore « Nous travaillons déjà avec plus de 350 villes à travers la France sur le bon respect des règles locales, et nous souhaitons travailler avec davantage de communes pour mettre en œuvre des mesures proportionnées et efficaces, dans les domaines où les problèmes sont clairement identifiés. » Quant au volet fiscal prévu par la loi, Airbnb affirme « regretter l’ajout de nouvelles contraintes fiscales et administratives qui vont lourdement peser sur les familles françaises souhaitant louer occasionnellement leur logement. »