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L’interdiction de vente de voitures thermiques en 2035 peut-elle être repoussée ?

À compter du 1er janvier 2035, plus aucune voiture essence, diesel ou hybride ne sera vendue en Europe. Une décision adoptée depuis 2022 par le Parlement et les États membres. Avant les élections européennes qui se tiendront le 9 juin, plusieurs partis ont exprimé leur opposition à cette mesure. C’est le cas des Républicains, du Rassemblement National ou encore de Reconquête en France. Avec eux, les partis populistes italiens aiment Fratelli d’Italia ou la Ligue, Vox en Espagne ou encore l’AFD en Allemagne refusent cette interdiction. Plusieurs membres du PPE, parti majoritaire sortant à l’origine de cette mesure, ont également exprimé un avis défavorable à l’image du candidat tête de liste des Républicains, François-Xavier Bellamy, qui a évoqué « une décision dramatique » au micro de Jean-Jacques Bourdin il y a deux semaines.

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 » Nous ne sommes pas contre les voitures électriques, mais cela ne nécessite pas une interdiction obligatoire des voitures thermiques. Il faut d’abord s’adapter », a justifié Aleksandar Nikolic, conseiller régional sur la liste du Rassemblement national lors d’une conférence organisée par la Plateforme automobile (PFA), principal syndicat du secteur, cette semaine. Une clause de révision est prévue pour 2026 avec tous les Etats membres faire le point sur l’objectif 2035.

Annulation peu probable

 » Personne ne pensait vraiment que cette clause serait activée, c’était plutôt pour calmer l’opposition au moment de voter la loi. S’il est activé, alors ce sera doux. Par exemple, reculer le délai de deux ans », précise Bernard Jullien, économiste spécialisé dans l’automobile. Le patron de Renault, Luca de Meo, n’était pas contre un report, estimant que« Au départ, nous aurions préféré un objectif 2040 pour nous laisser le temps de construire une chaîne de valeur capable de rivaliser avec les constructeurs chinois qui ont une génération d’avance », déclarait-il dans une interview à La Tribune il y a un an.

Néanmoins, Luca de Meo se dit prêt pour 2035, tout comme Vincent Salimon, directeur de BMW France : « nous vendons actuellement 25 % de nos voitures électriques, et l’interdiction n’est que dans 11 ans « .

Même son de cloche du côté du syndicat allemand IG Metall, pourtant opposé au départ à cette mesure.  » L’interdiction de 2035 n’est pas la bonne solution », a ajouté le principal syndicat automobile allemand IG Metall, « Il faut mettre fin au chaos des nouvelles directives. »

Plusieurs centaines de milliards en jeu

Et c’est une visibilité que réclament les constructeurs automobiles et la plupart des grands acteurs du secteur.

« Ce que je demande, c’est la stabilité ! » Arrêtez de changer les règles ou de suggérer qu’elles pourraient changer. », implorait Carlos Tavares, le directeur général de Stellantis, lors d’une visite d’usine à Metz il y a quelques semaines. Mais le dirigeant portugais s’est montré l’un des plus réticents à cette interdiction, exigeant la neutralité technologique et appelant Bruxelles à s’éloigner du dogmatisme. Mais aujourd’hui, les industriels ont mis tellement d’argent sur la table pour cette transition industrielle qu’aucun retour en arrière n’est possible.

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« J’ai lancé mon avion à pleine puissance sur la piste, il ne faut pas couper les réacteurs maintenant, sinon l’avion va tomber », a imaginé le directeur général de Stellantis.

« Rester longtemps avec les deux options – thermique et électrique – n’est pas tenable car cela entraîne un surcoût trop important dans la dispersion des volumes. » explique Bernard Jullien. Au total, environ 100 milliards d’investissements sont engagés en Europe pour la transition dans les 3 prochaines années, estime Luc Chatel, président de la PFA.

La clause 2026 pour obtenir davantage d’aides des Etats ?

 » La clause 2026 peut en revanche permettre d’obtenir davantage des Etats », anticipe Bernard Jullien, notamment les aides publiques à l’achat de véhicules électriques. Les membres de l’Union européenne ont des règles différentes, ce qui exaspère les fabricants et les consommateurs. Par exemple, l’Allemagne a supprimé du jour au lendemain cette aide à l’achat de véhicules électriques neufs, la France l’a orientée vers les véhicules les moins polluants et l’Italie a choisi de la concentrer sur les véhicules hybrides. et électrique, juste pour cette année.

Les discours populistes sur l’abandon de l’interdiction de 2035 servent plutôt à rassurer les consommateurs, alors même que le marché des véhicules électriques stagne en Europe. Depuis le début de l’année et après trois années de croissance fulgurante, la part des véhicules électriques reste stable en avril, à 11,9% par rapport à l’an dernier. Et reste bien en deçà des 14,6% de part de marché enregistrée sur l’ensemble de l’année 2023. En Italie, elle est même en baisse.

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Il faudra donc redoubler d’efforts pour adopter la voiture électrique et atteindre l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050. Au-delà de la date de 2035, d’autres mesures ont été avancées par les candidats européens, comme le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières étendu à automobiles ou encore des droits de douane plus élevés, notamment pour restreindre les véhicules en provenance de Chine, autre préoccupation majeure du secteur automobile actuel.