Et voilà que le sujet du port de l’abaya revient devant les tribunaux. Un an seulement après l’adoption d’une circulaire interdisant le port de la tenue traditionnelle musulmane dans les établissements scolaires, le Conseil d’Etat examine, lundi 9 septembre, en section du contentieux, plusieurs recours déposés contre la mesure.
Les syndicats La Voix lycéenne et Sud Éducation, ainsi que l’association Action droits des musulmans, demandent au juge d’annuler pour excès de pouvoir la note de service du 31 août 2023 interdisant le port de l’abaya mais aussi du qamis, portés par les garçons, dans les écoles, collèges et lycées publics.
Forte augmentation des signalements
La mesure avait été décidée par Gabriel Attal, qui venait d’être nommé ministre de l’Education nationale en juillet. Il succédait à Pap N’Diaye, que la droite et une partie de la majorité accusaient de tergiverser sur le sujet.
S’appuyant sur des remontées inquiétantes du terrain, le jeune ministre avait choisi la voie de la fermeté. Une note des services de l’État notait qu’au cours de l’année scolaire 2022-2023, 4 710 signalements d’atteintes à la laïcité avaient été enregistrés. Soit 120 % de plus qu’en 2021-2022. « Notre école est mise à l’épreuve »a affirmé Gabriel Attal, jeudi 24 août 2023, devant les recteurs d’académie, réunis à la Sorbonne. Face à ces « attaques » et à « tentatives de déstabilisation »a annoncé une réponse » ferme « .
Quelques dizaines de refus
Après l’envoi de la circulaire, la rentrée scolaire s’est finalement déroulée sans trop de difficultés. Environ 300 élèves se sont présentées en abaya et seules quelques dizaines n’ont pas accepté de l’enlever. Mais c’est devant les tribunaux, déjà, que des organisations de gauche ou musulmanes avaient entamé la riposte. Saisi à deux reprises en référé (urgent), le Conseil d’Etat n’avait cependant pas suivi les requérants.
Le juge administratif a noté que « le port de l’abaya et du qamis au sein des établissements scolaires, qui a donné lieu à une forte augmentation du nombre de signalements au cours de l’année scolaire 2022-2023, s’inscrit dans une logique d’affirmation religieuse, comme le montrent notamment les propos tenus lors des discussions engagées avec les étudiants ».
Il a donc estimé que le ministère n’avait pas « décrit de manière inexacte le port de l’abaya ou du qamis dans les établissements scolaires » comme un « Manifestation manifeste d’appartenance religieuse ».
Le ministre était fondé à réagir, mais l’interdiction est-elle excessivement attentatoire aux libertés ? Le tribunal a précisé que ce débat juridique n’était pas clos, l’affaire devait être jugée sur le fond. « Le Conseil d’État prendra une décision définitive ultérieurement, après une enquête approfondie », L’audience de ce lundi permettra ainsi d’entendre les arguments des requérants ainsi que les conclusions du rapporteur public.
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