Lina Khan, la femme qui fait trembler les Gafam
En quelques mois seulement, Lina Khan, 35 ans, est devenue une figure centrale de la politique américaine. Une « star » demandait des selfies – du jamais vu à la Federal Trade Commission (FTC), le « gendarme » américain de la concurrence. Silhouette frêle corrigée par une voix assurée, elle a révolutionné la lutte contre les monopoles en imposant une nouvelle lecture de la législation antitrust aux Etats-Unis, adaptée à l’ère numérique.
Grand critique des pratiques anticoncurrentielles des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), Mmoi Khan préside la FTC depuis 2021. De nos jours, elle est une invitée partout. Le 20 septembre, elle s’exprimait au Council on Foreign Relations – une première pour un groupe de réflexion spécialisé dans les affaires mondiales. Le 26 septembre, elle participe à l’émission du très provocateur Hasan Minhaj, sur YouTube. L’animateur a mis en scène une rivalité – hilarante – entre le jeune avocat et l’auguste ministre de la Justice, Merrick Garland, autour du privilège de poursuivre – et de démanteler – Google. « Ça ne s’est pas vraiment passé comme ça »corrigea patiemment l’intéressé.
Dans « 60 Minutes » (CBS), l’une des émissions les plus respectées de la télévision américaine, Mmoi Khan a marqué des points le 22 septembre en présentant un inhalateur, un de ces appareils contre l’asthme vendus à moins de 10 dollars (moins de 9,20 euros) en Europe mais à plusieurs centaines de dollars aux Etats-Unis. Sous sa direction, la FTC a montré que les fabricants continuaient à abuser de leurs brevets – même si le dispositif avait été inventé dans les années 1950 –, ce qui leur permettait de bloquer la concurrence des génériques. En juin, trois fabricants ont accepté de baisser leurs prix à 35 dollars. « Il est inquiétant de penser que les sociétés pharmaceutiques ont pu se permettre de gonfler aussi longtemps le prix de ces médicaments essentiels. »a souligné le manager.
A chaque apparition, la jeune femme attaque avec pédagogie. Elle explique la mission de la FTC, l’agence créée en 1914 pour renforcer la lutte contre les monopoles des barons de l’acier, du pétrole et des chemins de fer. Ayant une opinion mal informée de la structure de l’économie, elle décrit une consolidation devenue néfaste dans certains secteurs comme l’agroalimentaire, l’aviation, les télécommunications ou l’industrie pharmaceutique. Les consommateurs sont à la merci des pénuries, comme en 2022 dans le cas du lait infantile, en raison de« une seule contamination dans une seule usine »» dit-elle, frustrée par le faible nombre de fournisseurs d’accès Internet et leurs prix élevés – « le système est biaisé (« truqué ») à leur détriment ». Pour elle, la concentration est la principale raison du maintien des prix élevés après la pandémie de Covid-19. Un phénomène que les progressistes appellent l’aviditéinflation provoquée par l’appétit des conglomérats.
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