« Les Oubliés du Delta » est un téléfilm policier sur fond historique : le sort tragique de milliers d’ouvriers vietnamiens, réquisitionnés de force pour développer la riziculture en Camargue dans les années 1940.
Sur un chantier au cœur de la Camargue, des ouvriers font une découverte macabre : des dizaines d’ossements humains vieux de plus de 70 ans. L’enquête menée par les commissaires Marianne Prévost et Lola Hardon révèle que les corps, tous d’origine asiatique sauf un, correspondent à des ouvriers indochinois exploités dans la région à l’époque coloniale. Le téléfilm policier Les oubliés du Deltaavec Isabelle Gélinas et Raphaëlle Rousseau, débute sur cette intrigue qui mêle fiction policière et sombre réalité historique.
Car dans le delta du Rhône, des milliers de Vietnamiens furent effectivement enrôlés de force à partir de 1939 pour remplacer les Français partis au front dans les champs. Environ 20 000 de ces « ouvriers-soldats », surnommés les « Công Binh », seront amenés en France, parqués dans des camps au centre du pays ou dans les environs de Marseille, avant d’être envoyés par le régime de Vichy dans des usines d’armement. , chantiers de construction, salines ou forêts, dans des conditions déplorables.
« L’enfer » pour des milliers d’Indochinois
Méprisés en France, considérés comme des traîtres ou des collaborateurs au Vietnam, ces oubliés de l’histoire seront près de 2000 travaillant en Camargue à cultiver du riz destiné à l’alimentation du bétail. Réalisateur d’un documentaire sur le sujet, Lam Lê explique : « A l’époque la Camargue était un enfer, peuplée de moustiques, et le riz qu’on y cultivait était immangeable, réservé aux animaux. Ce sont eux qui ont créé les rizières de Camargue » . Dans cette région insalubre, les conditions de vie et de travail des Công Binh étaient épouvantables, nombre d’entre eux succombant à la maladie, à l’épuisement et même aux mauvais traitements.
Certains de ces travailleurs forcés sont restés après la guerre, s’intégrant du mieux qu’ils ont pu, mais leur histoire a été largement oubliée. Les cadavres exhumés au début du téléfilm Les oubliés du Delta rappeler ce passé enfoui. Pour la productrice Delphine Wautier, « il ne s’agit pas d’une simple fiction policière, un autre thriller, mais d’une intrigue contemporaine, forte romantique et documentée, prenant ses racines dans une page de l’histoire camarguaise, la culture du riz par les ouvriers indochinois ».
«Il y a une forme de honte» dans la région selon Isabelle Gélinas
Les oubliés du Delta a également dû composer avec le poids de ce passé dans la région. » Au moment du tournage, il y avait des endroits où on ne pouvait pas filmer pour raconter cette histoire. Ce n’est pas à la gloire des riziculteurs camarguais. Même pour certains descendants ce n’est pas évident, il y a une forme de honte. Cela reflète sur une génération qui n’a rien fait mais qui porte quand même ça», a ajouté Isabelle Gélinas dans Télé Loisirs.
Dans la fiction Les oubliés du Deltale corps d’une femme européenne retrouvé parmi eux soulève d’autres questions sur les tragédies et les secrets indicibles de cette époque. Les oubliés du Deltaqui révèle cette part sombre et méconnue de l’histoire coloniale, a été programmée sur France 3 le vendredi 25 octobre 2024.