Annette Zelman (1921-1942) a vécu le destin tragique des Juifs français exterminés à Auschwitz. En la montrant au début en train de partir vers les camps de la mort, le téléfilm réalisé par Philippe Le Guay ne laisse aucun suspense. Mais il donne un nouveau visage à une figure évoquée par Simone de Beauvoir dans ses Mémoires, par Boris Vian et Patrick Modiano, ainsi que par Henri Amouroux dans son livre La vie en France sous l’Occupation.
D’après les travaux de l’historien Laurent Joly, Dénoncer les Juifs sous l’Occupation (CNRS Éditions), ce drame historique convainc par la rigueur avec laquelle il reconstitue une époque et l’émotion dégagée par deux jeunes comédiens brillants. La lumineuse Ilona Bachelier joue son rôle avec finesse et Vassili Schneider, qui incarne son amant Jean Jausion, trouve le ton juste d’une retenue frémissante.
Cruauté glaciale
Une jeune fille juive d’origine polonaise étudiante aux Beaux-Arts, un fils de bonne famille artiste et aspirant écrivain, l’histoire vraie de ces amants prend des accents shakespeariens quand elle se heurte à la haine ordinaire. Une scène terrifiante montre Annette confrontée à l’antisémitisme délirant de l’acteur Robert Le Vigan, collaborateur enragé et parrain de l’homme qu’elle aime. Le pire reste à venir quand, avec une cruauté glaciale, les parents de Jean, incarnés par Laurent Lucas et Julie Gayet, marquent toute la distance qui les sépare de la jeune fille : ils finiront par la dénoncer aux autorités allemandes.
L’histoire d’Annette Zelman permet également de redécouvrir Jean Jausion, auteur d’un seul roman, Un homme marche dans la ville (Gallimard, 1945). Raconté du point de vue de la sœur cadette d’Annette, le film offre une perspective passionnante lorsque celle-ci, Michèle Kersz, 94 ans, apparaît à l’écran face à Louise Legendre, la jeune comédienne qui l’interprète, dans un fascinant jeu de miroirs. En lui racontant la fin de l’histoire en quelques mots, elle transmet en direct, sous nos yeux, un souvenir tragique.
« L’Histoire d’Annette Zelman », jeudi 8 août à 20h50 sur France 5.
