l’Euro de football et l’Europe des nations

Le Championnat d’Europe de football, vu de France, a dès ses débuts une dimension politique indéniable. Elle commence en septembre 1958, au moment même où émerge la Ve République. Puis la première phase finale a lieu en France, au début de la république gaullienne. Lors de cette épreuve remportée par l’URSS, les trois premières équipes venaient des pays communistes. La France, 4e, représente le camp occidental vaincu. Les Italiens n’ont pas participé à la compétition. Quant à l’Espagne, gouvernée par le dictateur Franco, elle a été disqualifiée pour avoir refusé de disputer les éliminatoires contre l’URSS.

Toujours en France en 1984, le concours a lieu alors que François Mitterrand est à l’Elysée. L’équipe dirigée par Platini, Giresse et Tigana remporte le tournoi. Pour certains, c’est le signe que la France est forte dans le football quand la gauche est au pouvoir. La même idée sera reprise en 1998 avec la victoire à la Coupe du monde, alors que Lionel Jospin est Premier ministre. La victoire de 2018 remet en question ce mythe…

Mais la véritable influence politique du tournoi était visible en 1992. Le Danemark, qui avait voté contre l’Europe par référendum en 1991, a été sélectionné pour la compétition après l’éclatement de la Yougoslavie qui avait sa place. Et les Danois éliminent la France, pourtant favorite, puis remportent le tournoi. Les journaux célèbrent cette victoire en Europe. Un an plus tard, le Danemark a cette fois voté pour l’Europe, convaincu qu’il sait désormais contrôler son avenir dans les institutions.

Nul doute que le tournoi qui s’est ouvert hier à Munich finira par refléter la montée du populisme dans l’actualité. L’Europe du football est à l’image de l’Europe des nations.