TuUn débat télévisé ne permet pas, à lui seul, de remporter une élection présidentielle. Mais il agit comme un ferment intense. La confrontation entre Donald Trump et Kamala Harris, le 10 septembre sur ABC, était d’autant plus attendue que la candidate démocrate répond au défi d’une campagne très courte, après le retrait de Joe Biden. Elle a peu de temps pour se (re)présenter au grand public, s’affirmer, paraître crédible. De ce point de vue, le débat a été une réussite totale, pleine de piques savoureuses, marquée par les mimiques ravageuses de la vice-présidente, entre mépris amusé et irritation maîtrisée.
Mais la préparation professionnelle de Kamala Harris et son aisance inattendue dans l’exercice ne doivent pas occulter l’autre surprise de cet événement télévisé : l’échec de Donald Trump. Sa piètre performance formelle, mais surtout stratégique. L’ancien président a manqué de discipline, tombant dans les pièges tendus par son adversaire. Il n’a pas su tirer parti de son principal atout, illustré par les sondages : les enjeux économiques.
Même si l’inflation est retombée à 2,5 % sur un an fin août, Donald Trump aurait pu se concentrer sur la crise immobilière, le coût des produits de première nécessité, en mettant en avant la hausse spectaculaire des prix en quatre ans. Une hausse qu’il serait malhonnête d’attribuer exclusivement à l’administration Biden, mais qui constitue un argument à portée de main pour le candidat républicain, afin de nourrir une nostalgie, celle d’un quotidien plus facile. Sa plus grande familiarité avec la voiturette de golf – son sport favori – qu’avec celui de la ménagère le prive de sensibilité sur ce sujet.
Ses pires défauts
S’il avait choisi cet angle d’attaque, Donald Trump aurait pu écarter Kamala Harris sur le bilan de l’administration sortante. Au lieu de cela, il l’a laissée apparaître comme une candidate du changement, comparée à lui, à ses méthodes et à ses discours incendiaires. Le milliardaire a répété les bêtises sur les migrants haïtiens de l’Ohio qui mangeraient des animaux de compagnie. Il a digressé sur la prise d’assaut du Capitole le 6 janvier 2021, défendant l’indéfendable. Bref, il a rappelé aux 67 millions de spectateurs qui il était, au pire.
Mais l’absence la plus étonnante dans le discours du candidat républicain a été toute ouverture au centre, qu’il a laissé aux stratèges démocrates. A aucun moment l’ancien président n’a pensé à s’adresser aux électeurs indécis, dubitatifs à l’égard de Kamala Harris, ou aux conservateurs modérés, tendus, voire hostiles, à l’idée de le soutenir.
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