L’État peut-il vraiment réquisitionner votre épargne pour rembourser vos dettes ?
Et si vos économies prévues pour la maison de vos rêves, vos futures vacances ou les études de vos enfants étaient simplement réquisitionnées pour combler les trous des caisses de l’Etat ? Les internautes affirment qu’en situation de crise, il serait effectivement possible pour le gouvernement de mettre la main sur l’épargne des Français. On évoque notamment le remboursement de la dette actuelle qui pèse sur le pays.
Certains s’appuient sur un article de Média en 4-4-2, qui laisse entendre que les politiques ont évoqué « la nécessité pour les citoyens de participer à la relance de la France, y compris à travers leur épargne ». Et d’affirmer : « L’État dispose de plusieurs outils juridiques pour drainer l’épargne des Français. » Qu’est-ce que c’est vraiment ?
FAUX
L’article aborde d’abord un tout autre point qu’une situation de crise. « L’Avis au tiers titulaire et la Saisie administrative au tiers titulaire permettent la saisie directe des livrets ou des contrats d’assurance vie en cas de non-paiement de taxes ou d’amendes », est-il écrit. Il ne s’agit donc pas d’une situation de crise.
Mais de fait, en cas d’impayés dus à l’administration, il est possible de demander le retrait des sommes dues auprès de votre banque. Il peut s’agir d’amendes, de taxes ou de factures de cantine et de frais d’hôpital. Vous serez dans tous les cas informé si une telle procédure est mise en place, avec possibilité de recours.
Un éventuel blocage de l’épargne en cas d’instabilité financière
Sauf dans le cas où vous avez une dette envers l’État, celui-ci ne peut en aucun cas prélever de l’argent sur votre épargne. D’ailleurs, aucune autre institution ne le peut. « Il existe une confusion entre bloquer des fonds et saisir ces fonds. Et il y a une confusion entre crise politique et crise bancaire », explique Laurent Denis, avocat bancaire.
En effet, il est possible qu’en situation d’instabilité financière, votre compte épargne et votre assurance vie soient bloqués. Cela signifie que vous ne pourrez plus retirer votre argent, ni même payer. Une fois le blocage levé, vous récupéreriez toutes vos économies.
Comme l’évoque le Média dans 4-4-2, c’est le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) et la Banque de France qui prennent cette décision. Deux organisations « parfaitement imperméables au pouvoir politique ».
« Avec une telle démarche, nous souhaitons éviter une défaillance du système bancaire », explique Laurent Denis. Car la mission de ces deux institutions est notamment de « préserver la stabilité financière » du pays. Et « la dette n’est pas nécessairement une menace pour la stabilité financière », estime l’avocat du secteur bancaire.
Des impôts pour rembourser la dette
Le cadre juridique entourant une telle décision, bien que défini notamment par la loi Sapin 2, et plus largement par le code monétaire et financier, est flou. Et pour cause, « nous n’avons jamais connu ce type de crise » en France, souligne Me Denis.
Une condition sur la durée de ce blocage est toujours imposée sur l’assurance vie. « Ce pouvoir peut être exercé temporairement pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois », précise Amaury Demarta, conseiller en gestion de patrimoine chez Millenium gestion privée.
Une crise qui nécessiterait le recours à ce pouvoir ne devrait, en principe, pas survenir si tôt. Déjà parce qu’un suivi constant et minutieux est effectué. Mais aussi parce que « les banques européennes n’ont jamais eu des situations financières aussi solides, même avant la crise de 2008 », explique Amaury Demarta. Ils se portent très bien. »
Notre dossier Fake Off
Pour rembourser la dette publique, l’État dispose de bien d’autres leviers pour faire appel aux Français. « S’il a besoin d’argent, il le taxera », souligne le conseiller en gestion de patrimoine. Et de citer notamment « l’impôt sur la fortune », fréquemment remis sur la table. Bien entendu, l’instauration d’un nouvel impôt ou l’augmentation des impôts devaient faire l’objet d’un texte soumis aux parlementaires.