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L’espoir de revoir mes parents

A l’approche des 80 ans du Débarquement, notre série « Les Enfants de la Libération » vous emmène à Appoigny avec l’histoire d’Eddy. Elle était cachée avec son frère, dans cette petite ville de l’Yonne, car ils étaient tous deux juifs. Elle attend alors le retour de ses parents, arrêtés et déportés en 1942.

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Eddy Saragoussi et sa famille vivaient à Paris en 1942, lorsqu’ils furent arrêtés et conduits à la mairie du 18e arrondissement. Le policier qui a procédé à l’arrestation est alors venu chercher la voisine de la famille Saragoussi, Elisa Caron, affirmant qu’il y avait possibilité de sauver les enfants. « Elle est venue nous chercher sans réfléchir et elle a téléphoné à Mme Guyollot, qui avait promis à ma mère qu’elle nous conduirait chez eux s’il arrivait quelque chose. »explique Eddy.

Lucienne et Raymond Guyollot sont le couple qui a accueilli les enfants Saragoussi à Appoigny. « Mon frère a crié pendant tout le voyageexplique Eddy. Il demandait ses parents et puis nous sommes arrivés, il y avait des animaux donc c’était une distraction. » Les enfants ont fini par retrouver un semblant de vie normale en aidant le couple Guyollot à tenir le restaurant. « J’ai adoré servir au comptoirdit Eddy. J’ai servi des ballons rouges et j’ai reçu des pourboires. Et ce qui m’a vraiment déplu, c’est qu’en 44, la boule rouge a augmenté, donc mon pourboire a diminué. »

Un jour, Eddy et son frère sont dénoncés par quelqu’un d’Appoigny. Deux militaires allemands viennent à l’hôtel interroger Madame Guyollot. « Elle lui a dit que les enfants n’étaient pas juifsexplique Eddy. Elle a menti, même si entre-temps nous avions été baptisés, mon frère servait à la messe et je faisais mes prières, donc c’était parfait. Finalement, un des Allemands lui dit : « Écoute, si pour mes enfants, quelqu’un les hébergeait, je serais si heureux. Puis ils sont partis alors qu’ils auraient pu nous arrêter. »

Après la Libération, Eddy et son frère attendaient avec beaucoup d’espoir le retour de leurs parents. « Il y avait de la peur aussi, car j’ai fait un cauchemar pendant des années, où mon père revenait et je devais faire un choix entre partir avec lui et rester chez Madame Guyollot.dit Eddy. Ils avaient perdu leur fils, donc le fait que mon père revienne posait une question de loyauté envers elle et son mari. »

Les actes de décès de ses parents arrivent, 10 ans après la Libération. On a déclaré qu’ils étaient morts à Paris. « À ce moment-là, je me suis rebellé et j’ai agi auprès de la mairie.dit Eddy. Pour ma mère, je ne le savais pas, mais mon père est mort à Auschwitz. Il était avec d’autres Grecs qui avaient décidé de s’enfuir en janvier 1945 et au dernier moment il tomba malade et il dit : « Écoutez, les Russes arrivent, je ne vais pas risquer de ne plus revoir mes enfants ». Les autres sont revenus, mais lui non. Il a dû faire partie des marches forcées, il n’y a absolument aucune tombe. »

Les parents d’Eddy s’appelaient Bitty et Allègre Saragoussi. Ils sont déportés par le convoi 44 qui quitte le camp de Drancy le 9 novembre 1942, à destination du camp d’Auschwitz. Leur nom est inscrit sur le mur du mémorial de la Shoah à Paris où figurent les noms des 75 568 juifs déportés de France. « Au début, je n’étais pas très enthousiaste à ce sujet., explique Eddy. Mon frère a insisté et il s’est avéré qu’il avait raison.

En 1974, Israël institue la médaille des Justes et les enfants de Saragoussi en font la demande pour les époux Guyollot, reconnus Justes parmi les Nations, les Nations, le 11 juin 1979. Elisa Caron, la voisine venue récupérer la médaille Les enfants du commissariat ont également été décorés à titre posthume de la Médaille des Justes le 11 octobre 2001.

Eddy a également fait des recherches pour trouver le nom du policier qui leur a sauvé la vie. « Au vu de tout ce qui se dit sur les policiers qui nous ont arrêtés, je pense que pour ses enfants et pour ses descendants, il aurait été bien qu’ils sachent qu’il n’avait pas agi ainsi. »


« L’espoir de revoir mes parents », épisode réalisé par Samuel Aslanoff. « Les enfants de la Libération », podcast original franceinfo en partenariat avec la Mission Libération, est à retrouver sur franceinfo.fr, l’application Radio France et plusieurs autres plateformes comme les podcasts Apple, Podcast Addict, Spotify, ou encore Deezer.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.

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