TRIBUNE
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Pour la journaliste Hélène Devynck, les images diffusées lors des audiences sont la preuve irréfutable de ce qui a « détruit de l’intérieur » Gisèle Pelicot mais l’a aussi sauvée. Et des questions : est-ce la victime ou le violeur qui perd sa dignité ?
Avertissement
« Libération » couvre le procès pour viol de Mazan jusqu’à fin 2024. Ces articles, dont cette chronique, décrivent des descriptions de violences sexuelles et peuvent choquer.
« C’est bon, nous en avons assez vu. On arrête ! On arrête ! » Il y a de l’urgence dans la voix de Roger Arata, le président du tribunal correctionnel d’Avignon. Le commis appuie sur la touche « esc » de son ordinateur. La vidéo s’arrête. Cela dure cinq minutes. Nous avons vu les deux premiers. Comme après chaque projection, un épais silence fige la salle d’audience.
L’homme qui vient de disparaître de l’écran, Grégory S. est aux manettes. Il n’a pas regardé. Il avait longuement expliqué le sentiment de peur que lui inspirait Dominique Pelicot. Il se sentait comme son instrument. Un instrument trompé, explique-t-il. Il répète qu’il avait peur de lui. « Avez-vous éjaculé de peur? » » demande l’avocat de Gisèle Pelicot, Antoine Camus. Le sourire enthousiaste de Grégory S. sur l’image n’a pas suscité une grande peur. Ces vidéos sont d’implacables sérums de vérité, révélant les couches de mensonges tentées par les accusés.
Sans les vidéos, personne ne l’aurait su, personne n’y aurait cru. Ce sont des preuves matérielles irréfutables qui font presque toujours défaut dans les procès pour viol. Les images retrouvées sur l’ordinateur de Dominique Pelicot sont au cœur du procès. Sans eux, les 51 hommes jugés à Avignon n’auraient pas été identifiés. L’épreuve