Les syndicats et acteurs du théâtre public s’inquiètent d’une victoire du RN
Selon l’ancien directeur du Théâtre national de Strasbourg comme celui de l’Odéon-Théâtre de l’Europe, un gouvernement RN pourrait être synonyme de coupes budgétaires et d’ingérences « idéologiques ».
« C’est l’ensemble de la société qui pourrait être impacté et la culture par la même occasion. Les dangers sont multiples »assure le metteur en scène Stanislas Nordey, ancien directeur du Théâtre National de Strasbourg.
Plusieurs représentants du théâtre public interrogés par l’AFP s’appuient, pour expliquer leurs craintes, sur les propositions des candidats RN lors des précédentes élections – le programme officiel des élections européennes étant peu dit dans le domaine de la culture. Mais aussi sur la politique menée dans les premières communes passées aux mains du Front national (Orange, Toulon, Marignane). Ainsi que les exemples de l’Italie de Giorgia Meloni et de la Hongrie nationaliste de Viktor Orban.
Stanislas Nordey évoque le risque que le nouveau parti au pouvoir mette sous son contrôle idéologique les lieux de culture avec, craint-il, des gens « pas compétent ». En Italie, Giorgia Meloni « a placé son peuple à la tête des institutions culturelles ». De la « purger » exploité « sans foi ni loi »jure celui qui vit la moitié de l’année dans ce pays.
« La cible des coupes budgétaires »
Pour Stéphane Braunschweig, directeur sortant de l’Odéon-Théâtre de l’Europe, « ce qui est sûr c’est que la création sera la cible de coupes budgétaires » en cas de victoire du RN. « On voit mal un gouvernement RN, qui pense que les metteurs en scène de théâtre font partie des élites culturelles de gauche, aller soutenir ces institutions »dit-il en rappelant que «Le spectacle vivant est déjà dans un état de délabrement».
« Si le RN arrivait au pouvoir, il déploierait une politique passéiste et conservatrice, centrée sur le patrimoine », « qui se retrancherait de la création »estime Vincent Roche-Lecca, coprésident du Syndicat national des scènes publiques (270 théâtres publics).
Autre risque selon eux : celui d’un glissement vers « une culture du folklore et du divertissement », comme le redoute le réalisateur Mohamed El Khatib, programmé cette année au Festival d’Avignon. Ce serait « un retour aux valeurs françaises réactionnaires, sur une base totalement déconnectée de la société et du progrès social. »
Peur de la « moralisation »
L’arrivée au pouvoir de l’extrême droite laisserait penser « une grande impossibilité de liberté en programmation »a estimé Chiara Breci, co-déléguée générale du Syndicat national des arts du spectacle, présente à un rassemblement du monde du spectacle vivant contre les coupes budgétaires et contre le RN, jeudi, à Paris.
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« Nous avons une énorme peur de la moralisation des œuvres présentées, de ce que nous pouvons créer et soutenir », ajoute Vincent Roche-Lecca, citant également les cas de l’Italie et de la Hongrie. Plusieurs acteurs soulignent également le flou des déclarations des dirigeants d’extrême droite concernant le maintien du régime des intermittents du spectacle.