Les syndicats contre la casse du fret

Le fonctionnement est simple : « 50 camions = un train ». A deux pas du ministère des Transports, la banderole déployée lors du rassemblement organisé mardi par les cheminots CGT, l’Unsa, SUD rail et la CFDT rappelle l’aberration écologique en cours. Les manifestants et délégués syndicaux, reçus dans l’après-midi par Clément Beaune, craignent tous l’assassinat de Fret SNCF, filiale à 100% de l’opérateur ferroviaire, suite à l’enquête ouverte le 18 janvier par la Commission européenne sur les mesures de soutien à la maison mère. (dont l’annulation de 5,3 milliards d’euros de dette) qui ne respecterait pas les règles européennes.
Un plan de discontinuité
Pour le moment, tout est en suspens, le ministère repoussant sans cesse la réunion tripartite en présence de la direction de la SNCF et des syndicats. Mais la solution qui se dessine du côté du gouvernement suscite de sérieuses inquiétudes : un plan de discontinuité pourrait être mis en place, obligeant l’entreprise à renoncer à 20 à 30 % de ses contrats et à se reconstruire sous un autre nom. Inconcevable pour Laurent Chenevier, agent de maintenance et secrétaire du syndicat CGT au complexe ferroviaire de Perrigny-Gevrey : « La part modale du train dans le transport de marchandises a été divisée par deux depuis la libéralisation du fret en 2006, alors qu’on ne cesse de nous parler d’enjeux écologiques et industriels. » Sur ce site de Côte-d’Or, la situation s’est dégradée en 2011, lorsque le tri gravitaire (permettant la formation d’un grand nombre de trains de marchandises) a été remplacé par le tri à plat (réduisant la capacité de tri) : « On nous a donné des subventions pour démanteler les rails et non pour répondre aux besoins des entreprises ! La productivité a explosé car on demande aux agents de faire le travail de deux ! » dit son collègue Vincent Joville. « Or, nous sommes au carrefour de l’Est du pays, de la Méditerranée, du Nord, il manque 160 kilomètres de voies électrifiées pour rejoindre l’Ouest. On pourrait connecter tous les ports de France »ajoute Matthieu Kaboré, élu CGT au CSE.
A Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), la gare de triage a également été réduite de 500 à 50 agents. « Ce plan de continuité serait le coup de grâce, redoute Stéphane Lachèvre, élu SUD rail au CSE, nous perdrions des emplois et aussi nos réalisations telles que les accords sur le temps de travail. L’État peut bien contester l’enquête de la Commission européenne, mais il choisit de ne pas le faire. »
Un DJ perché sur le camion CGT remixe le reggaeton et les Spice Girls. De leur côté, Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, ou encore Karima Delli, eurodéputée EELV, présidente de la commission des transports au Parlement européen, sont venus apporter leur soutien. Thierry Nier, secrétaire général adjoint de la CGT, insiste : « Nous sommes dans un combat qui concerne tout le monde, comme celui des retraites. L’État français doit inciter La Poste et Amazon à utiliser le train, pour que le rail représente 25 % du transport de marchandises d’ici 2050. »
Grb2