Arnaud Lagardère a-t-il corrompu le Qatar, son premier actionnaire lorsqu’il était encore le puissant patron du groupe du même nom, propriétaire de médias influents (Paris-Match, Europe 1…), et le premier éditeur français Hachette ? C’est la question qui plane sur un dossier judiciaire sensible qui a valu à l’homme d’affaires et PDG de son groupe (temporairement interdit de gestion par la justice), propriété de Vivendi, d’être mis en examen le 29 avril par les juges d’instruction Virginie Tilmont et Marie-Catherine. Idiart pour « achat de voix », « abus de biens sociaux et abus de pouvoir » et « diffusion d’informations donnant des indications fausses ou trompeuses pour agir sur le cours d’un instrument financier, manipulation de marché ».
Il est soupçonné d’avoir obtenu, au printemps 2018, le vote de Qatar Holding LLC, filiale du fonds souverain Qatar Investment Authority (QIA) et alors actionnaire principal (13 % du capital et avec 19,5 % des droits de vote). à son groupe, en faveur de résolutions de la direction (donc les siennes), en échange d’une promesse faite aux Qataris : nommer Jamal Benomar, un diplomate anglo-marocain proche de Doha, au conseil de surveillance de Lagardère SCA pour représenter les intérêts de l’émirat.
Le fils de Jean-Luc Lagardère est mis en cause pour d’autres faits présumés. D’abord pour s’être immiscé dans l’élection du conseil de surveillance, censé être un contre-pouvoir à la direction, en participant à des négociations directes avec des responsables qatariens. Que » la loi (lui) interdit « , ont rappelé les juges d’instruction. Ensuite, pour avoir présenté publiquement M. Benomar aux actionnaires comme un prétendu membre » indépendant » du conseil de surveillance lors de sa cooptation, en septembre 2018, puis en 2019 lors d’une assemblée générale, au risque d’avoir porté préjudice aux actionnaires. Ce qui, là encore, est passible de sanctions pénales.
Des intermédiaires illustres
Documents judiciaires, y compris Le monde a pris conscience, révèlent que M. Lagardère n’est pas le seul à avoir joué un rôle, en coulisses, lors des négociations avec les Qataris. Des intermédiaires illustres pourraient ainsi se retrouver dans le viseur des magistrats pour avoir assisté l’homme d’affaires.
Parmi ces auxiliaires zélés, on retrouve l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy, ami de M. Lagardère et proche du Qatar ; l’ancien porte-parole, directeur des relations extérieures et membre du comité exécutif de Lagardère, Ramzi Khiroun ; le patron qatari du Paris-Saint-Germain et administrateur de QIA, Nasser Al-Khelaïfi ; et Pierre Leroy, bras droit et directeur général historique d’Arnaud Lagardère et mis en examen, le 10 avril, dans cette section pour « complicité d’achat de voix, abus de biens sociaux et abus de pouvoir ».
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