Les riches s’en sortent bien fiscalement

Depuis son arrivée au pouvoir en octobre 2018, le gouvernement de François Legault a adopté deux mesures fiscales qui profitent aux contribuables gagnant plus de 100 000 $ par année.
D’abord, en 2020, il y a eu la baisse du taux de la taxe scolaire, qui est basée sur l’évaluation foncière municipale. Comme les plus aisés possèdent une propriété beaucoup plus aisée que les personnes à revenu moyen, il était évident que les plus riches bénéficieraient inévitablement des réductions de taxes scolaires les plus importantes.
Cette baisse du compte de taxes scolaires vaut d’autant plus son pesant d’or qu’il s’agit d’une mesure fiscale récurrente qui se poursuivra année après année.
Représentant une baisse des taxes scolaires de l’ordre de 800 millions de dollars par année, l’entrée en vigueur du faible taux de taxe scolaire unique est l’une des mesures fiscales les plus régressives à avoir été adoptées par le gouvernement du Québec. La baisse est d’autant plus régressive qu’il y a 40 % des locataires au Québec, qui ont très peu de chance d’en profiter.
Lors de l’annonce en décembre 2018 du dépôt du projet de loi 3 visant à réduire le compte de taxes scolaires, le Bureau d’Enquête du Enregistrer a calculé que François Legault économiserait 3 305 $ par année sur sa facture de taxes scolaires.
Son ministre délégué à la Santé, le docteur Lionel Carmant, allait économiser 2 431 dollars par an. Vient ensuite le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, dont la facture annuelle de taxes scolaires diminuera de 2 159 $.
Eric Girard, le ministre des Finances et également parrain du projet de loi 3 (Loi instituant un taux unique de taxe scolaire), bénéficierait d’une réduction de taxes scolaires de 2 000 $ par année.
J’écrivais à l’époque que la baisse de la facture de taxes scolaires du premier ministre de 3 305 $ était 10 fois supérieure à la baisse moyenne (314 $) qu’obtiendraient les propriétaires d’une résidence de 270 000 $.
Les riches propriétaires de vastes domaines résidentiels et de luxueuses résidences économiseraient plus de 100 000 $ en taxes scolaires par année.
Pour être juste, le gouvernement Legault aurait dû plafonner le cadeau de la baisse des taxes scolaires.
La dernière baisse d’impôt
La deuxième mesure au bénéfice des contribuables gagnant 100 000 $ et plus est bien entendu la baisse d’impôt que vient d’annoncer le ministre des Finances, Éric Girard, dans le cadre de son budget 2023-2024. Le gouvernement réduit les deux premières tranches d’imposition de 1 point de pourcentage : la première tranche allant jusqu’à 49 275 $ voit son taux baisser à 14 % et la seconde passant de 49 276 $ à 98 540 $ baisse à un taux de 19 %.
Fidèle à la promesse électorale de François Legault, le ministre des Finances permet aux détenteurs de 100 000 $ et plus de bénéficier d’une baisse d’impôt récurrente annuelle de 814 $ par habitant aisé.
Plus précisément, les 508 857 contribuables gagnant plus de 98 540 $, soit 7,4 % de l’ensemble des contribuables, bénéficieront d’une réduction d’impôt de 407 millions de dollars, soit 25 % de la réduction totale de 1,65 milliard de dollars. qui seront accordés au cours du prochain exercice financier 2023-2024.
Pendant ce temps, les 2,22 millions de contribuables à 49 275 $ ou moins, soit près de la moitié (48,6 %) de tous les contribuables imposables, se partageront à peine 21 % de ladite baisse d’impôt. , soit 347,6 millions, ce qui équivaut à 156 $ par habitant pour les contribuables à revenu faible et modeste.
À partir d’un revenu de 50 000 $, le contribuable bénéficiera d’une réduction de 320 $. Et pour chaque tranche de revenu supplémentaire de 10 000 $, Québec ajoute 100 $ de réduction d’impôt, pour finalement plafonner la réduction à 814 $ à partir de 100 000 $.
De leur côté, les 2,3 millions de contribuables non imposables ne toucheront absolument rien puisqu’ils ne paient aucun impôt !
Avantages fiscaux
Les contribuables ayant un revenu de 100 000 $ ou plus profitent grandement de certaines mesures fiscales.
Considérez le traitement fiscal préférentiel accordé aux plus-values réalisées lors de la vente d’actifs tels que des actions, des parts de fonds communs de placement, des biens secondaires, etc. Seule la moitié des plus-values sont imposables, alors que nos salaires sont entièrement imposables.
Le gouvernement du Québec évalue à 2,16 milliards de dollars les économies d’impôt que réaliseront les contribuables en 2022 grâce à ce traitement fiscal privilégié accordé aux gains en capital.
Qui en profitera ? Selon les plus récentes statistiques fiscales (2019), quelque 80 % (soit 1,73 G$) de ladite économie d’impôt iront dans la poche des 100 000 $ et plus puisque ce sont eux qui monopolisent 80 % des plus-values.
Concernant le crédit d’impôt pour dividendes, sachez que 70 % des 373 millions de dollars accordés en 2022, soit 261 millions de dollars, iront dans les poches de 100 000 $ ou plus.
En ce qui a trait à la déduction accordée pour frais financiers et frais d’intérêts en vue de gagner des revenus de placement, 63 % des 263 millions de dollars (ou 166 millions de dollars) de ladite déduction sont également destinés aux plus fortunés.
Vous ne serez pas non plus surpris d’apprendre que 95 % des 89 millions de dollars de déductions accordées à l’achat d’actions accréditives se retrouvent à l’actif.
Autre avantage fiscal bien exploité par nos « riches » : la déduction pour cotisation REER. Exemple : selon les statistiques fiscales 2019 (la plus récente publication), près de la moitié des déductions totales accordées (48,6 %) ont été attribuées à 384 200 contribuables de 100 000 $ et plus, soit 5,6 % de l’ensemble des contribuables québécois. Économies d’impôt réalisées grâce à ces actifs mis en gage : 1 milliard de dollars pour les déductions et 1,95 milliard de dollars pour la non-imposition des revenus de placement des REER.
Notez que ces avantages fiscaux (avec quelques variantes) dont bénéficient les contribuables de 100 000 $ ou plus sont également offerts par le gouvernement fédéral.
Oui ! les gens qui gagnent 100 000 $ ou plus paient beaucoup d’impôts. Mais convenons qu’ils ont encore la chance de réduire substantiellement leur facture fiscale.
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