les orthoptistes ouvrent le champ visuel

Le champ des compétences des orthoptistes est devenu très large, mais reste méconnu. Ils sont pourtant de plus en plus nombreux à travailler aux côtés des ophtalmologues ou bien seuls dans leur propre cabinet (12 en Loir-et-Cher). C’est le cas de Malvina Beltrami qui s’est installée à la maison de santé de Contres il y a quelques semaines. L’orthoptiste dépiste, rééduque, réadapte et explore la fonction visuelle, du nourrisson aux personnes âgées. « Nous sommes le métier de la vision fonctionnelle, c’est-à-dire comment vous utilisez vos yeux. Nous n’avons pas besoin des mêmes capacités qu’il y a cent ans, nos yeux sont désormais ultra-sollicités par les écrans », explique Malvina Beltrami. L’orthoptiste rappelle que la position optimale, le coude à 90° et l’écran à 40 cm est très peu respectée.

« On reste très peu connus et les patients qui nous sont envoyés par l’ophtalmologue ou le médecin généraliste se demandent souvent ce qu’ils viennent faire là, confirme Marie Guilbaud, déléguée régionale du Syndicat national autonome des orthoptistes, exerçant à Tours. Pourtant notre champ d’intervention est très large. » Les orthoptistes peuvent notamment se spécialiser, c’est le cas de Malvina qui est spécialiste de la paralysie oculomotrice ; elle a écrit des articles scientifiques sur le sujet et dispensé des cours à la faculté de Tours, Caen et Paris. « C’est relié à la neurologie, il s’agit du dysfonctionnement d’un nerf qui engendre le strabisme. Les patients voient double mais c’est lié à un problème neurologique suite à un AVC, certaines maladies dégénératives comme la sclérose en plaques, des maladies inflammatoires telles la maladie de Horton, des accidents et traumatismes, comme le coup du lapin en voiture. » Pour y remédier, il faut poser des prismes sur les lunettes qui permettent de ne plus voir double. Il s’agit d’un équipement personnalisé, qui doit être testé avec les patients. « C’est magique pour les patients car voir double est très invalidant. Chez les personnes âgées, c’est une cause de chute. »

« Un travail autour des troubles du neurodéveloppement pour les enfants »

Avec les personnes âgées, l’orthoptiste peut aussi stimuler les basses visions. « C’est compliqué à comprendre pour l’entourage car il y a des trous dans le champ visuel. Il faut leur apprendre à utiliser à un instant T ce qu’ils ont de vision. » Avec un champ visuel de Goldman, l’orthoptiste déplace une lumière pour trouver les zones qui sont encore performantes. Autre partie de son travail, la rééducation post AVC, afin d’aider les patients à récupérer des gestes que l’on fait par réflexe. « L’orthoptiste a doit investir dans du matériel, c’est pour cela que nous avons besoin d’aides à l’installation de l’agence régionale de santé », complète Marie Guilbaud.

« Sur le plan de la rééducation, nous travaillons aussi les troubles neurovisuels, de la vision jusqu’aux processus cognitifs. La couleur, le mouvement sont traités dans des espaces différents du cerveau, il faut ensuite reconstituer la scène visuelle. Les yeux sont déjà une partie du cerveau. » Melvina Beltrami travaille par exemple sur les troubles dys, encore mal connus. « La lecture est un acte énergivore pour ces enfants. Si l’on peut faire en sorte que les déplacements des yeux, le repérage, la mémoire visuelle deviennent moins énergivores, l’enfant peut davantage se consacrer à la compréhension. Les tests permettent de séparer la partie motrice de la partie cognitive et on rééduque les deux. »

Pour tous les troubles dys, l’enfant compense énormément. « Il nous faut évaluer si cette compensation est efficace ou pas, pour soit lui donner une autre méthode, soit perfectionner la sienne. » L’orthoptiste dispose dans son cabinet d’un espace dédié aux enfants où elle les aide dans leur rééducation, parfois avec des outils simples comme le jeu des 7 erreurs, une bataille navale, afin de travailler d’autres mouvements du regard. Les orthoptistes sont donc amenés à travailler en coordination avec d’autres professionnels de santé, et pas uniquement les ophtalmologues.

Avant-titre