Donald Trump s’est montré confiant mardi, peu après la fin de sa confrontation télévisée avec sa rivale démocrate, Kamala Harris. « C’était mon meilleur débat », a-t-il même déclaré. Comme à son habitude, l’ancien président n’a pas manqué de distiller quelques fake news pour le moins grossières. La principale ? Selon le républicain, des migrants mangeraient « des chats et des chiens » dans une ville de l’Ohio.
« À Springfield, ils mangent les chiens, ils mangent les chats, ils mangent les animaux de compagnie des gens qui vivent là. C’est ce qui se passe dans notre pays, et c’est une honte », a-t-il déclaré. Une déclaration qui a immédiatement provoqué rires et consternation chez son adversaire démocrate.
Durant la campagne, l’équipe de Donald Trump avait déjà relayé cette même rumeur raciste. Le 9 septembre, le colistier du candidat républicain, JD Vance, avait publiquement soutenu cette idée. « Des rapports montrent que des animaux de compagnie ont été enlevés et mangés par des personnes qui ne devraient pas être dans ce pays », a-t-il assuré, pointant du doigt « les migrants haïtiens illégaux » qui « sèment le chaos dans toute la ville de Springfield ».
La vidéo a depuis été partagée par de nombreux partisans de Donald Trump. Parmi eux, le patron de la plateforme X Elon Musk. Jouant sur l’humour, le milliardaire américain a publié une photo de la série « Les Simpson », dont la famille est censée vivre dans la ville fictive de Springfield. Dans ce post, on voit Bart et Lisa penchés sur la pierre tombale du chat de la famille, Snowball.
Mais d’où vient cette rumeur ? A l’origine, tout vient d’un post Facebook posté le 6 septembre par un utilisateur – aujourd’hui supprimé par Meta – pointe le site de fact-checking Politifact. « Springfield est une petite ville de l’Ohio. Il y a quatre ans, elle comptait 60 000 habitants. Sous (Kamala) Harris et (Joe) Biden, 20 000 immigrants haïtiens ont été envoyés dans la ville. Aujourd’hui, les canards et les animaux domestiques disparaissent », indique le post illustré d’une photo montrant un homme tenant une oie morte à la main dans la rue. Malgré sa suppression, des copies du célèbre message circulent toujours sur X.
Le message comprenait également une capture d’écran d’un groupe Facebook dans lequel quelqu’un écrivait que l’amie de la fille d’un voisin (!) avait trouvé un « chat pendu » à un arbre dans la cour « où vivaient des Haïtiens ». « J’ai entendu dire qu’ils faisaient la même chose à des chiens, des canards et des oies dans un parc local », a poursuivi le membre du groupe Facebook. Dans la foulée, des articles dans des tabloïds comme le Daily Mail ont cité des affirmations d’un habitant de Springfield, affirmant, sans preuve, que des migrants « décapitaient et mangeaient des canards dans le parc ». Contacté par Politifact, l’homme n’a pas répondu.
« Aucune preuve crédible », affirment les autorités locales
Face à l’écho grandissant de la rumeur, les autorités locales ont finalement réagi. Interrogée sur CBS News, Karen Graves, l’une des porte-paroles de la ville, a assuré qu' »il n’existe aucune preuve crédible » permettant d’affirmer que « des animaux de compagnie ont été blessés ou maltraités par des individus au sein de la communauté immigrée ».
De même, la police de Springfield a assuré aux médias locaux que les agents n’avaient reçu aucun rapport faisant état d’animaux tués ou mangés. De plus, la photo de l’homme marchant avec un oiseau mort dans la rue, partagée sur Facebook, aurait été prise à Columbus, à plus de 80 kilomètres de Springfield, selon un message publié sur Reddit.
« Une bande de femmes-chats »
La seule chose sur laquelle tout le monde s’accorde, c’est que les opportunités d’emploi à Springfield ont attiré des milliers d’Haïtiens depuis la pandémie, note le New York Times. La communauté a contribué à revitaliser la ville, selon les habitants, mais elle a aussi exercé une pression sur les écoles, les logements et les hôpitaux. Le journal évoque ensuite « le ressentiment de certains résidents », notamment après un accident mortel l’an dernier impliquant un conducteur immigré.
Pour d’autres, voir Donald Trump s’emparer de la cause animale n’est pas un hasard. Le candidat républicain chercherait à rallier les amoureux des animaux à sa cause, après les propos misogynes de son colistier JD Vance en 2021 sur les « dames à chats ». À l’époque, le républicain avait déploré que le pays soit dirigé par des démocrates et « une bande de dames à chats sans enfants, malheureuses dans leur propre vie et dans les choix qu’elles ont faits », faisant référence, entre autres, à Kamala Harris.
Une boutade sexiste aujourd’hui détournée par certains partisans de Kamala Harris, à l’image de la pop star Taylor Swift posant fièrement avec son animal de compagnie.