Les microARN sont au cœur d’une révolution médicale : voici pourquoi
La découverte des microARN, récompensée lundi par le prix Nobel de médecine, montre le fonctionnement complexe de nos gènes. Reste cependant à voir dans quelle mesure leurs connaissances pourront permettre le développement de traitements efficaces.
Hier, lundi 7 octobre, le prix Nobel de médecine et de physiologie a ouvert la cérémonie de remise des prix philanthropiques qui se tient cette semaine à Stockholm, en Suède. Deux biologistes américains ont été nominés pour leurs travaux remarquables en génétique, et plus particulièrement pour leur découverte des microARN. Comment est ce révolutionnaire? Explications.
Qu’est-ce qu’un microARN ?
Ce sont des morceaux d’ARN, par exemple acide ribonucléiqueacide ribonucléique. Petit rappel concernant l’ARN : présent dans toutes nos cellules, il est synthétisé par notre organisme à partir de gènes rassemblés dans notre ADN. Son rôle le plus connu est celui d’intermédiaire entre nos gènes et la production de myriadesmyriades des protéines qui font fonctionner notre organisme, pour lesquelles on parle d’ARN messager.
Les microARN font partie des ARN dits « non codants » : ils ne sont pas traduits en protéines. Mais cela ne veut pas dire qu’ils ne jouent aucun rôle ! La découverte des microARN dans les années 1990 par Victor Ambros et Gary Ruvkun, tous deux prix Nobel lundi, a montré que notre génome n’était pas une simple ligne droite entre ADNADNDe l’ARN puis des protéines.
« La découverte des microARN a apporté un niveau supplémentaire de complexité en révélant que des régions auparavant considérées comme non codantes jouent un rôle dans la régulation des gènes. », explique à l’AFP Benoît Ballester, chercheur à l’Inserm et spécialiste des génomes non codants. Ces microARN interfèrent avec le fonctionnement duARN messagerARN messager : « C’est comme un VelcroVelcro qui s’y attacherait et empêcherait sa traduction en protéines », précise M. Ballester. Conséquence : certains gènes sont peu ou pas exprimés – ils sont inhibés -, et d’autres plus nettement – ils sont intensifiés.
Cependant, il ne faut pas imaginer les microARN comme une forme de parasitesparasites interne qui gâcherait le bon fonctionnement de notre génome. Ils forment « partie intégrante de la régulation de notre génome, elle est aussi importante que la traduction classique d’un gène en protéine », souligne le spécialiste du génome non codant.
Pourquoi est-ce si intéressant ?
La découverte en 1993 du premier microARN par Victor Ambros n’a pas été immédiatement saluée comme une avancée majeure. Le chercheur était spécialiste de la biologie de certains vers, et c’était chez l’un d’eux (un ver rond d’un millimètre, appelé C. elegans)) qu’il a identifié l’existence de microARN. » Personne n’y a vraiment prêté attention », reconnaît Eric Miska à l’AFP, généticiengénéticien à l’Université de Cambridge, admettant qu’il a fallu des années pour voir autre chose » quelque chose de bizarre à propos des vers « .
C’est en 2000 que Gary Ruvkun a identifié l’existence de mécanismes similaires chez l’homme, ouvrant ainsi la voie à un tout nouveau domaine de recherche. génomiquegénomique. » Ce tout petit morceau d’ARN, si important pour le développement de ce petit ver, nous l’avons aussi, vous et moisouligne Eric Miska. Et il joue même un rôle essentiel, puisqu’il prévient l’apparition de tumeurstumeurs « .
Quels bénéfices concrets ?
Si la connaissance des microARN permet déjà de bien mieux comprendre notre génome, reste à savoir s’ils peuvent servir de levier d’action pour guérir les maladies. Depuis plusieurs années, plusieurs sociétés de biotechnologie misent sur cette avenue. Il s’agit d’un domaine particulièrement prometteur contre cancerscancersavec l’idée de mettre en place des traitements très ciblés. Cette recherche s’inscrit dans un contexte plus large où l’on comprend de mieux en mieux comment les tumeurs peuvent se développer différemment au niveau moléculaire d’un patient à l’autre.
Cependant, contre le cancer ou autre pathologiespathologiesil y a encore » rien qui soit proche d’un applicationapplication réel », a déclaré à la presse Gunilla Karlsson Hedestam, professeur à l’Institut Karolinska, lors de l’annonce du prix Nobel à Stockholm. Les microARN sont en effet une cible complexe à gérer du fait de leur instabilité. Mais, sans nécessairement en faire la base d’un médicament, de nombreux chercheurs espèrent d’abord les utiliser comme « biomarqueur », c’est-à-dire comme outil pour diagnosticdiagnostic ce qui permettrait, par exemple, d’identifier à quel type de cancer le patient est confronté.