Les maires kurdes à nouveau dans le viseur du pouvoir turc
La nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre et a continué à faire sensation. Lundi 3 juin, à peine deux mois après les élections municipales, le ministère turc de l’Intérieur a annoncé, dans la matinée, le limogeage de Mehmet Siddik Akis, le maire de gauche pro-kurde de Hakkari, une ville de l’extrême sud. est du pays, pour « appartenance à une organisation terroriste armée » et son remplacement par le gouverneur. L’édile a été placé en garde à vue.
Cette annonce a immédiatement suscité l’indignation de son parti, le Parti de l’égalité populaire et de la démocratie (DEM, ex-HDP), et de toute l’opposition. Des manifestations ont éclaté à Diyarbakir, Batman et Hilvan. Un appel à veillées devant les 78 mairies remportées par le DEM dans la région a également été lancé. A Hakkari, où les autorités ont interdit toute manifestation pour les dix prochains jours, plusieurs élus des villes environnantes ont appelé à une marche.
Le président du Parti républicain du peuple (CHP), Özgür Özel, a annoncé, sur son compte X, rejeter une décision qui « s’appuie sur une affaire vieille de dix ans et toujours en cours ». Une délégation de son parti composée de plusieurs députés s’est rendue sur place mardi. De son côté, Ahmet Davutoglu – ministre des Affaires étrangères puis Premier ministre entre 2014 et 2016 – a indiqué que « désigner un Kayyum (administrateur d’État) à la mairie de Hakkari est une pratique totalement antidémocratique ». Pour l’ancien lieutenant du président Recep Tayyip Erdogan, « Nous sortons tout juste des élections du 31 mars. Si le maire arrêté est coupable, pourquoi lui avoir permis de participer aux élections ? Mettre un Kayyumc’est hypothéquer la volonté des électeurs et encourager, sur le terrain, l’organisation terroriste.».
Arrêté, parfois jugé et condamné
Aux micros des journalistes, Gulistan Kilic Kocyigit, le vice-président du groupe parlementaire DEM, la troisième force du Parlement, a affirmé que « cette illégalité ne vise pas seulement les habitants de Hakkari ou le DEM, c’est une atteinte à la liberté de vote ». L’ancien coprésident du parti, élu député, Selahattin Demirtas, incarcéré depuis 2016, a été condamné en mai à quarante-deux ans de prison, notamment pour atteinte à l’unité de l’État.
Commentant le limogeage du maire de Hakkari, le journaliste Deniz Zeyrek du quotidien nationaliste d’opposition Sozcüje voulais ajouter que cette décision « cela signifie que des enquêtes sont actuellement menées contre tous les maires (DEM)et que progressivement des administrateurs seront nommés pour chacun d’eux ».
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