Les Jeux olympiques, une bouée de sauvetage pour la croissance

Un exercice difficile pour les équipes de l’Insee, qui ont publié mardi matin leur rapport de conjoncture d’été, censé apporter un éclairage sur l’évolution annuelle de l’économie française. S’appuyant sur des enquêtes auprès des ménages et des entreprises en amont des élections législatives, les économistes n’ont pas pu prendre en compte les conséquences du contexte politique inédit livré par le second tour des législatives. Habituellement, ces épisodes électoraux, comme la dissolution de 1997, conduisent plutôt à une bulle d’optimisme, qui provoque une petite augmentation de la confiance et de la consommation. « , a déclaré Dorian Roucher, chef du service de la conjoncture économique. Avant de préciser : «  On verra si le même phénomène se reproduit, mais il faut reconnaître que la situation actuelle est relativement différente des années passées. »

«  Du côté des entreprises, l’évolution des indices financiers traduit une augmentation de l’incertitude qui pourrait engendrer une forme d’attentisme, notamment en matière de décisions d’investissement. Son ampleur pourrait toutefois s’avérer plus importante que ce qui est supposé ici. « , précise la note. Lors des réunions du Cercle des économistes le week-end dernier à Aix-en-Provence, plusieurs chefs d’entreprise ont indiqué avoir gelé des projets d’acquisition, en attendant que le paysage économique s’éclaircisse.

Lire aussiComment les Jeux Olympiques marquent durablement l’histoire des pays qui les accueillent

Depuis le printemps, les entreprises semblent toutefois reprendre de la vigueur après avoir été durement touchées par le durcissement des conditions de financement, corollaire des hausses de taux décidées par les banques centrales. Ainsi, selon les enquêtes de conjoncture, en avril, les patrons se montrent légèrement moins pessimistes sur leurs intentions d’achat qu’en janvier, en grande partie grâce aux perspectives solides du côté de la demande. Certes, les marges des entreprises sont restées légèrement supérieures à celles de 2019, mais ce constat est hétérogène car il provient notamment de l’industrie, plus particulièrement de l’énergie « , note toutefois l’Insee.

Croissance annuelle stable

Du côté des ménages, selon les prévisions de l’Insee, la consommation, soutenue par un pouvoir d’achat relativement dynamique, accélérerait enfin (+0,5% après +0,1%) au deuxième trimestre, en particulier, la consommation d’énergie serait très dynamique du fait d’un mois de mai plus frais. Les achats immobiliers, en baisse depuis plusieurs mois, se stabiliseraient progressivement sous l’effet de la baisse des taux, après deux années de forte baisse. Ainsi, pour Dorian Roucher, dans les prochains mois, « l’activité hésiterait entre une consommation dynamique et un investissement hésitant « Le coup de semonce politique pourrait briser ces ressorts fragiles.

Avant ce plongeon dans l’inconnu, l’activité aurait continué de croître au deuxième trimestre de +0,3%. Sur l’ensemble de l’année, l’Insee tablait sur une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 1,1%, soit le même niveau qu’en 2023. Cette apparente stabilité masque en réalité un mouvement d’accélération, la réouverture des centrales nucléaires ayant contribué à hauteur d’un demi-point à la croissance en 2023. « , précise toutefois l’Insee. Dans le détail, les économistes prévoyaient un net rebond au troisième trimestre sous l’effet des Jeux olympiques et paralympiques.

Chute d’activité en fin d’année

Ainsi, selon Clément Bortoli, responsable de la division de synthèse économique, «  Les Jeux olympiques de Londres ont entraîné une augmentation de la croissance de l’économie britannique comprise entre 0,2 et 0,3 point. Nous estimons que, pour la France, l’effet serait comparable. Nous identifions deux impacts majeurs :d’abord la vente des billets, qui sera comptabilisée dans la comptabilité nationale au troisième trimestre, puis les ventes des droits de diffusion télévisée « . Ces ventes auront un impact positif sur les exportations de services, tout comme les achats de billets par les touristes étrangers, qui sont enregistrés.

Les ventes de billets aux ménages français et aux touristes étrangers et de droits audiovisuels aux groupes internationaux soutiendraient la croissance à hauteur de 0,25 point au troisième trimestre 2024. Les répercussions sur les autres secteurs du tourisme (hébergement, restauration, transport) sont plus incertaines, mais pourraient augmenter la croissance jusqu’à 0,05 point supplémentaire « , écrivent les économistes de l’Insee. L’impact lié à la construction de nouvelles infrastructures sportives a déjà été enregistré aux trimestres précédents. Portée par les Jeux, la croissance augmenterait alors de 0,5% cet été. Cet effet étant ponctuel, l’activité marquerait le pas en contrecoup en fin d’année (- 0,1%). Et ce, sans tenir compte des incertitudes politiques.