Les frasques d’Elon Musk ont fait de l’investissement de Twitter l’une des « pires transactions bancaires » depuis 15 ans
Entre la fuite des annonceurs et le manque de modération, la plateforme, devenue X, a considérablement perdu de la valeur depuis qu’Elon Musk en a pris le contrôle, révèle une enquête de Le Washington Post.
Un rachat d’envergure en 2022, qui ne fait pas très plaisir aux investisseurs (à amender). Au moment où le milliardaire Elon Musk a racheté le réseau social Twitter, pour la coquette somme de 44 milliards de dollars en octobre 2022, il n’a pas avancé l’argent seul. L’homme a emprunté auprès des banques et a reçu le soutien d’une centaine d’investisseurs de poids comme le fondateur de la plateforme, Jack Dorsey ou encore le prince saoudien Alwaleed bin Talal. Or, comme l’a révélé mardi le Washington Post, le retour sur investissement est bien moindre car l’entreprise a perdu plus de la moitié de sa valeur.
Dans son analyse, basée sur les estimations du gestionnaire d’investissement Fidelity, les huit plus gros investissements initiaux qui ont été signalés à la Securities and Exchange Commission des États-Unis ou rendus publics d’une autre manière valent environ 5 milliards de dollars de moins que lorsque Musk a acheté Twitter, qui est devenu X. « Sa participation globale (à Elon Musk éd.) et ses partenaires ont perdu 24 milliards de dollars de valeur. Une évaporation de richesse qui n’a guère d’équivalent en dehors du domaine des crises économiques ou sectorielles, ou des scandales dévastateurs d’entreprises », souligne le journaliste du Washington PostFaiz Siddiqui.
Un fiasco pour les investisseurs
Ce dernier a pris le temps de lister les pertes pour les investisseurs les plus connus. Le gestionnaire d’actifs Fidelity, qui a lui-même investi 316 millions d’euros lors du rachat, estime que la valeur de sa participation a chuté de près de 72 %, à 88 millions de dollars. Autre exemple, celui de Jack Dorsey, le cofondateur de Twitter, qui a investi 1 milliard d’euros : la valeur de sa participation, en 2024, est estimée à 280 millions de dollars. Ce dernier avait déjà exprimé des regrets après le rachat, par le patron de Tesla, du réseau social. « Elon Musk n’aurait jamais dû acheter Twitter, tout va mal depuis »a-t-il déclaré en mai 2023, moins d’un an après l’acquisition de la plateforme.
Le prince saoudien Al-Walid ben Talal a investi 1,89 milliard de dollars. Sa participation est désormais évaluée à seulement 280 millions de dollars. Le plus grand perdant reste Elon Musk lui-même. Le magnat de la technologie a investi un total de 33,5 milliards de dollars. Cependant, la valeur de ce qu’il détient dans sa plateforme est désormais évaluée à 9,38 milliards de dollars.
Outre ces investisseurs, les banques font également la grimace. Sept grandes banques ont permis au milliardaire d’emprunter 13 milliards de dollars, dont Morgan Stanley, Bank of America et BNP Paribas. Avec l’effondrement de la valeur du réseau social, elles se seraient rendues compte « la pire transaction bancaire depuis la fin de la crise financière en 2009 », a révélé un article du Wall Street Journal du 22 août.
Fuite des annonceurs et manque de modération
Derrière ces chiffres, il y a les conséquences de la politique exercée par Elon Musk sur le réseau social. Partisan d’une totale liberté d’expression, le milliardaire a licencié la plupart des modérateurs de la plateforme peu après l’avoir rachetée. La multiplication des fausses informations et des contenus parfois controversés a entraîné une fuite des annonceurs, craignant que leurs publicités ne s’affichent à proximité d’un tweet importun. Parmi eux figurent de grands groupes comme Apple, Disney ou IBM. Elon Musk peine à recréer des liens forts avec les entreprises. En novembre 2023, lors d’un forum organisé par le Le New York Timesil avait encouragé les annonceurs qui avaient décidé de boycotter X à « Va te faire foutre. » La même année, les revenus publicitaires de X ont chuté de 60 %.
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Début août, Elon Musk a poursuivi son bras de fer avec certains annonceurs, annonçant qu’il déposait une plainte au Texas contre la Global Alliance for Responsible Media (Garm). Un groupe interprofessionnel créé en 2019 par la Fédération mondiale des annonceurs, dont la mission est d’aider les annonceurs à éviter de placer leurs publicités à proximité de contenus illégaux ou préjudiciables. Elon Musk les accuse d’avoir délibérément organisé un boycott de X pour conduire à la démonétisation de certains de leurs contenus.
Ce manque de modération continue de causer des déboires au réseau social. Depuis vendredi dernier, le réseau social X est suspendu dans le plus grand pays d’Amérique latine, le Brésil. Le pays est le quatrième marché mondial de la plateforme avec 22 millions d’utilisateurs. La raison de cette décision est le refus d’Elon Musk de suspendre 140 comptes d’activistes d’extrême droite et de nommer un représentant légal pour l’entreprise dans le pays, comme le demandait le juge brésilien Alexandre de Moraes. Il s’agit d’un nouveau risque pour le milliardaire, qui perd une cible importante de consommateurs potentiels pour les annonceurs.