Et même si personne n’est encore en train de sortir la guillotine, la vague de soutien de l’extrême droite est une indication que le tabou qui maintenait autrefois des partis comme le Rassemblement national hors du pouvoir risque d’être brisé – ou plus probablement déjà brisé.
En 2002, lorsque le père de Marine Le Pen, Jean-Marie Le Pen, a choqué le pays en devenant le premier candidat d’extrême droite de l’histoire moderne à se qualifier pour le second tour de l’élection présidentielle française, Aleksandar Nikolic a rejoint les centaines de des milliers de personnes sont descendues dans la rue pour protester contre les résultats et ont finalement empêché Le Pen de remporter la victoire.
Alors âgé de 15 ans et membre des Jeunes communistes, Nikolic faisait partie de ceux qui pouvaient à peine croire qu’un homme reconnu coupable de négationnisme était si près d’accéder au pouvoir. En effet, ses convictions politiques, affirme-t-il aujourd’hui, ont été forgées dans l’environnement médiatique anti-Le Pen qui imprégnait alors la culture populaire.
Aujourd’hui, Nikolic est un fervent défenseur du jeune Le Pen. La région où il vit, l’Eure-et-Loir, était autrefois partie du cœur manufacturier de la France, parsemée d’usines et de mines qui ont fourni des emplois de classe moyenne à des milliers de travailleurs français pendant « Les Trente Glorieuses », la période de trois décennies de croissance économique qui a suivi la Seconde Guerre mondiale.
Cependant, la mondialisation a vu nombre de ces usines et emplois délocalisés à l’étranger, laissant de larges segments de la classe ouvrière française mécontents et, dans leur esprit, abandonnés par l’élite parisienne. C’est cette frustration qui s’est transformée en révolte en 2018, lorsque des milliers de personnes ont afflué vers Paris depuis les zones rurales et périurbaines dans le cadre du mouvement des Gilets jaunes, s’emparant symboliquement de l’avenue la plus prestigieuse de la ville, les Champs-Élysées, et vandalisant l’emblématique Arc de Triomphe.
À ce moment-là, Marine avait pris le contrôle du parti de son père, puis avait appelé le Front National, l’expulsant dans une démarche qui, selon de nombreux observateurs, visait à éloigner son mouvement de ses propos antisémites et racistes. En se relookant, Le Pen a plutôt cherché à repositionner son parti comme un mouvement de défense des intérêts français, s’opposant avec véhémence aux accords de libre-échange et appelant à des règles d’immigration plus strictes.