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Les forces de Kiev seront-elles en mesure de conserver la « zone tampon » souhaitée après l’incursion dans la région russe de Koursk ?

Deux semaines après son lancement, l’offensive des forces armées ukrainiennes se poursuit afin de gêner la Russie dans son invasion de l’Ukraine. Mais ce territoire sera difficile à contrôler, préviennent les analystes militaires.

Après la surprise, place aux déclarations. Dimanche 18 août, au 12e jour du raid militaire lancé par l’Ukraine à travers la frontière russe en direction de la ville de Koursk, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a félicité ses hommes, tout en appelant à la création d’une « zone tampon » dans cette région. Pour Kiev, la mission est claire : « « Détruisez autant que possible le potentiel de guerre de la Russie et menez un maximum de contre-offensives. »

En ciblant cette région de la Russie, l’Ukraine gêne son occupant tout en espérant éloigner les forces russes du Donbass, où la situation leur est plus favorable depuis plusieurs mois, comme l’explique France 24. Alors que les troupes de Kiev continuent d’avancer vers Koursk, quels seront les contours de cette « zone tampon » ? Et combien de temps pourrait-elle tenir, face à un régime russe qui a juré de ne plus se soumettre à la Russie ? « chasser l’ennemi du territoire » ? Franceinfo s’est penché sur ce nouvel aspect du conflit russo-ukrainien.

Comme les régions de Briansk et Belgorod, frontalières de l’Ukraine, celle de Koursk est depuis 30 mois une base arrière de la guerre d’invasion lancée par la Russie. Et qui dit base arrière, dit présence « de nombreux dépôts d’armes, de munitions et d’autres infrastructures essentielles à l’armée russeGuillaume Ancel explique à franceinfo, ancien officier de l’armée française et écrivain. L’Ukraine a déplacé la guerre sur le territoire russe, c’est un niveau de pression complètement différent. »

Lundi, Volodymyr Zelensky a revendiqué le contrôle par ses forces de plus de 1 250 km2 de territoire et de 92 localités dans l’oblast de Koursk, d’où fuient par milliers des civils russes depuis la première semaine d’août. Faut-il s’attendre à de nouveaux gains territoriaux ? « Ils (soldats ukrainiens) « Ils n’iront pas à Moscou, car ils n’ont ni l’ordre ni les moyens de le faire »temporise Guillaume Ancel, qui décrit la progression ukrainienne comme « une tache qui s’étend tant qu’elle n’est pas arrêtée. »

L'avancée des forces armées ukrainiennes dans la région russe de Koursk (zone hachurée) au 20 août 2024, documentée par l'Institut pour l'étude de la guerre. (HELOISE KROB / FRANCEINFO)

Pour le spécialiste militaire, il y a de fortes chances que la zone envahie par Kiev (la zone hachurée sur la carte ci-dessus) trouve bientôt ses limites. « L’armée ukrainienne a surpris tout le monde, y compris elle-même, en avançant si facilement sur le territoire russe, il demande. Ses forces avancent dans toutes les directions, mais nous remarquons qu’elles ne vont pas très en profondeur. Au maximum, la distance entre les avant-postes et la frontière ukrainienne reste d’une trentaine de kilomètres.

Parallèlement à cette incursion, l’armée ukrainienne a détruit trois ponts sur la rivière Seym, comme le rapporte RFI, ce qui lui a permis d’isoler complètement le district de Glushkovo, directement à l’ouest de la zone envahie. « L’opération semble avoir été très bien préparée par Kiev dans son ensemble »commente Guillaume Ancel, qui estime que« environ 10 000 soldats ukrainiens » sont mobilisés pour « déranger le plus possible » La Russie sur ses terres.

En restant en mouvement, les soldats de Kiev ont réussi à éviter pour le moment les frappes de l’armée russe. « Il y a des rapports sur l’utilisation de missiles Iskander contre les forces de reconnaissance ukrainiennes, ce qui revient à chasser les moustiques avec un marteau.La présence de nombreux civils russes pose également un sérieux problème opérationnel pour Moscou, dont les succès militaires reposent généralement sur un usage massif de l’artillerie. « Bombarder l’Ukraine, où l’on accorde peu d’attention aux destructions matérielles, n’est pas la même chose que frapper son propre territoire »souligne à franceinfo Jérôme Pellistrandi, ancien général de l’armée française et rédacteur en chef du Revue de défense nationale.

« Si la Russie bombarde ses villes comme elle l’a fait avec Grozny en Tchétchénie (entre 1999 et 2000), l’opinion publique russe pourrait se retourner contre Vladimir Poutine. »

Jérôme Pellistrandi, ancien général et rédacteur en chef de la « Revue Défense nationale »

à franceinfo

Il n’en demeure pas moins qu’au fil du temps, « Ce sera une position difficile à maintenir pour l’Ukraine.juge l’ancien général. Nous devrons creuser pour éviter les tirs d’artillerie une fois les positions fixées, il explique. « Il faudra aussi une bonne défense sol-air, pour contrer les attaques aériennes russes. Et puis les Ukrainiens n’ont pas encore assez d’avions F-16 pour les risquer dans cette zone, donc ce n’est pas simple ». Face à l’incursion ukrainienne sur son sol, la Russie reste pour l’instant très discrète sur les renforts qu’elle compte envoyer à Koursk.

L’autre épine dans la botte de l’armée ukrainienne sur le territoire russe est « la bataille de l’image »ajoute Jérôme Pellistrandi. « Nous devons veiller à ce que la population civile soit aussi protégée que possible et montrer que les soldats ukrainiens sont là en tant que libérateurs et non en tant qu’occupants. »explique-t-il. Si les forces de Kiev s’installent dans la région de Koursk, « Des problèmes de police et d’administration civile surgiront un jour »il prévient également.

Pour Guillaume Ancel, ce projet de « zone tampon » est à prendre avec des pincettes. « Cela ressemble encore à de la poudre aux yeux, après une opération éclair et surprenante »estime-t-il, appelant à relativiser l’importance de cette prise. « Quant à la frontière, elle n’est que de 50 km sous contrôle, sur 1 200 km de ligne de front potentielle entre l’Ukraine et la Russie ou la Biélorussie (allié de Moscou)« il explique.

« Ce raid militaire permet néanmoins à l’Ukraine de rassembler des cartes pour négocier en position de force »« Dans les premiers jours de l’offensive ukrainienne, par exemple, les soldats de Kiev ont capturé plusieurs centaines de prisonniers de guerre russes », note l’ancien officier. « Cela sera très utile lors des échanges avec les soldats ukrainiens capturés, surtout quand on sait comment ils sont traités dans les prisons russes. »il souligne.

Un bâtiment endommagé par les combats à Koursk (Russie), le 19 août 2024. (VLADIMIR ALEKSANDROV / ANADOLU / AFP)

Quant à la redistribution des forces russes sur la ligne de front, « l’effet de l’incursion n’est pas clairement visible »note Jérôme Pellistrandi. Aucun mouvement significatif en provenance du Donbass ou du delta du Dniepr, dans le sud de l’Ukraine, n’a été recensé à ce jour. Si l’Ukraine continue de perdre du terrain à l’Est, elle semble viser d’autres cibles.

« Cette incursion a montré une fois de plus que les lignes rouges tracées par Vladimir Poutine (qui évoque régulièrement la menace d’une guerre nucléaire) ne sont pas vraiment »analyse Jérôme Pellistrandi. Kiev espère ainsi rassurer ses alliés occidentaux sur la livraison d’équipements toujours plus sophistiqués, notamment de missiles à longue portée, et afficher de nouvelles victoires. quelques mois avant la saison hivernale. Par ailleurs, après avoir salué cette percée sur le sol russe, Volodymyr Zelensky a rapidement appelé ses partenaires du réseau social X, notamment la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, à lui livrer de nouvelles armes, arguant que« il n’y a pas(allais) « Pas de vacances pendant la guerre ».

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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