Vingt et un mille cinq cents ménages ont été expulsés de leur logement par la police en 2023, indique le ministère du Logement en réponse aux demandes du ministère du Logement. Monde. Leur nombre a augmenté de 23 % par rapport à 2022, qui était déjà une année record. Et à la fin des vacances d’hiver – qui, chaque année, suspendent les expulsions locatives du 1euh De novembre au 31 mars inclus – la Fondation Abbé Pierre et de nombreuses associations craignent que l’année 2024 ne soit marquée par une nouvelle hausse.
Pour bien comprendre, il faut remonter le temps. En 1983, il y a eu 3 000 expulsions forcées, soit sept fois moins. Un premier pic historique a été atteint en 2019, avec 16.700 ménages contraints à la rue, principalement à cause de loyers impayés. Lors de la crise sanitaire de 2020, le gouvernement a prolongé la trêve hivernale jusqu’au 10 juillet, et demandé aux préfets « ne pas recourir à la force publique sans solutions de relogement », en fournissant les moyens d’indemniser les propriétaires. Cette année-là, les expulsions forcées ont été réduites de moitié. Depuis, ils ont atteint de nouveaux records, mais le ministère du Logement tient à souligner que la moyenne annuelle sur la période 2020-2022 reste inférieure au record de 2019. « Nous menons une politique volontariste de prévention des impayés et une politique ferme d’exécution des décisions de justice »il argumente.
« Je suis très choqué d’apprendre que 21 500 foyers ont été expulsés de forceréagit le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert. On voit bien qu’un rattrapage des expulsions non réalisées en 2020 et 2021 est à l’œuvre, alors que le gouvernement pourrait choisir d’en éviter une partie, en indemnisant les propriétaires. »
« Cette loi fait de nous des délinquants »
Seul le nombre d’expulsions impliquant la police est désormais rendu public, alors que jusqu’en 2019, les chiffres des décisions de justice et des fins de procédure étaient également publiés. « 140 000 personnes en moyenne chaque année sont contraintes de quitter leur logement à cause de loyers impayés », estime une instruction ministérielle du 23 novembre 2023, citée par la Fondation Abbé Pierre. Et plusieurs signaux laissent entrevoir de nouvelles augmentations. Les ménages à faibles revenus ont été particulièrement touchés par l’inflation, alors que la réforme des aides au logement leur a souvent été défavorable.
Par ailleurs, la loi Kasbarian-Bergé, entrée en vigueur en juillet 2023, a accéléré les procédures d’expulsion, réduit la possibilité pour le juge d’accorder des délais de paiement et de maintien dans les lieux, et divisé par trois ces délais. « Cette loi fait de nous des délinquants », s’est également insurgée Sonia, une mère de famille menacée d’expulsion par un marchand de sommeil, lors d’une conférence de presse de l’association Droit au logement. Elle faisait référence au fait que les locataires qui restent dans leur logement après la procédure d’expulsion sont passibles d’une amende de 7.500 euros. « L’expulsion va détruire ma vie de famille» a ajouté avec amertume cette locataire qui devrait néanmoins être relogée par l’Etat, puisqu’elle a été reconnue prioritaire au titre du droit opposable au logement (DALO). Les services sociaux ne font pas leur travail. La classe ouvrière n’a plus sa place dans la société. »
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