les Etats-Unis font pression, le Hamas tergiverse – Libération
En déplacement en Israël ce mercredi 1er mai, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a une nouvelle fois demandé au mouvement palestinien d’accepter la trêve validée par Israël. Mais le Hamas prend son temps.
Les États-Unis n’ont jamais semblé aussi pressés. En Israël, ce mercredi, au terme d’une septième tournée régionale depuis le 7 octobre, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a une nouvelle fois exhorté le Hamas à accepter « MAINTENANT » l’accord de trêve, dont la dernière version a été validée par l’État hébreu. Pressé par l’urgence humanitaire à Gaza, où l’aide n’arrive toujours pas suffisamment pour couvrir les besoins des plus de 2 millions d’habitants de ce territoire ravagé par les bombardements, mais aussi et surtout par l’importance du débat politique suscité aux Etats-Unis États par l’occupation des universités américaines.
C’est même devenu un enjeu électoral outre-Atlantique, à près de six mois de l’élection présidentielle. Le soutien de Washington à Tel-Aviv divise les démocrates depuis plusieurs semaines, et affaiblit grandement le candidat à la présidence Joe Biden face à Donald Trump qui continue de progresser dans les sondages malgré ses querelles judiciaires. L’intervention de la police à l’université de Columbia, à New York, pour déloger des militants pro-palestiniens, a par exemple été commentée en direct ce mardi sur la chaîne conservatrice. Fox News par l’ex-président milliardaire qui sera investi cet été par le Parti républicain. Il a fustigé le prétendu laxisme de son adversaire démocrate qu’il affrontera le 5 novembre. Quelques heures plus tard, des échauffourées éclatent à UCLA, l’université de Los Angeles, après qu’un groupe de jeunes opposants au mouvement d’occupation ait lancé des feux d’artifice sur les militants. tentes.
Sensibilités
De quoi expliquer l’empressement du secrétaire d’Etat américain qui, après sa visite à Riyad mardi 30 avril, met le paquet tout en essayant de ménager les sensibilités de chacun. Aux Israéliens, il assure qu’il est déterminé »obtenir un cessez-le-feu ramenant les otages chez eux et l’obtenir maintenant. Et la seule raison pour laquelle cela n’arrivera pas, c’est le Hamas. » Aux autres, il promet de tout faire pour empêcher l’imminence d’une offensive israélienne sur la ville de Rafah, dernier refuge palestinien au sud de la bande de Gaza où se concentrent près de 1,5 million de personnes dans des conditions de vie déplorables. Il a d’ailleurs réitéré son opposition à une telle opération lors d’un entretien avec Benjamin Netanyahu à Jérusalem ce mercredi selon Matthew Miller, le porte-parole du Département d’Etat.
L’organisation islamiste a répondu presque directement à ses déclarations de ce matin en l’accusant de faire pression sur le Hamas alors qu’il « acquitter » Israël, selon Sami Abu Zuhri, un haut responsable du Hamas. Il a déclaré à l’agence Reuters que le groupe étudiait toujours la dernière offre pour laquelle Tel-Aviv dit attendre une réponse ce mercredi soir au plus tard. Selon Associated Press, le Hamas a demandé des éclaircissements sur la dernière version aux négociateurs égyptiens et qatariens. Depuis la dernière trêve de novembre, les négociations butent toujours sur le même point : l’organisation souhaite un cessez-le-feu permanent et un retrait total des forces israéliennes de Gaza, tandis que Benjamin Netanyahu affirme que son opération va se poursuivre. « avec ou sans accord » trêve. En tant que bon équilibre, les responsables américains disent au New York Times espérer qu’une trêve de six semaines, telle qu’elle est actuellement prévue, débouchera sur un cessez-le-feu permanent.
Détails de l’accord
Mais force est de constater que la formulation d’une telle condition à respecter reste assez vague. Du moins tel qu’il est présenté ce mercredi par le journal libanais Al-Akhbar, qui publie les détails de l’accord présenté par l’Egypte au Hamas vendredi dernier. Les mots utilisés ne mentionnent pas l’engagement d’Israël à ne pas retourner dans la bande de Gaza, comme le souhaite l’organisation islamiste, mais « un retour au calme et la mise en œuvre de tout ce qui est nécessaire pour parvenir à un cessez-le-feu ».
Par ailleurs, l’article confirme qu’une première phase de 40 jours devrait permettre la suspension des activités de Tsahal dans l’enclave palestinienne et le retrait des forces armées des zones les plus peuplées, notamment celles proches de la frontière. Les soldats israéliens resteraient néanmoins stationnés dans un premier temps dans le couloir de Netzarim, au centre de la bande. Un premier lot de 33 femmes otages – dont des soldats – seraient libérées au rythme de trois par jour contre une quarantaine de femmes palestiniennes – y compris celles condamnées à mort. Selon l’accord, le Hamas s’engagerait à fournir au septième jour de la trêve une liste de tous les otages encore en vie. Ce serait ensuite au tour des otages masculins – malades, blessés ou âgés de plus de 50 ans – d’être libérés en échange de 20 à 50 prisonniers palestiniens.
Durant toute la durée des libérations d’otages, Israël s’engage à ne pas survoler Gaza, ni en avion ni par drone, huit à dix heures par jour. Et l’armée israélienne doit laisser les Gazaouis retourner dans leur zone de résidence, laisser revenir l’aide humanitaire, et se retirer progressivement, à partir du 22ème jour, du corridor de Netzarim pour faciliter l’acheminement des 500 camions humanitaires prévus dans l’accord – dont 50 camions-citernes avec du carburant. Une deuxième phase est alors prévue pour permettre la libération de tous les otages encore en vie et permettre la négociation d’un cessez-le-feu durable. Un troisième, encore hypothétique, devrait voir la restitution des corps des otages décédés et la mise en place d’un plan de réhabilitation quinquennal au cours duquel les Palestiniens s’engageraient à ne construire aucune installation militaire dans l’enclave.
Urgence
En attendant la réponse du Hamas, chacun joue son rôle. Au-delà des Etats-Unis qui font pression, certaines puissances occidentales veulent aussi jouer un rôle, notamment la France. Le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné effectue une visite surprise au Caire ce mercredi 1er mai, après Tel-Aviv mardi et Riyad lundi. Selon Reuters, il souhaite tenter d’inscrire les trois Français toujours otages sur la liste des futures libérations en cas d’accord. Des diplomates français assurent également vouloir présenter une proposition visant à désamorcer les tensions à la frontière libanaise entre Israël et le Hezbollah, l’autre front qui menace depuis sept mois d’une escalade sans précédent.
Malgré l’espoir encore incertain d’une trêve, les tensions ne s’apaisent pas. Israël continue ses bombardements sur la bande de Gaza et a affirmé ce mercredi matin avoir « frappé et détruit » la nuit «installations de stockage d’armes, structures militaires, sites de lancement et lance-mortiers». Le ministère de la Santé de Gaza contrôlé par le Hamas a pour sa part fait état d’un nouveau bilan de 34 568 morts, en majorité des civils. Lors de sa rencontre ce matin avec le président israélien Isaac Herzog, le secrétaire d’État américain a évoqué en un mot les victimes de Gaza : « Nous devons également nous soucier des personnes qui souffrent, prises entre deux feux. » Car c’est pour eux, comme pour les familles des otages, que l’attente est la plus longue.
Mis à jour à 14havec l’entretien entre Antony Blinken et Benjamin Netanyahu.