Patronat et syndicats ont repris ce mardi les négociations – pour une deuxième séance – sur l’emploi des seniors. Comme le veut la tradition, les représentants patronaux ont transmis un projet de texte aux syndicats.
Le retour du CDI senior
Et quelle ne fut pas la surprise des syndicats, dès réception du projet d’accord, de voir les employeurs (Medef, U2P et CPME) remettre sur la table le CDI senior ! La création d’un nouveau contrat spécifique pour les plus âgés avait déjà été suggérée lors des précédentes négociations du printemps dernier par le clan patronal. Pour les employeurs, ce nouveau CDI, qui s’adresserait aux demandeurs d’emploi de 60 ans et plus inscrits à France Travail (ex-Pôle emploi), faciliterait le recrutement de chômeurs âgés.
L’idée ? Compenser toute perte de salaire par rapport à son poste précédent via le droit au chômage. Dans le cadre de ce nouveau contrat à durée indéterminée, l’employeur pourrait également mettre automatiquement le salarié à la retraite dès qu’il atteint l’âge de la retraite à taux plein. Dans ce CDI senior, il serait également possible, sous certaines conditions et dans le cadre d’un plafond, de cumuler intégralement allocation chômage et salaire.
Mais cette proposition fait hérisser les syndicats. Ils y voient une manœuvre du clan patronal pour rémunérer à moindre coût la main d’œuvre expérimentée et, de surcroît, faire prendre en charge une partie du salaire par France Travail. D’autant que ce CDI senior bénéficierait d’une exonération de certaines cotisations patronales.
Pour la CFDT, la création d’un nouveau contrat de travail, spécifique aux travailleurs âgés, est d’autant plus surprenante que les employeurs ont pour habitude de se plaindre d’une alourdissement du Code du travail.
Vers une retraite progressive à partir de 60 ans
Autre point de discussion : les conditions d’accès à la retraite progressive. Ce système permet aujourd’hui aux salariés de réduire leur temps de travail en percevant une partie de leur pension de retraite.
Contrairement au CDI senior, syndicats et patronat partagent la volonté de dynamiser ce dispositif encore très rare en France, même s’il a fait ses preuves dans les pays du Nord. Mais les partenaires sociaux sont loin de s’entendre sur les modalités, même si le patronat semble se montrer un peu plus flexible cet automne.
Ainsi, les syndicats avaient réclamé, lors des précédentes négociations du printemps, que la retraite progressive soit automatiquement accessible à partir de 60 ans. Aujourd’hui, cette mesure n’est ouverte que deux ans avant l’âge légal de la retraite, qui depuis la réforme d’Emmanuel Macron en 2023, va progressivement être porté à 64 ans. Au printemps dernier, les employeurs ont refusé. Cette fois, les représentants patronaux sont plus enclins à accepter une retraite progressive en fin de carrière à partir de 60 ans.
Reste cependant un point de friction important : le droit opposable. Les syndicats réclament en effet que la retraite progressive ne puisse être refusée par l’employeur au salarié qui en fait la demande. « Impensable »confie un membre de la délégation patronale, qui « Je crains que ce soit une porte ouverte à de nombreux départs dès 60 ans. Il faut que le chef d’entreprise puisse avoir son mot à dire. » C’est pourquoi dans le projet d’accord proposé par la partie patronale, il est prévu que le dispositif soit mis en place « sous réserve de l’accord de l’employeur. »
Un contexte budgétaire qui pèse sur la négociation
Finalement, cette négociation est d’autant plus difficile qu’elle se déroule en pleine discussion budgétaire, dans un contexte extrêmement contraint. En redonnant le contrôle aux partenaires sociaux, la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet leur a demandé de trouver 400 millions d’euros d’économies supplémentaires par an.
Ces économies devraient notamment être réalisées en relevant de deux ans les seuils d’âge donnant droit à une période d’indemnisation plus longue. Un point qui devrait être pris en compte sans trop de difficulté par les partenaires sociaux.
Syndicats et employeurs ont jusqu’au 15 novembre pour parvenir à un accord. Si les discussions échouent, le gouvernement prendra le contrôle.