Du sud de l’Espagne jusqu’en Ardèche, les pluies torrentielles de ces dernières semaines ont causé d’importantes pertes humaines et d’immenses dégâts matériels. A À la veille du coup d’envoi de la COP29 en Azerbaïdjan, la brutalité de ces événements rappelle que le réchauffement climatique va peser sur les économies européenne et française. Dans ce contexte, l’Insee a calculé les effets délétères du réchauffement sur l’économie française et sur l’épargne des ménages, à partir de nouveaux indicateurs corrigés des émissions de CO2. C’est un » comptabilité nationale augmentée « .
Un problème comptable
« Il s’agit d’un projet important qui repousse les limites de la comptabilité nationale. Il s’agit d’une extension des comptes nationaux. Les indicateurs synthétiques ne remplaceront pas le PIB, mais nous prendrons en compte les externalités négatives. » a déclaré le directeur général de l’Insee, Jean-Luc Tavernier, lors d’un point presse ce mardi.
Quinze ans après la remise du rapport des économistes Stiglitz, Sen et Fitoussi à l’ancien président Nicolas Sarkozy, les statistiques publiques tentent de mieux rendre compte des répercussions de l’activité humaine sur le climat.
Force est de constater que la plupart des indicateurs avancés par les économistes se concentrent toujours sur le produit intérieur brut (PIB) ou la croissance, sans nécessairement prendre en compte les impacts majeurs de l’activité sur la nature. Des institutions comme la Banque de France ou le Trésor ont certes commencé à intégrer des indicateurs liés au climat dans leurs modèles, mais ces évolutions sont très récentes.
7 000 milliards d’euros
Parmi les indicateurs marquants présentés par l’institut, on trouve tout d’abord la « responsabilité climatique » de la France. Les statisticiens ont ainsi calculé le coût astronomique des émissions de la France depuis l’ère industrielle. Résultat, elle pourrait s’élever à près de 7 000 milliards d’euros (6 964 milliards d’euros) en 2023.
Ce chiffre inclut « l’empreinte carbone » totale. » Cela inclut les émissions étrangères induites par la demande finale française (émissions « importées »), mais exclut les émissions françaises répondant à la demande finale des autres pays (émissions « exportées »). », souligne l’organisme public basé à Montrouge.
Rien qu’en 2023, le coût de « l’empreinte carbone » s’est élevé à 113 milliards d’euros. Le gouvernement peut se targuer d’une baisse des émissions de CO2 depuis le début des années 1990. En revanche, il rappelle très rarement la responsabilité de la France dans l’accumulation historique de pollutions fossiles dans l’atmosphère.
Le coût vertigineux de la décarbonation de l’économie
Dans ses « comptes nationaux augmentés », l’Insee a également calculé le coût vertigineux de la décarbonation de l’économie française d’ici 2050 : 929 milliards d’euros. Cette enveloppe prend en compte les engagements de la France inscrits dans sa stratégie nationale bas carbone (SNBC) pour atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050.
» Ces coûts étant supportés publiquement ou privéement, sous forme d’investissement ou de renoncement à la consommation », soulignent les auteurs. Lors de la présentation de leur rapport en 2023, les économistes Jean Pisani-Ferry et Selma Mafhouz estimaient le montant annuel des investissements à réaliser à environ 70 milliards d’euros par an d’ici 2030. Mais la crise budgétaire des deux dernières années complique sérieusement l’équation exécutive.
Face à des investissements colossaux, la France va devoir trouver rapidement des moyens de financement. L’assouplissement prochain de la politique monétaire de la BCE devrait insuffler un nouveau souffle aux ménages et aux entreprises. Mais le gouvernement Barnier est engagé dans une politique budgétaire restrictive, difficilement conciliable avec le financement de la transition écologique.
À cet égard, les coupes sévères prévues au ministère de la Transition écologique ont également provoqué des divisions au sein même de l’exécutif. La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier Runacher, est montée en première ligne pour défendre les crédits de son ministère. À cela s’ajoute la polarisation du « socle commun » des députés sur la fiscalité des plus riches et des grandes entreprises.
Des pertes colossales
Les émissions de carbone entraînent également des pertes colossales de valeur de la production marchande et non marchande. Dans son étude, l’Insee calcule que le coût cumulé des politiques de dommages et d’atténuation s’élève à 94 milliards d’euros en 2023.
Pour arriver à ce chiffre, l’institut a soustrait au produit intérieur net (2,294 milliards d’euros) les 36 milliards de dommages mondiaux liés aux émissions françaises et les 57 milliards de consommation du budget carbone (soit le plafond d’émission autorisé chaque année pour limiter la hausse). en température). En intégrant l’impact du réchauffement sur la mortalité et la santé, ce coût pourrait grimper à 127 milliards d’euros (+33 milliards d’euros). Un montant qui risque de donner le vertige aux comptables de Bercy, actuellement plongés dans une tempête budgétaire.