Les champs bientôt couverts jusqu’à 40 % de panneaux solaires
10 avril 2024 à 9h02
Mis à jour le 10 avril 2024 à 12h10
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Encore un arbitrage qui n’a pas fini d’être critiqué. Après plus d’un an d’hésitation, le décret tant attendu censé encadrer l’agrivoltaïsme a été publié le 9 avril. En mars 2023, la loi pour accélérer la production d’énergies renouvelables (Aper) avait établi une première définition (art. 54) de l’agrivoltaïsme. ces installations solaires au dessus d’une parcelle agricole sans empêcher la culture en dessous (du moins en théorie). Restait à régler les détails pratiques pour encadrer ces projets d’un nouveau genre. Une année entière de lobbying acharné de la part des énergéticiens et des syndicats agricoles – chaque monde lui-même divisé sur la stratégie à poursuivre – a été nécessaire pour arriver à la version finale du décret publié cette semaine et qui s’appliquera à tous les nouveaux projets agrivoltaïques déposés à partir du mois de mai. 9.
Jusqu’à 40 % de superficie agricole couverte
Pour quel résultat ? Peu de changement par rapport à ce qui avait déjà été annoncé par le gouvernement en décembre dernier. Sujet clé, le taux de couverture des parcelles : quelle superficie de parcelle cultivée un industriel pourra-t-il recouvrir de panneaux ? Dans la grande majorité des cas, cela peut aller jusqu’à 40 %. Un chiffre résultant d’un compromis entre le FNSEA (Fédération nationale des syndicats agricoles) et l’Union des énergies renouvelables — bien au-delà des recommandations des premières synthèses scientifiques.
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Le syndicat Sud Recherche n’a pas manqué d’exprimer ses inquiétudes face aux orientations technologiques actuelles dans une lettre adressée à l’ensemble des personnels de l’INRAE, l’Institut national de recherche sur l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. Surtout, le décret d’avril de ce mois d’avril anticipe déjà des règles plus souples pour l’avenir en créant une catégorie de « technologies éprouvées ». Une liste de technologies (avec leurs climats et types de sols associés) encore vide aujourd’hui qui devra être complétée par l’Agence de la transition écologique (Ademe), en fonction des retours d’expérience.
Face à l’euphorie rurale des énergéticiens, le décret maintient au moins deux garde-fous. Premièrement, l’installation agrivoltaïque – pieux métalliques, structure, raccordements et locaux techniques compris – ne pourra pas perdre plus de 10 % de la superficie agricole. Surtout, la perte de production alimentaire due à l’ombrage des panneaux doit être limitée à 10 % par rapport à une surface de contrôle. Là encore, cette surface de contrôle ne sera pas systématique : le « technologies éprouvées » déjà mentionnées peuvent être exemptées et le préfet du département peut également accorder des dérogations, notamment s’il existe une installation similaire à l’échelle régionale et dans « conditions pédoclimatiques similaires ».
Les revenus fonciers et agricoles encore mal protégés
Regroupant pourtant de nombreux acteurs de la filière, l’association France Agrivoltaïsme « saluer » dans un communiqué ce texte « tant attendu » mais attends maintenant « suppléments essentiels » et appelle en particulier à un « arrêté exigeant des contrôles efficaces et des sanctions dissuasives ». Le décret publié reste encore flou sur la manière de calculer les pertes de rendement (10 % maximum), notamment lorsque les panneaux sont au-dessus des pâturages destinés au bétail.
Enfin, la question de l’économie de projet reste toujours entière, le gouvernement ayant rapidement renvoyé ce sujet au projet de loi sur le partage de la valeur, déposé début mars en pleine mobilisation agricole, sans se douter qu’il prendrait une telle importance après les mobilisations. des agriculteurs en début d’année.
« Ce texte laisse la porte grande ouverte aux énergéticiens »
Sur le terrain, les pratiques observées par les énergéticiens suscitent déjà des protestations, notamment de la part de la Confédération paysanne, qui a annoncé qu’elle contesterait le décret en justice. « Il ne s’agit pas vraiment d’un cadre, car ce texte laisse la porte grande ouverte aux spécialistes de l’énergie. »déplore de Reporterre Nicolas Fortin, éleveur à Vienne, responsable de l’énergie au sein du syndicat des agriculteurs. « Nous nous concentrons sur la souveraineté alimentaire, tout en exerçant une pression énorme sur les terres. » Le résultat final de cette politique n’est peut-être pas très éblouissant.