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Les Balkans, miroir de l’Europe ?



Dans ce travail, BalkansJean-Arnault Dérens et Benoît Goffin proposent « UN « Le voyage de Vienne, haut lieu des diasporas balkaniques, jusqu’à Bihać, aux portes de l’Union européenne et de l’espace Schengen que tentent de franchir les exilés qui traversent les Balkans. Alors que les pays de la région attendent toujours l’intégration européenne promise depuis 2003, les nuages ​​s’amoncellent à nouveau : conflits non résolus en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, corruption et clientélisme, dérive autoritaire des dirigeants. »

franceinfo : Les Balkans sont quand même un peu méconnus de l’Europe de l’Ouest ?

Jean-Arnault Dérens : C’est tout à fait vrai, même si de plus en plus de touristes se rendent dans les Balkans. Sur la côte, mais pas seulement.

Mais ce ne sont pas les touristes qui font la géopolitique ?

Non, en effet, il y a encore, je dirais même plus qu’une méconnaissance, l’idée qu’il serait impossible de comprendre les Balkans. Essayer de les comprendre serait finalement un peu suspect. Non, en réalité, les Balkans sont une région européenne, même si ce qui caractérise les États de cette zone, c’est qu’ils ne font pas encore partie de l’Union européenne, c’est un peu un trou béant au milieu de l’Union européenne.

La Slovénie et la Croatie sont déjà des États membres…

Avec la Bulgarie, la Roumanie et la Grèce, mais pas d’autres États issus de l’éclatement de la Yougoslavie, ni l’Albanie, qui sont candidats, et qui seront certainement intégrés un jour ou l’autre, mais on verra comment cela se passera. Les Balkans sont à bien des égards plutôt un laboratoire. Je pense que les guerres des années 90 à la fin du siècle dernier ont à la fois mis fin au cycle de la guerre froide et préparé les guerres que nous connaissons aujourd’hui.

Il faut se rappeler qu’une partie des Balkans était l’Empire ottoman, c’était aussi l’Empire austro-hongrois. Ce sont les Slaves du Sud, les trois religions des Balkans, les catholiques, les orthodoxes et puis les musulmans. D’une certaine manière, c’est aussi un miroir de ce que nous vivons tous ?

C’est un miroir tendu à l’Europe, notamment dans son rapport à la puissance, à la contradiction entre les aspirations de peuples, qui ont certes des références identitaires différentes, variées, mais qui veulent fondamentalement vivre ensemble, et des dirigeants politiques qui jouent sur le registre des identités pour tenter de les opposer.

Est-ce le cas en Bosnie-Herzégovine, entre autres ?

C’est particulièrement le cas en Bosnie-Herzégovine. Mais la logique n’est pas très différente au Kosovo, ou dans d’autres pays de la région.

Le gros morceau c’est la Serbie ?

Alors, la Serbie, bien sûr, le pays le plus important géographiquement, démographiquement dans la région, est sûrement une des clés de l’équilibre de toute cette zone. Aujourd’hui, la Serbie est à la fois un pays qui a un régime autoritaire, même si pour l’Occident, tout le monde fait semblant de le courtiser, parce qu’on a un peu peur de ce que pourrait faire la Serbie…

Monsieur Vučić est le président de la Serbie et Xi Jinping lui a rendu visite ?

Les Balkans sont donc devenus aussi l’une des principales voies de pénétration de la Chine en Europe, vers le centre du continent européen. Il faut rappeler aujourd’hui que plus de la moitié des investissements chinois se concentrent dans les Balkans. Mais cela s’explique essentiellement par deux raisons.

D’abord parce que les autres investissements étrangers, notamment ceux de l’Union européenne, tardent à arriver, et ne sont même jamais arrivés. Et puis, de manière générale, le processus d’intégration a tellement pris du retard que les Serbes n’y croient plus beaucoup, et se disent qu’il vaut mieux se tourner vers le seul partenaire disponible, qui, dans ce cas, est la Chine.

Et le Kosovo, une ancienne province serbe ?

Le Kosovo est un pays qui a proclamé son indépendance en 2008, qui n’est toujours pas reconnu par la Serbie ni par l’ensemble de la communauté internationale. C’est un pays qui se trouve encore au milieu du gué. C’est un pays dans lequel vit une majorité d’Albanais, mais aussi une minorité serbe. Et puis aussi, il ne faut jamais oublier, d’autres communautés plus petites, comme les Roms, les Bosniaques, les Turcs et quelques autres.

C’est un pays qui aspire certes à être indépendant, qui naturellement aura toujours des relations très étroites avec l’Albanie, mais il faut aussi l’espérer avec la Serbie, sauf qu’aujourd’hui, on en est encore très loin. Car ces problèmes non résolus de la guerre de 1998-1999, encore exploités par les politiciens des deux camps, permettent de justifier la démagogie nationaliste, d’un côté comme de l’autre.

Jean-Arnault Dérens, les Balkans, poudrière ou pas poudrière ?

Poudrière si l’Europe veut bien qu’elle le soit. Si cette relation périphérique marginalisée sur laquelle les grandes puissances tentent de jouer leur affrontement stratégique, fait que les Balkans restent, je dirais, moins une poudrière qu’un miroir grossissant des contradictions de notre monde. Et puis aussi, une sorte de bac à sable, de terrain de jeu, de ring de boxe, sur lequel on peut montrer ses muscles, ce que de nombreuses puissances ont fait, notamment à propos du Kosovo.

Balkans par Jean-Arnault Dérens et Benoît Goffin, dans la collection « Odyssée, villes-portraits » de l’École nationale supérieure de Lyon.

francetvinfo

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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