« Les arènes de Nîmes, où se déroulent les spectacles, attirent autant de monde que les férias », assure le président du groupe Edeis.
C’est un groupe français à des activités extrêmement variées. CIl s’agit de la concession d’une dizaine d’aéroports régionaux à la conception d’usines, y compris les gigafactories. Le groupe Edeis est également présente dans la rénovation énergétique et la production d’aliments pour animaux. Et, depuis trois ans, elle intervient sur la gestion de sites culturels tels que les arènes de Nîmes et le théâtre antique d’Orange.
Jean-Luc Schnoebelen, Le président du groupe Edeis est l’invité économique de franceinfo ce mercredi 18 septembre.
franceinfo : Y a-t-il une cohérence entre toutes vos activités ou, au fond, votre moteur est-il l’opportunité ?
Jean-Luc Schnoebelen :Il y a beaucoup de cohérence. C’est un métier d’ingénieur, mais dans l’essence même du nom d’ingénieur, il y a le fait d’être ingénieux. On a tendance à l’oublier. Et très ingénieux, c’est de pouvoir répondre à toutes sortes de problèmes et de transformer des demandes, des rêves en réalité.
Vous avez fait une partie de votre carrière chez Bouygues, c’est pourquoi vous parlez aussi d’ingénieur. Il y a quelques années, vous avez commencé à gérer des monuments historiques et culturels. Pourquoi vous êtes-vous lancé dans ce métier et que pensez-vous apporter aux monuments historiques que d’autres n’apportent pas ?
D’abord, on est parti d’un constat simple : on gérait des infrastructures, des ports, des aéroports et assez souvent, on nous demandait d’augmenter le trafic. C’est plutôt un bon signe, mais il fallait aussi attirer les gens. Et on s’est rendu compte qu’on est un pays qui est très riche culturellement, avec des monuments historiques, des sites historiques qui ne sont pas exploités. Et c’est parti de ce principe, c’était de se dire si on arrive à motiver les gens, à les faire venir sur un site historique, on va créer un flux de passagers, un flux de personnes qui vont dépenser de l’argent autour de la ville ou autour du territoire.
Vous contribuez ainsi à l’attractivité des territoires que vous dessertez et dont vous gérez les infrastructures.
Absolument. Nous nous revendiquons comme l’allié du territoire. Et, je dirais, que nous sommes un pays un peu hypocondriaque. Nous avons encore des maladies, mais il y a plein d’opportunités, de choses à développer. Et nous nous rendons compte qu’en utilisant par exemple les arènes de Nîmes où nous montons des spectacles, nous attirons autant de monde que les ferias il y a quelques années.
En effet, c’est un succès. La Cité de la mer à Cherbourg a accueilli 125 000 visiteurs cet été. Mais en même temps, il y a aussi quelques critiques parfois sur le choix des spectacles, sur la mise en avant de sites historiques jugés un peu tape-à-l’œil. Comment répondez-vous à ces critiques ?
On a fait un concert à la Cité de la Mer, effectivement, un festival électro. D’abord, il y avait beaucoup de monde qui venait, on a rempli la salle pour le premier concert, il y avait 5000 personnes. Les gens ont découvert la Cité de la Mer et ils ont dit : « Mais nous ne connaissions pas l’endroit et nous allons revenir le visiter ». Donc en fait, il y a beaucoup d’endroits qui sont peu connus et qui ont pour but de faire des spectacles où il y a… plus de monde…
Plus grand public ? Vous ne voulez pas dire populaire, mais en fait, c’est un peu ce que vous voulez dire.
Si vous voulez, oui, populaire. Et j’irais un peu plus loin : nous essayons systématiquement sur tous nos sites d’attirer les enfants et les adolescents. Pourquoi les enfants et les adolescents ? Je pense que nous avons raté quelque chose culturellement sur les adolescents puisqu’ils n’ont pas envie d’aller dans un musée. Pour eux, c’est rébarbatif, c’est ennuyeux. Nous avons donc considéré qu’il fallait faire revenir les jeunes vers les sites historiques en utilisant de nouvelles méthodes, de nouvelles techniques.
Même si tout le monde n’est pas content. Cela permet aussi de faire rentrer de l’argent dans les caisses. C’est aussi ce que vous offrez quand vous remportez les appels d’offres, le fait que tout le monde soit gagnant à la fin, surtout la ville ou la commune.
Bien sûr, c’est une situation gagnant-gagnant, cela signifie que nous redonnons…
C’est pour cela que vous êtes un homme d’affaires. Gérer des ports maritimes, des sites historiques, des aéroports. Aujourd’hui, les pouvoirs publics ne peuvent pas tout faire seuls. Il faut multiplier les partenariats public-privé. Au fond, vous êtes l’exemple parfait de la nécessité de se tourner vers le secteur privé aujourd’hui, quand on voit la dérive des finances publiques, notamment locales.
Nous sommes une solution. La première chose que nous avons par rapport à l’administration, c’est que nous avons une réactivité beaucoup plus grande. Nous pouvons décider dans la journée de modifier quelque chose, d’investir, de désinvestir, de faire venir le public, ce qui est très compliqué pour le public.
Ne montrez-vous pas aussi que le public d’aujourd’hui ne sait plus faire certaines choses ?
Je pense qu’ils savent le faire. Mais nous nous sommes imposés tellement de contraintes administratives, fiscales et sociales que nous ne pouvons plus le faire efficacement. Mais ils ont la capacité de le faire, c’est-à-dire que nous avons créé nos propres obstacles.
Donc ce n’est pas une question de savoir-faire, c’est une question d’argent, de réactivité…
L’argent, la réactivité… Je vais prendre un exemple un peu différent. J’aimerais qu’on comprenne. Aujourd’hui, on parle de problèmes de santé. Quand on décide de construire un hôpital, on met 20 ans entre le moment où la décision est prise et le moment où elle est reçue. Il y a un exemple que je peux vous rappeler. C’est Jacques Chirac qui a annoncé l’hôpital Georges Pompidou comme étant l’hôpital du futur le plus moderne qui soit. Il a fallu 20 ans pour le construire. Quand il a été terminé, il était obsolète. Cela veut dire qu’on a ignoré l’intelligence humaine et l’évolution technique de tout ce qui se faisait en médecine, l’ambulatoire, l’essor de l’ambulatoire.
Est-ce pour cela qu’il faut recourir au secteur privé, pour que les choses aillent plus vite ?
Il faut faire appel au secteur privé et lever ainsi un certain nombre d’obstacles.
Et notamment les obstacles financiers ?
Les obstacles ne sont pas seulement financiers, ils sont également administratifs.
Durant ce formidable développement d’Edeis, vous êtes resté seul aux commandes. Aujourd’hui, vous ouvrez votre capital. Comptez-vous céder les rênes ?
Je ne suis pas du tout d’accord. Je pense que là aussi, pour rassurer, il faut qu’il y ait une continuité au niveau des actionnaires, au niveau du management.
Parce que c’est toi, en fait. Tu n’es pas seul, mais…
Non, il y a une grosse équipe qui travaille beaucoup. Donc oui, je suis la figure de proue, mais il y a toute une équipe qui travaille dans le même esprit d’être ingénieux, d’apporter des solutions. Et on a voulu se renforcer avec des capitaux qui sont plus longs puisqu’à l’origine, on avait commencé avec du capital-risque dont les durées de vie sont de quelques années, cinq, six ans. Et puis il faudra changer, trouver quelqu’un d’autre. Et là, on s’est dit, on trouve quelqu’un qui a la même philosophie que nous. C’est pour ça qu’on a changé. Donc il n’est absolument pas question de partir.
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