Si le gouvernement tombe, « il y aura probablement une tempête assez grave et de graves turbulences sur les marchés financiers »a prévenu Michel Barnier, le Premier ministre, mardi soir sur TF1. « Nous empruntons déjà à des taux d’intérêt très élevés, taux d’intérêt que nous sommes obligés de respecter pour financer notre dette auprès des investisseurs chinois ou américains. Ils sont actuellement presque au niveau de la Grèce.»
En effet, le rendement des obligations d’Etat françaises à dix ans s’établissait à 3,05% mardi vers 18h20 à Paris et son équivalent allemand était à 2,18%. L’écart, appelé « spread », s’élève donc à 0,87 point de pourcentage, du jamais vu depuis 2012. Or, cet écart de taux « constitue un indicateur de choix pour mesurer la confiance accordée à la France vis-à-vis de l’Allemagne et de ses perspectives » économique, explique John Plassard, spécialiste des investissements chez Mirabaud. « En cause, le projet de loi de finances, rejeté à l’Assemblée, a débuté son examen en séance publique au Sénat »il a continué.
Le RN maître du jeu
Pour les marchés, « la question est de savoir si le Rassemblement national (RN) s’abstiendra ou non lors du vote de confiance » explique Marine Mazet, stratège taux chez Nomura. « Les partis du centre et de droite voteront pour Michel Barnier, le Nouveau Front populaire (NFP) contre, et le RN se retrouve faiseur de roi »prédit-elle.
« La situation politique française pose problème » Et « avec la pression que le RN met sur le gouvernement »un « une motion de censure semble être une issue de plus en plus probable pour les marchés »» confirme Aurélien Buffaut, gérant obligataire de Delubac AM.
Dans ce contexte, sachant « combien de compromis Barnier fera et combien cela coûtera » est une source d’inquiétude pour les investisseurs, résume Marine Mazet. Si le gouvernement tombe fin décembre, « L’instabilité politique et budgétaire va s’aggraver à un moment où il y aura peu de liquidité sur les marchés, ce qui pourrait donner lieu à des mouvements exacerbés »a détaillé le stratège.
De son côté, Marine Le Pen a écarté tout risque de fermer en France, une situation américaine où les fonctionnaires fédéraux ne sont pas payés et les services publics sont bloqués en l’absence d’accord au Congrès sur un budget. » Même en cas de censure, les impôts seraient supprimés, les fonctionnaires payés, les retraites payées et les soins médicaux remboursés. », a soutenu mardi dans Le Figaro le chef des députés RN.
Une plus grande marge de manœuvre pour l’Allemagne
Bien entendu, l’Allemagne est également confrontée à une crise politique, puisque la coalition d’Olaf Scholz a explosé début novembre. Mais le pays « dispose, contrairement à la France, d’une marge de manœuvre budgétaire importante, ce qui fait que les marchés ne se font pas peur »explique Mabrouk Chetouane, responsable de la stratégie de marché chez Natixis IM.
La France a une réunion vendredi avec l’agence de notation Standard and Poor’s, qui doit rendre son verdict sur la notation du pays. Cette notation intervient alors que Paris fait toujours l’objet d’une procédure de déficit excessif auprès de la Commission européenne. Avec un déficit public en nette diminution, attendu cette année à 6,2% du produit intérieur brut selon Bruxelles, la France affiche la pire performance des Vingt-Sept à l’exception de la Roumanie, et reste très loin du plafond des 3%. autorisée par les règles de l’UE.
(Avec l’AFP)