La citadine électrique Leapmotor T03 était déjà disponible à la vente en France avant le partenariat Stellantis/Leapmotor. L’importateur qui avait fait ce pari s’est retrouvé un peu dans le flou et a décidé de porter plainte contre Stellantis.
C’est un véritable combat entre David et Goliath dans la version automobile. Dans une lettre adressée aux médias, l’importateur SN Diffusion – EVE explique avoir jeté son dévolu sur le Leapmotor T03 en 2020 lors d’un voyage en Chine. Cette voiture présente de nombreux atouts pour répondre aux besoins d’un marché français encore balbutiant sur l’offre de véhicules électriques. Mais voilà, Didier Sirgue, le patron de SN Diffusion, ne va pas être le seul à s’intéresser à cette citadine électrique chinoise qu’il importe en France. Carlos Tavares s’intéressera au véhicule lors de son exposition par SN Diffusion au Mondial de l’Automobile de Paris 2022.
Le reste est un peu mieux connu. Fin 2023, le géant Stellantis avec ses 14 marques signera un partenariat avec Leapmotor, devenant ainsi le revendeur international de la marque chinoise. Leapmotor devient ainsi le 15e marque dans le catalogue du groupe. SN diffusion est évincé de la distribution de la marque, et a décidé d’engager une procédure judiciaire.
Un début prometteur, mais rapidement interrompu
La commercialisation du Leapmotor T03 débute toute fin 2022. Les objectifs fixés par l’importateur sont ambitieux : 1 500 exemplaires et un vaste réseau de revendeurs. Sauf que Didier Sirgue tombera sur un os à partir de mi-2023 (enfin même plusieurs se succéderont) : Le bonus écologique est supprimé en France pour les voitures électriques chinoises, puis une surtaxe douanière sera instaurée au niveau européen.
Le modèle, vendu 25 990 €, ne pourra plus bénéficier de 4 000 € d’aide gouvernementale (et jusqu’à 7 000 € pour certains clients). 510 exemplaires du Leapmotor T03 auront été immatriculés en 2023, mais sans aide gouvernementale, le modèle perd immédiatement de son attrait. 179 modèles seront encore immatriculés au premier semestre 2024, avant que son contrat d’importation ne soit résilié par la marque en Chine. Cela reste un bien meilleur résultat que ce que l’importateur a obtenu avec la marque Seres.
Un nouveau souffle pour Leapmotor, mais pas pour son importateur
Outre la fin du bonus, SN Diffusion aurait dû sentir que le vent tournait avec Leapmotor. La marque chinoise a choisi d’investir un stand au salon IAA de Munich en septembre 2023, prouvant que la marque a des ambitions très concrètes en Europe. Le couperet est finalement tombé fin octobre avec la signature du partenariat avec Stellantis.
A partir de ce moment, l’importateur est ignoré par Leapmotor China, et Stellantis n’est plus bavard sur ce qu’il adviendra du réseau de revendeurs mis en place. La situation semble compromise, mais il n’en aura confirmation qu’à réception de la lettre de résiliation de son contrat le 1er mai 2024.
Mais que faire face à la force de frappe d’un groupe automobile comme Stellantis. Sans vouloir discréditer le travail réalisé par SN Diffusion, Stellantis propose tout de même une autre dimension pour les ventes du Leapmotor T03. Le C10 et d’autres modèles viendront également rapidement compléter le catalogue.
On notera néanmoins au passage que le Leapmotor T03 passe de près de 26 000 € sous l’ère SN Diffusion/EVE à 19 500 € sous l’ère Stellantis. Son prix de lancement est même de 18 900 € pour narguer Dacia. Évidemment, les anciens revendeurs qui ont peut-être encore un ou deux modèles en stock doivent voir rouge, mais le client est grand gagnant de l’échange. Et cela le sera certainement encore plus en matière de service après-vente.
Une action en justice qui ne changera rien à l’issue
Didier Sirgue se plaint d’avoir beaucoup perdu : « ce sont des années d’investissement et un réseau de distribution réduit à néant. » Difficile d’imaginer ce que l’importateur espère obtenir de cette procédure judiciaire. Le contexte n’aurait de toute façon pas permis à Leapmotor de prospérer en 2024.
Il est vrai que Stellantis aurait pu décaler son lancement de quelques mois. La marque vient de lancer sa commercialisation fin septembre 2024. Il lui suffirait d’attendre la fin du contrat SN/EVE, le 15 janvier 2025, pour avoir carte blanche dans toute l’Europe. Mais Carlos Tavares n’est pas homme à perdre du temps, la patience n’est certainement pas une des qualités du redoutable chef d’entreprise. Didier Sirgue, qui le connaît bien, doit le connaître mieux que quiconque.
En attendant, au lieu de regretter l’affaire Leapmotor, le patron de SN Diffusion aurait déjà du pain sur la planche pour tenter de relancer la marque Seres, qu’il importe également. Les inscriptions sont passées de 230 en 2023 à seulement 28 pour les huit premiers mois de l’année. Nous ne sommes pas loin du désastre. La colère gronde chez les revendeurs Seres qui ont de nombreux griefs contre la gestion de l’importateur et le manque de pièces pour assurer l’après-vente. Avant de gaspiller de l’énergie à lutter contre Goliath (Stellantis), il y a peut-être d’autres priorités. D’autant que sans vouloir jeter un mauvais œil au revendeur, il n’est pas exclu que Seres reprenne le contrôle des activités de la marque en Europe. D’ailleurs, au Mondial de l’Automobile de Paris, le groupe Seres sera présent avec la marque Aito.
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