Nouvelles locales

Le traitement éditorial du 80e anniversaire de la Libération

franceinfo propose des podcasts à l’occasion du 80e anniversaire de la Libération. Pour en parler, Emmanuelle Daviet, la médiatrice de l’antenne de Radio France, a invité Samuel Aslanoff, rédacteur en chef chargé des opérations spéciales sur franceinfo.

Publié


Mise à jour


Temps de lecture : 4 min

A l’occasion du 80e anniversaire de la Libération, franceinfo a recueilli huit témoignages de ceux qui ont vécu ce moment de l’Histoire. Ils avaient 9, 10 ou 14 ans en 1944. Ces récits de vie peuvent être écoutés en podcast depuis cette semaine sur le site de Radio France. Emmanuelle Daviet, médiatrice de l’antenne de Radio France, reçoit Samuel Aslanoff, rédacteur en chef chargé des opérations spéciales sur franceinfo.

Emmanuelle Daviet : Certains auditeurs aimeraient savoir comment franceinfo a eu l’idée de recueillir et de diffuser ces témoignages d’enfants de la Libération ?

Samuel Aslanoff : C’est la mission collective de Libération qui chapeaute toutes les commémorations de ce 80e anniversaire, qui est venue nous demander un peu d’aide. Ils ont lancé un appel à témoins en disant : « Tu étais enfant à la Libération. Racontez-nous ce que vous avez vécu ». Et nous sommes allés voir ces gens qui avaient dit : « Hé, j’ai quelque chose à dire ». Nous avons donc sélectionné huit histoires.

Comment les interviewés ont-ils réagi à l’idée de partager leurs souvenirs, demandent les auditeurs ?

Beaucoup ne se sentent pas nécessairement légitimes. Ce n’étaient pas des soldats, ce n’étaient pas des adultes, c’étaient juste des enfants. Mais c’était aussi ça qui nous intéressait, voir avec les yeux de leurs enfants, comment ils vivaient cette guerre, ce qu’ils ressentaient face à la Libération, mais aussi les choses un peu moins glorieuses qui accompagnaient cette Libération.

Quels sont les thèmes ou souvenirs les plus marquants qui ressortent de ces témoignages ?

Alors évidemment, il y a des souvenirs légèrement différents, selon l’endroit où l’on habite. Il existe notamment de nombreux témoignages venant de Normandie. Une terrible bataille s’engage après le débarquement. Pendant deux mois, il y a eu plus de 100 000 morts, dont de nombreux civils. Evidemment, les enfants normands n’ont pas forcément les mêmes souvenirs que les enfants qui se trouvaient dans une partie de France un peu plus préservée. Je pense par exemple au témoignage d’Odette, qui a vécu en Normandie, et qui se souvient très bien de la longue agonie d’un soldat allemand.

Odette : « Un enfant de 17 ans. Il a appelé sa mère tout l’après-midi, le pauvre. Tout l’après-midi, ‘maman, maman’, un gamin de 17 ans. Ils l’avaient emmené à l’hôpital, ils n’ont pas pu le sauver. Ils l’ont apporté à mes parents au tableau, sur un mur. Ils l’avaient couvert d’une couverture. Et puis, toutes les demi-heures, trois quarts d’heure, ils venaient soulever la couverture pour voir s’il avait fini. Mais c’était un Allemand, mais quand j’y pense, je pleure encore. »

Samuel Aslanoff : Alors heureusement, il y a eu évidemment des scènes plus joyeuses, avec des souvenirs d’Américains arrivant avec des souvenirs du premier chewing-gum. Mais pour beaucoup, la Libération est aussi le début d’une longue attente. Tous ceux qui attendaient par exemple le retour de leur père de captivité en Allemagne, en 44-45, il y avait encore 1 million de Français qui étaient prisonniers en Allemagne. Et puis il y a ceux qui attendaient leurs parents déportés parce qu’ils étaient juifs. C’est notamment le cas d’Eddy Saragoussi qui a perdu ses parents, déportés à Auschwitz.

Eddy Saragoussi : « Nous avons commencé à attendre le retour de nos parents. Parce que la Libération était arrivée, nous pensions qu’ils reviendraient. C’est de l’attente, de l’espoir. J’ai attendu très longtemps des nouvelles. Les actes de décès sont arrivés 10 ans plus tard, disant qu’ils étaient décédés. à Paris, ce qui n’était pas vrai.

Alors à ce moment-là, je me suis rebellé, et j’ai approché la mairie pour dire qu’ils n’étaient pas morts du tout à Paris. Ils étaient morts à Auschwitz. Il n’y a absolument aucune tombe, il n’y a que leurs noms sur le mur du mémorial de l’Holocauste. Donc mon père s’appelait Bitty Saragoussi, et ma mère s’appelait Allègre. Yomtov, c’étaient leurs noms. Ils sont là, sur ces murs. »

Emmanuelle Daviet : franceinfo se mobilise évidemment pour les 80 ans de la Libération, avec une journée spéciale le 6 juin. Quelle est la couverture éditoriale prévue ?

Samuel Aslanoff : Nous serons donc en direct d’Omaha Beach, où se déroulera la cérémonie internationale. Omaha Beach, c’est Bloody Omaha, car de nombreux GI américains sont morts sur cette plage, et nous y serons toute la journée, pour raconter comment la Normandie accueille le monde entier, puisqu’il y aura Joe Biden, ainsi que le roi Charles, qui sera également là. Comme la Normandie veut se souvenir de ces vétérans, de ces Américains, de ces Britanniques, de ces Canadiens qui, il y a 80 ans, sont venus libérer d’abord la Normandie, puis la France, puis l’Europe.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
Bouton retour en haut de la page