«Le train dans le brouillard tarifaire»
CIl y a eu une ruée, comme l’assaut d’un train de banlieue à la gare Saint-Lazare vers 18 heures. Dès le mercredi 2 octobre, les voyageurs se sont rués sur les offres tarifaires mises en ligne par la SNCF pour les fêtes de fin d’année, de Du 15 décembre au 8 janvier. En une journée, 1,7 million de billets TGV InOui et Intercités ont été vendus sur SNCF Connect. Les trains se sont remplis à la vitesse de neuf TGV par minute aux heures de pointe. À des prix parfois jugés exorbitants, avec de fortes variations et suivant la règle du « premier arrivé, premier servi ».
En arrière-boutique, un mécanisme bien rodé : le gestion du rendementinspiré du transport aérien aux Etats-Unis et introduit au début des années 1990 sur le TGV Nord, après une étude sérieuse, par les économistes de la SNCF, sur le succès… d’American Airlines. En introduisant le système, le patron de la SNCF, Jacques Fournier, a assuré que, si les prix des billets » (étaient à plusieurs niveaux) sur une gamme suffisamment large »ils n’étaient pas sujets à la critique «du point de vue de la lutte contre les inégalités sociales». Trente ans plus tard, les cartes de réduction Avantage, les TGV Ouigo et les trains plus lents permettent toujours de voyager à des prix acceptables.
« Besoin d’argent »
Depuis, le rendement a continué à être affiné après les échecs initiaux. Au détriment des consommateurs ? Son objectif premier est de gonfler les marges de l’opérateur. Si prendre un TGV coûte cher, c’est parce qu’il n’est pas subventionné, contrairement aux TER et aux Transilien en Ile-de-France. La SNCF, qui a renoué avec les bénéfices en 2022, a besoin de liquidités. L’État a réduit sa dette de 35 milliards d’euros, mais sa filiale réseaux se retrouve face à un mur d’investissements pour moderniser ses 28 000 kilomètres de voies ferrées vieillissantes.
« Les enjeux liés au réseau sont fondamentaux si l’on veut maintenir la fiabilité, la fréquence et les performances » dans les services ferroviaires, a souligné le PDG de la SNCF mercredi devant la commission du développement durable de l’Assemblée nationale. Et Jean-Pierre Farandou a rappelé que ce sont notamment les revenus de la filiale SNCF Voyageurs qui l’ont financé, à hauteur de 1,7 milliard en 2024.
Le brouillard sur les prix est-il justifié ? Sans se prononcer sur les prix, l’association de consommateurs UFC-Que Choisir vient d’analyser les offres des sites de réservation en ligne sur vingt-quatre lignes, y compris à l’étranger. Sa conclusion est dure : « L’information sur les prix et les droits des consommateurs sont en train de dérailler. » Sans causer de préjudice commercial à la SNCF. Son slogan des années 1990 – « A nous de vous faire préférer le train » – a fait ses preuves : il regagne du terrain et les Français le soutiennent coûte que coûte.