Le spectre des défaillances plane sur les constructeurs de maisons
Depuis des mois, voire des années, les constructeurs de logements alertent sur la crise profonde que traverse le secteur. Plus graves que les difficultés qui touchent l’immobilier ancien, les biens immobiliers neufs sont confrontés à des coûts qui augmentent dans tous les sens : coûts de construction, normes et fonciers. Et d’autre part, la demande n’arrive plus à suivre puisque la hausse des taux d’intérêt (même si elle plafonne désormais) a réduit la capacité d’emprunt des acheteurs. Dans ces conditions, contrairement à l’immobilier ancien, l’ajustement par la baisse des prix est quasiment impossible à réaliser.
Résultat : promoteurs et constructeurs de logements se retrouvent confrontés à la quadrature du cercle et nombre d’entre eux n’ont d’autre solution que de supprimer des emplois. Et maintenant que la situation s’enlise, le risque d’échec se précise pour les plus vulnérables. Selon une étude du cabinet Altares, le 4ème trimestre 2023 est l’un des pires des 30 dernières années en termes de faillites globales, sachant que le secteur de la construction représente 24% des faillites. Cette dernière recense désormais plus de 14 000 défauts, dont près de 11 000 dans les seules activités du bâtiment.
Plan de restructuration
Symbole de cette fragilité, le groupe AST, deuxième constructeur immobilier français, est actuellement confronté à de grandes difficultés. Alors que son cours de bourse avait déjà chuté de 66% en 2023 et de 33,5% depuis le début de l’année, la marque a demandé ce lundi la suspension de la cotation de son titre. Le groupe, notamment présent sur le créneau de la construction modulaire en bois avec des marques comme Natilia ou Natibox, termine néanmoins 2023 avec un chiffre d’affaires en croissance de 15 %. Mais face aux difficultés et à l’inflation des coûts, la marque a dû lancer un plan de restructuration entraînant des suppressions d’emplois.
La situation est-elle prête à empirer ? Les professionnels du secteur ne sont pas sereins. « Les pouvoirs publics sont déterminés à mettre en œuvre un choc d’offre qui n’a aucun sens dans le secteur de l’immobilier neuf ! se plaint Damien Hereng, président de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles.Tant qu’ils ne comprendront pas cela, de plus en plus d’opérateurs seront en grande difficulté. Plus le temps passe, plus la situation sera difficile à rétablir.» Et côté logement collectif, même inquiétude chez Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers, qui interpellait ainsi le ministre du Logement fin février : « M. Kasbarian, tu es le ministre de la dernière chance ! Vos décisions doivent contribuer à éviter que cette crise du logement ne se transforme en une crise sociale incontrôlable.»