Déçu par les résultats du second tour des législatives, le site d’extrême droite Réseau Libre a publié un texte appelant à tuer quatre personnalités politiques de gauche (Manuel Bompard, Alexis Corbière, Rachel Keke et Ian Brossat) ainsi que l’avocat Yassine Bouzrou, connu pour avoir défendu des familles de victimes de violences policières. Le site avait fait la une des journaux la semaine précédente en publiant une liste d’une centaine de personnes accusées de violences policières.« Les avocats seront éliminés ». La profession a rapidement apporté son soutien aux avocats visés et le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti a condamné ces menaces. Une plainte a été immédiatement déposée par le bâtonnier de Paris Pierre Hoffman. Créé en 2015, Réseau libre est un site xénophobe hébergé en Russie et lié à un militant d’extrême droite que la France n’a pas extradé, comme nous l’avions signalé. Il est impliqué dans des activités de harcèlement en ligne et a été impliqué dans la planification d’attaques contre la communauté musulmane.
« Des cibles qui assument leur statut d’ennemi »
Dans un billet d’une rare violence signé Léon et publié lundi 8 juillet, ce contributeur régulier du site estime que les résultats des élections laissent deux options : « Soit nous prenons acte et décidons de laisser faire en nous protégeant simplement nous-mêmes et notre propre peuple, soit nous décidons de mettre ce troupeau de connards au pas avec les seules méthodes qui restent, ce que je vous laisse imaginer. » S’il considère que la deuxième option « impose des attaques générales et non ciblées », il refuse de devenir un terroriste. Toujours dans une provocation haineuse, l’auteur écrit qu’il aurait un «« plaisir immense » voir les djihadistes commettre un autre attentat similaire à celui du Bataclan pour punir les Français favorables à l’immigration. Léon propose alors une troisième voie, tout aussi violente : « Protégez-vous et vos proches MAIS en attaquant régulièrement non pas des cibles aléatoires parmi les 95% de connards, mais des cibles qui assument leur statut d’ennemis », parmi « des avocats, des journalistes, des militants et des politiciens de second ordre. »
Ce projet d’assassinat d’opposants d’extrême droite ne s’arrête pas là, puisque le mystérieux Léon suggère cinq noms de cibles en diffusant leurs adresses présumées. Il s’agit de quatre personnalités politiques de gauche : le député insoumis Manuel Bompard, le député Alexis Corbière (ex-LFI), l’ex-députée LFI Rachel Keke (battue au vote de dimanche), le sénateur communiste Ian Brossat et l’avocat Yassine Bouzrou, connu pour son engagement contre les violences policières., Au moins trois des cinq personnes ciblées par Free Network ont indiqué qu’elles intenteraient une action en justice. « Je prends la menace au sérieux et je vais porter plainte », Ian Brossat nous écrit. Manuel Bompard affirme avoir signalé le lien vers la plateforme de haine en ligne Pharos et avoir fait une dénonciation au procureur. Yassine Bouzrou nous a également indiqué avoir porté l’affaire devant la justice.
Vers un blocage du site ?
Suite aux premières menaces contre une liste d’avocats, le ministre de la Justice a réagi en condamnant « avec la plus grande fermeté » cette publication et promettant de barrer la route à ceux qui attaquent les avocats., Le ministère de la Justice a saisi le procureur de la République de Paris à qui le site a été signalé par le barreau de Paris le 3 juillet. Nous avons été contactés et compléterons cet article si nous recevons une réponse.
Le ministère a également souligné l’importance de la plateforme Pharos, qui fait partie du ministère de l’Intérieur et qui traite les signalements de contenus haineux. « Il peut adresser des demandes de retrait à l’éditeur ou à l’hébergeur, le blocage d’un site ou son déréférencement » La Chancellerie a indiqué à CheckNews que le ministère de l’Intérieur avait fait référence au ministère en charge des Affaires numériques, qui est chargé de réguler les contenus en ligne, mais qui ne nous a pas répondu.
Alors qu’il prétend être invincible en étant hébergé en Russie, le site Free Network reconnaît dans un autre article publié le 8 juillet que« Il est possible que les FAI (Fournisseurs d’accès Internet, ndlr) Bloc français « Réseau Libre ». Ce qui aurait pour effet de réduire considérablement son accès. Un autre site appartenant à Léon, l’auteur des menaces contre les élus, fait ainsi l’objet d’un tel blocage. Le site d’extrême droite mise donc sur « plusieurs sites miroirs sont déjà prêts dans différents pays » de rester accessible dans le temps et ainsi pouvoir continuer à publier des menaces de mort et des textes haineux.
Article mis à jour le 8 juillet 2024 à 17h30 : ajout de la réponse du Ministère de la Justice.
Mise à jour à 21h10 : ajout d’une troisième action en justice.
Mise à jour le mardi 9 juillet 2024 à 9h30 : Ajout des noms des plaignants.