Le Rassemblement national a fait savoir qu’il entendait plus que jamais être au centre du jeu. Dans son discours à Hénin-Beaumont, dimanche, Marine Le Pen a alterné entre bons points et avertissements à l’égard de Michel Barnier.
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Le Rassemblement national revendique Michel Barnier et son gouvernement « sous surveillance »selon les mots de Marine Le Pen dans La Tribune du dimancheDimanche 8 septembre. Le parti Le Pen se réjouit d’avoir retrouvé un rôle décisif d’arbitre. C’est de l’arithmétique. Puisque les deux autres blocs, gauche et centre, sont incapables de dialoguer, le RN et ses 126 députés redeviennent indispensables. Michel Barnier aura besoin de leur abstention pour surmonter la censure, comme le Nouveau Front populaire aura besoin du ralliement des élus d’extrême droite pour faire tomber le gouvernement. A l’Assemblée, le RN est devenu le maître des horloges, il soufflera le chaud et le froid, peut-être jusqu’à ce qu’une censure puisse entraîner une nouvelle dissolution en juin prochain.
Marine Le Pen a choisi cette stratégie en raison de cette quête sans fin de respectabilité. Après avoir obligé ses députés à sourire, se taire et porter la cravate pendant deux ans, elle pensait avoir atteint le but. Crash, aux législatives, le front républicain a poussé l’extrême droite hors du pouvoir. Depuis qu’elle a pris la tête de son parti il y a 13 ans, la fameuse « dédiabolisation » est le mythe de Sisyphe de Marine Le Pen. Elle pousse le rocher de la banalisation de l’extrême droite en haut de la colline. Et à chaque élection, elle dégringole et retombe sur ses pieds. Alors elle tente à nouveau sa chance en appelant l’opinion publique à montrer qu’à la différence de la gauche, le RN est un parti responsable, qui ne veut pas le chaos.
C’est une stratégie qui n’est pas sans risques pour Marine Le Pen. D’abord, au sein même du parti, beaucoup ne comprennent pas pourquoi le RN devrait donner sa chance à Michel Barnier, un homme qui a déjà été ministre il y a 31 ans, qui a consacré une grande partie de sa carrière à la construction européenne et qui a un profil un peu techno. Bref, un pur produit de cette « droite douce » et pro-européen que les lepénistes ont toujours dénoncé. La preuve, vendredi matin, le député RN de la Somme Jean-Philippe Tanguy a traité le Premier ministre de « fossile de vie politique », et même être « l’un des politiciens les plus stupides de la Ve République. » Surtout, cautionner le gouvernement Barnier, c’est prendre le risque pour Marine Le Pen d’être engloutie par ce fameux « système » qu’elle prétend remplacer. Elle en fait désormais partie. Comment alors incarner une alternative crédible le jour venu ? A force de vouloir se déguiser en parti responsable et inoffensif, le RN pourrait bien finir par n’être qu’une coquille vide.