Le relooking radical de la boxeuse algérienne Imane Khelif
Après avoir été victime de cyberharcèlement à propos de son apparence physique, la médaillée d’or de boxe féminine aux Jeux Olympiques de Paris 2024 a dévoilé un nouveau look beauté ultra-féminin dans une vidéo Instagram.
Des boucles brunes volumineuses encadrant son visage radieux, un maquillage œil de chat, une robe fleurie rose assortie à ses boucles d’oreilles : Imane Khelif, la championne olympique de boxe, apparaît métamorphosée. L’Algérienne de 25 ans pose fièrement devant la caméra, les bras croisés, un grand sourire aux lèvres et parée de sa médaille d’or autour du cou. Comme un pied de nez à ceux qui lui avaient reproché de ne pas être assez « féminine » sur le ring lors des JO de Paris 2024, au point de remettre en question son genre. « Pour gagner sa médaille, elle n’avait pas de temps à perdre dans les salons de beauté ou à faire du shopping. Elle n’a jamais ressenti le besoin de se conformer à ces standards pour prouver son existence », est-il écrit en arabe en légende de cette vidéo avant/après publiée mercredi 14 août sur le compte Instagram de l’institut de beauté algérien Code, à l’origine de ce relooking. La publication a également été partagée sur la page de l’intéressée, qui est suivie par plus de 2,1 millions d’abonnés.
« Elle peut être féminine et élégante quand elle le souhaite »
Loin d’être une preuve de capitulation face aux pressions exercées sur l’athlète visant son apparence, ce véritable plaidoyer explique qu’Imane « n’a pas cherché à changer d’apparence pour s’adapter aux moules dans lesquels le monde veut nous enfermer », mais qu’en choisissant de concourir au naturel, elle a voulu transmettre un message « beaucoup plus profond ». « Les vêtements ne font pas un moine et l’apparence ne révèle pas l’essence d’une personne. Elle peut être féminine et élégante quand elle le veut, mais sur le ring, elle n’a pas besoin de décorations ou de talons hauts. Il faut juste de la stratégie, de la force et du punch, qui sont l’essence de sa personnalité », la défend-on aujourd’hui. Avant de rappeler : « De même qu’une moustache ne définit pas un homme, les scarabées en ont aussi, de même les robes, les extensions et le maquillage ne définissent pas une femme. »
L’auteur de ce discours se permet même une attaque frontale sur l’une des adversaires d’Imane Khelif, déplorant que « toutes les pistes ne soient pas le lieu de véritables athlètes passionnées » comme elle. « L’Italienne nous a montré que même ceux qui pleurent dans les cours d’école, ceux qui inventent des mensonges pour voler la nourriture des autres, peuvent finir sur le ring », peut-on lire, comme un tacle sur la boxeuse Angela Carini, qui avait abandonné son combat en quart de finale face à Imane Khelif, après seulement quarante-six secondes de l’épreuve.
Une polémique « jamais » vue depuis Hassiba Boulmerka
Cette publication souligne également que « jamais depuis Hassiba Boulmerka » une athlète n’avait « déclenché autant de polémiques », en référence à la spécialiste algérienne des courses de demi-fond, championne du monde du 1500 m aux Jeux olympiques de Barcelone en 1992. En effet, ces derniers jours, Imane Khelif a subi une violente vague de harcèlement sur les réseaux sociaux telle qu’elle a été contrainte de porter plainte pour « cyberharcèlement en raison du sexe, injure publique en raison du sexe, provocation publique à la discrimination et injure publique en raison de l’origine », a indiqué mercredi dernier le parquet de Paris, contacté par l’AFP.
L’image et le corps d’un athlète ont une influence sur la carrière des sportives, a analysé Natacha Lapeyroux, chercheuse en sociologie des médias, du genre et du sport dans un entretien à Madame Figaro En février dernier, un traitement qui touche particulièrement les boxeuses, renchérit Sandy Montañola, chercheuse au laboratoire Arènes du CNRS. « Avant 2012, les JO n’étaient pas ouverts aux boxeuses. Aujourd’hui, elles sont médiatisées. Cela remet les choses en question et on avance, même si les archétypes persistent. On accepte que les athlètes féminines aient un corps d’athlète, à condition qu’elles montrent des signes de féminité », expliquait-elle. En effet, les travaux de la sociologue Catherine Louveau avaient aussi montré que celles qui pratiquaient des « sports de garçons » avaient tendance à se maquiller et à se coiffer plus que les autres, comme si elles devaient donner des « garanties » de conformité aux sponsors et au public. Imane Khelif est bien l’exception qui confirme la règle.