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Le refus du gouvernement de fournir les lettres de plafond à Eric Coquerel et Charles de Courson est-il une violation de la Constitution ? – Libération

Le gouvernement Barniercas

Alors que l’exécutif ne leur a toujours pas communiqué ces documents sur lesquels s’appuiera le budget pour 2025, le président et le rapporteur général de la commission des finances à l’Assemblée dénoncent un « refus absolument illégal ».

Ils n’ont toujours pas reçu les lettres de plafond demandées. Malgré un premier courrier adressé au ministre du Budget démissionnaire le 26 juillet, des relances à l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal, une dernière missive à l’attention du nouveau chef du gouvernement, Michel Barnier, le 11 septembre, une visite conjointe à Matignon le mardi 17 septembre « pour un contrôle sur pièces et sur place », puis une visite impromptue à Bercy le mercredi 18 septembre, Eric Coquerel et Charles de Courson sont restés bredouilles.

Jeudi 19 septembre, le président et le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée n’ont reçu, comme Michel Barnier l’avait promis, qu’un courriel contenant un « tiré à part » intermédiaire, dont le contenu était révélé par Politique. Ce rapport, qui doit habituellement être transmis aux parlementaires au plus tard le 15 juillet, résume les plafonds de crédits envisagés pour chaque mission budgétaire, et les orientations générales du projet de loi de finances qui doit être débattu à l’automne. On est en revanche sans nouvelles des lettres de plafonds demandées au Premier ministre, qui avaient été signées le 20 août par son prédécesseur, Gabriel Attal, et envoyées aux différents ministères.

« Violation flagrante de nos lois biologiques »

Dans un communiqué de presse consulté par Vérifiez les nouvelles, Eric Coquerel déplore que le tiré à part reçu jeudi « manque d’informations importantes, notamment sur la répartition des budgets alloués à chaque ministère, qu’elles soient simplement résumées ou plus détaillées. » C’est pourquoi, ajoute le président de la commission des finances, « Elle ne remplace pas les lettres de plafonds adressées aux ministres en août et sur lesquelles, comme l’indique ce document, sera basée la loi de finances pour 2025. » Eric Coquerel indique donc qu’il continuera à demander ces lettres de plafond, qui définissent le montant alloué à chaque ministère pour remplir ses missions en fonction des priorités fixées par le gouvernement. En outre, le député LFI estime que l’envoi des tirés à part « ne répare pas le refus absolument illégal qui a été opposé au rapporteur général et à moi-même dans la transmission des documents budgétaires à deux reprises, à Matignon le mardi 17 septembre, puis à Bercy le mercredi 18 septembre ». Charles de Courson a de son côté publié un communiqué similaire regrettant que le document transmis par Michel Barnier ne corresponde que partiellement aux demandes formulées, et réclamant une nouvelle fois la communication des lettres de plafond signées par Gabriel Attal.

Depuis le début, Eric Coquerel et Charles de Courson revendiquent leur droit d’accès aux documents en question, qui leur est accordé par la Constitution. Ainsi, face aux refus du gouvernement, les deux élus invoquent parfois une atteinte à la liberté d’expression. « un droit constitutionnel » parfois « une violation flagrante de nos lois biologiques. » Invité sur BFMTV mardi soirCharles de Courson a notamment relaté ses échanges avec le secrétaire général du gouvernement : « Je lui ai dit droit dans les yeux : ‘Madame, les lettres de plafond, oui ou non, sont-elles un document qui peut être communiqué au président de la commission des finances et au rapporteur général du budget ?’ Réponse : ‘Oui’. Deuxième question : ‘Est-ce que vous devez les donner ?’ Eh bien, il y a un grand débat. Nous disons oui. » D’autre part, leurs interlocuteurs ont apparemment justifié leur refus de délivrer les documents demandés en considérant qu’ils ne sont que « préparatoire à la décision ». « Ils ont estimé qu’en droit, ils n’avaient aucune obligation de communiquer les lettres de plafond », explique le député Liot.

« Enquêtes sur pièces et sur place »

Pour étayer leur argumentation, Eric Coquerel et Charles de Courson citent parfois l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances. Cette disposition accorde aux présidents et aux rapporteurs généraux des commissions des finances de l’Assemblée et du Sénat la possibilité de procéder à des « à toutes les enquêtes sur pièces et sur place » jugées utiles à l’accomplissement des missions qui leur sont assignées : suivi et contrôle « l’exécution des lois financières », et évaluer « toute question relative aux finances publiques ». Dans le paragraphe suivant, il est prévu que « tous les renseignements et documents financiers et administratifs qu’ils demandent (…) doivent leur être fournis » – sauf « les sujets à caractère secret intéressant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État ainsi que le respect du secret de l’instruction et du secret médical », réserve qui ne s’applique pas en l’espèce. Pour rappel, les lois organiques traitent de questions constitutionnelles, comme l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics, sans avoir tout à fait la même valeur juridique que la Constitution. Dans la hiérarchie des normes, elles se situent donc au-dessus des lois ordinaires régulièrement adoptées par le Parlement.

Alors, les dispositions de la loi organique rendent-elles illégal, voire inconstitutionnel, le refus d’accéder aux demandes de consultation des lettres plafonds réitérées par Eric Coquerel et Charles de Courson ? Les professeurs de droit public consultés par Vérifiez les actualités nous ne sommes pas tous d’accord sur la question. « Les lettres de plafond, bien que documents préparatoires, sont des documents administratifs et financiers qui doivent être transmis aux autorités chargées d’un contrôle documentaire et sur place », estime le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier.

Si Eric Coquerel et Charles de Courson ont clairement tenté de mettre en œuvre la possibilité offerte par l’article 57 en se rendant à Matignon puis à Bercy, « la question se pose de savoir si les lettres de plafond sont des documents financiers et administratifs », affirme Mathieu Carpentier, professeur à l’université Toulouse-Capitole. « On se souvient qu’en 2023, en plein débat sur les retraites, (le député PS) Jérôme Guedj, coprésident de la mission d’évaluation et de suivi des lois de financement de la sécurité sociale (et investi de prérogatives équivalentes à celles de président et rapporteur général de la commission des finances), avait obtenu la communication de l’avis du Conseil d’État, acte préparatoire par excellence », citations de Mathieu Carpentier. Pour qui aucune « conclusion finale » On ne peut tirer aucune conclusion de ce précédent.

« Interprétation extensive »

« Il est clair qu’il s’agit d’une atteinte au bon fonctionnement de la procédure budgétaire » mais « Dire que le droit constitutionnel est bafoué est excessif », temporise Vincent Dussart, professeur de droit des finances publiques à l’université Toulouse-Capitole. Même s’ils jouent un rôle déterminant dans les ressources dont disposera chaque ministère, les plafonds « font partie d’une pratique administrative », et non une obligation constitutionnelle ou législative – comme l’ensemble du processus de préparation du budget, « basé en grande partie sur des règles informelles ». Son collègue de l’université de Poitiers, Sébastien Kott, n’y voit pas non plus d’inconvénient.« attaque contre la Constitution » dans le refus de transmettre les lettres de plafond à la commission des finances à temps. Ces documents «constituer un arbitrage politique» consistant à fixer des limites de dépenses : « Leur transmission est une pratique qui n’est donc inscrite dans aucune norme juridique. » Alors, certes, l’article 57 de la loi organique prévoit « une obligation d’information », « mais qui concerne le contrôle et l’évaluation de l’exécution du budget », souligne Vincent Dussart. Elle n’a donc pas vocation à s’appliquer au stade de l’élaboration de la loi de finances.

« Cette disposition concerne le contrôle de l’exécution des lois de finances et l’évaluation des politiques publiques », ajoute Aurélien Baudu, professeur de droit des finances publiques à l’Université de Lille. Ainsi, la loi organique « n’a jamais eu l’intention de confier au Parlement un quelconque contrôle sur la préparation de la loi de finances », et son article 38 précise également que « L’élaboration de la loi de finances est conduite sous l’autorité du Premier ministre et du ministre chargé des Finances. » Lorsque le législateur organique a modifié en 2021 l’article 57, celui brandi par Eric Coquerel et Charles de Courson, il entendait « renforcer les pouvoirs conférés aux commissions des finances de chaque assemblée pour le contrôle de l’exécution des lois de finances, et pas nécessairement de leur préparation qui reste une opération plus confidentielle menée sous l’autorité du gouvernement. » Les deux députés font donc « une interprétation extensive » de ce texte, conclut Aurélien Baudu. « Seulement une circulaire de Jean-Pierre Raffarin datant de janvier 2005, il y a presque vingt ans, alors qu’il était Premier ministre » avait imposé que les lettres du plafond soient « transmis aux commissions des finances des deux Assemblées », mais sans préciser de délais ni indiquer « de toute obligation constitutionnelle ».

Cammile Bussière

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