Le programme de Donald Trump va-t-il faire remonter l’inflation aux Etats-Unis ?
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Le candidat républicain a promis d’augmenter fortement les droits de douane. Une mesure qui contredit sa volonté de baisser les prix à la consommation.
« Rendre l’inflation à nouveau grande ! » Alors que l’inflation a largement reculé ces derniers mois aux Etats-Unis, de nombreux économistes alertent sur une possible nouvelle hausse des prix en raison des nombreuses taxes sur les importations promises par Donald Trump. A l’inverse, le président élu assure qu’il mettra fin au phénomène. Mais qu’est-ce que c’est réellement ?
Carburants, œufs, assurances… Depuis le début de l’année 2021 et l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, les Américains subissent une hausse des prix de 20 % en moyenne. Du jamais vu depuis la fin des années 1970. En cause : les difficultés mondiales liées à la fin de la crise du Covid-19 et les généreux plans d’aide votés pour relancer la croissance américaine.
Cette inflation record a culminé en juin 2022, selon le ministère américain du Travail. A cette date, l’indice des prix à la consommation affichait une hausse de plus de 9% sur un an. De quoi inspirer le camp républicain, qui a surnommé cette inflation la « Bidenflation ».
Après cette flambée des prix, l’économie américaine est progressivement revenue à un taux d’inflation plus raisonnable. En septembre, celui-ci est tombé à 2,4%, à son plus bas niveau depuis janvier 2021. Un signe positif pour le portefeuille des Américains mais insuffisant pour effacer des mémoires la valse des étiquettes au supermarché et à la gare-service.
« Les ménages américains ont l’impression de s’être appauvris ces dernières années, alors que l’économie américaine n’a jamais été aussi en forme. »
Sylvie Matelly, économiste et directrice de l’Institut Jacques-Delorssur franceinfo
La croissance aux Etats-Unis devrait ainsi augmenter de 2,8% en 2024, selon le FMI, contre 0,8% pour la zone euro et 1,1% pour la France. Malgré une récente augmentation, le taux de chômage reste également faible, à 4,3 %, selon l’OCDE. Cependant, « L’inflation est probablement l’un des facteurs clés de la victoire de Donald Trump ». Tout au long de sa campagne, le candidat républicain a affirmé que « l’inflation disparaîtrait complètement » s’il était élu.
De retour à la Maison Blanche, Donald Trump pourrait se retrouver arrosé par l’arroseur. Et pour cause : le protectionnisme et les hausses généralisées des droits de douane qu’elle compte appliquer risquent de faire remonter les prix. « Il est légitime de craindre que Donald Trump ne relance cette inflation »avait ainsi alerté seize économistes, prix Nobel, dans une lettre rendue publique en juin 2024.
Dans son programme, le milliardaire propose donc de taxer tous les produits importés aux Etats-Unis à 10 % et ceux en provenance de Chine à 60 %. Des mesures qui pourraient toucher les fruits, dont 60 % sont importés aux Etats-Unis, notamment en provenance des pays voisins, autant que les smartphones fabriqués en Asie.
« Les droits de douane finissent toujours par être payés par quelqu’un et cela risque d’être le consommateur américain car il n’y a pas d’alternative locale à toutes les importations américaines. »
Sylvie Matelly, économistesur franceinfo
Plusieurs cabinets d’études et groupes de réflexion se sont penchés sur l’impact du programme économique de Donald Trump. Si le résultat numérique de ces analyses varie selon les instituts, tous prédisent une hausse de l’inflation si cette dernière met en œuvre son programme.
Le cabinet de conseil Roland Berger calcule que les hausses de droits de douane, ajoutées aux probables mesures de rétorsion de la Chine et de l’Union européenne, coûteraient 749 milliards de dollars (694 milliards d’euros) aux Etats-Unis. Les économistes d’UniCredit, cités par l’AFP, estiment pour leur part que ces mesures « ajouterait environ 1,3 point de pourcentage à l’inflation américaine la première année ».
Ce n’est pas tout. « La question de l’immigration est aussi importante que celle du commerce international » sur l’inflation, explique à l’AFP Gilles Moec, économiste en chef du géant de l’assurance Axa. Durant sa campagne, le candidat républicain a déclaré vouloir expulser massivement les sans-papiers alors que le pays est déjà touché par une pénurie de main d’œuvre.
« Il y a une certaine contradiction à vouloir délocaliser des industries dans une économie déjà soumise à de fortes pressions sur le marché du travail, tout en freinant l’immigration. »
Sylvie Matelly, économistesur franceinfo
Dans une étude, le Pew Research Center estime que 8,3 millions de travailleurs sans papiers pourraient être concernés, ce qui entraînerait une hausse de plus de 2 points de l’inflation aux Etats-Unis l’année prochaine. Au total, la politique de Donald Trump risque d’entraîner une nouvelle poussée inflationniste, estimée à plus de 4% supplémentaires dans un scénario sombre.
Reste une inconnue : Donald Trump tiendra-t-il ses promesses ? « Il va devoir renoncer à quelque chose, mais on ne sait pas quoi »estimé Sylvie Matelly. « S’il ne lance pas une guerre commerciale aussi dure que prévu ou s’il limite moins l’immigration, l’effet inflationniste sera moindre »assure l’auteur de Géopolitique de l’économie. Verdict attendu pour l’économie américaine dès janvier 2025.